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Transhumance : La République des girouettes

Rédigé par Dakarposte le Mercredi 19 Août 2015 à 11:38 modifié le Mercredi 19 Août 2015 - 11:44

De Léopold Sédar Senghor à Macky Sall, les procédés politiques au Sénégal n'ont pas changé. Au Sénégal, la transhumance, utilisé pour désigner la migration périodique du bétail, est intégré depuis peu dans le Larousse par la force des politiciens sénégalais. Les régimes se succèdent et se ressemblent. Il n'est donc pas étonnant que la rupture chantée par l'actuel régime et réclamée par les populations reste à l'état d'un slogan creux. Leurrer par une certaine caste de politiciens qui, pour parvenir à leur fin, sont même prêts à suivre les traces de Bouki-la-hyène. Cet animal perfide prêt à tout, quitte à vendre sa mère pour toucher au butin.


Transhumance : La République des girouettes


Avec Djibo Ka, le Secrétaire général de l'Union pour le Renouveau démocratique (Urd) qui vient de rejoindre l'Alliance pour la République (Apr), l'on constate avec désolation que la transhumance a la peau dure au Sénégal. A la manière d'Egar Faure, homme d'Etat français, ministre au sein de plusieurs gouvernements, qui répondait si subrepticement aux journalistes "Ce n'est pas la girouette qui tourne, mais le vent", les politiciens sénégalais tournent, tournent! Déjà, Macky a réussi à enrôler pas moins de 10 anciens dignitaires qui ont fait la pluie et le beau temps au Pds d'Abdoulaye Wade et à Rewmi d'Idrissa Seck.
Djiko Ka: Le Fouché sénégalais


 

L'événement est encore frais dans les mémoires. Entre les deux tours de la présidentielle de 2000, au sortir d'une audience au Palais de la République, Djibo Kâ déclarait qu'il avait demandé à Abdou Diouf de quitter le pouvoir. On n'aura pas attendu longtemps pour le voir revenir faire équipe avec Diouf. La suite on la connait. Abdou Diouf, candidat malheureux, sera remplacé par Abdoulaye Wade. Quelques temps après, l'Union pour le Renouveau démocratique (Urd) dirigé par Djiko Ka file le parfait amour avec le Pds. En 2004, il quitte le Cadre permanent de concertation (Cpc) à la suite du départ de Idrissa Seck du Pds et fait tandem avec Wade jusqu'en 2012. Mais pour qui connait l'homme, cela ne surprend guère. Il est réputé dans la sphère politique comme étant l'homme qui a le plus transhumé. De Senghor à Diouf, en passant par Wade et aujourd'hui Sall, il a fréquenté tous les régimes politiques, flirté avec tous les candidats au pouvoir. A la manière d'un Talleyrand ou d'un Fouché, Djibo Ka est devenu "l'homme de tous les régimes". Aussi empressé à servir qu'à trahir, c'est selon, il a réussi a faire de la politique un art où le cynisme s'allie à l'efficacité.
 

Nafissatou Diop Cissé: L'amazone de Rewmi dans le marigot apériste


 

A peine son mentor Idrissa Seck a-t-il tourné le dos à Benno Bokk Yaakar, coalition qui a porté Macky Sall au pouvoir, que Me Nafissatou Diop Cissé a claqué la porte de Rewmi. Comme pour la gratifier d’avoir rejoint la grande prairie marron-beige, la notaire, ex-égérie du parti d’Idrissa Seck qui y occupait le poste de chargée de communication, a été bombardée Présidente du Conseil d’Administration du Fonds Souverain d’Investissement Stratégiques (Fonsis). En dépit d'une certaine rumeur qui voudrait qu'elle soit en désaccord avec le chef de l’Etat sur le budget de la structure estimé à quelques cinq milliards de Francs Cfa, Nafissatou Diop Cissé est bien décidé à garder sa place dans sa nouvelle famille.
 

Awa Ndiaye : Une cuillère dans la soupe


 

Diplômée de l’université Paris IV en littérature française, ancienne assistante en lettres à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, également membre de la commission nationale de réforme de l’enseignement du français au Sénégal, Awa Ndiaye s’illustre plus par ses coups d’éclat que pour ses prouesses intellectuelles. Epinglée par des rapports de l’Armp en 2008, la ministre « people et glamour » de la République est celle qui a acheté des cuillères, nattes de prières, clés usb à prix d’or, estimés respectivement à 47000 FCFA et 39000 FCFa et 92000 FCFA. Elle est aussi la nouvelle épouse du très remarqué Directeur général du Port de Dakar, Cheikh Kanté. Caricaturée par la presse sénégalaise comme une « Pank » (belliqueuse), on se souvient d'elle pour avoir administrée une gifle magistrale à sa collègue Aminata Lô. Awa Ndiaye surnommé "Koudou" (cuillère), s’est bien souvent retrouvée au cœur de scandales qui n’honorent pas la République. La petite dame aux allures de comtesse n’a quasiment jamais été inquiétée malgré le lourd passif de ses déboires. Du temps du régime libéral, Awa Ndiaye, véritable égérie des Wade, était sous la coupe du tout puissant leader de la Génération du concret, Karim Wade. Ancienne militante du PS sous l’ombre de son ex époux, Cheikh Tidiane Sylla, elle se fait une place au sein de l’Alternance grâce à Cheikh Tidiane Gadio. Consul du Sénégal à Washington, elle force les portes du Palais à son retour et devient ministre de l’Entreprenariat féminin. Jusqu'à la chute de Wade en mars 2012, elle continuait d'arpenter les couloirs du Palais avec à la traine ses couteuses casseroles. Avec l'accession de Macky Sall au pouvoir, elle retrouve un ancien collaborateur. Et ne tarde pas à faire sa mue. Elle sera ainsi totalement blanchie dans l'affaire des cuillères après un non-lieu prononcé par le Doyen des juges d'instruction chargé du dossier, s'offrant ainsi une nouvelle virginité.
 

Ntap Ndiaye : L'Innocence de Wade volée


 

A peine deux ans! C'est le temps qu'il a fallu à Innocence Ntap Ndiaye, ancienne ministre de la Fonction publique et responsable du Parti démocratique sénégalais (Pds) pour rejoindre l'herbe fraiche de l'Alliance pour la République (Apr). Non, il ne s'agit pas de transhumance comme le pensent certains, mais juste d'un "transfert de compétences", dira-t-elle. Si ses ex partisans démocrates crient à la forfaiture, ses nouveaux camarades apéristes saluent le geste de la nouvelle recrue, qui est l'une des plus grosses prises de Macky Sall. Sixième adjoint au maire dans la région de Ziguinchor, Innocence Ntap est considéré aujourd'hui dans la task force de Macky comme celle qui peut faire basculer la tendance dans la région de Ziguinchor. En attendant les joutes électorales, l'ancienne "femme" de Wade reste bien au chaud à la tête du Haut conseil du dialogue social.
 

La loterie gagnante de Baila Wane


 

Ancien tout-puissant Directeur général de la Loterie nationale sénégalaise (Lonase) sous Wade, Baïla Wane fait désormais partie des Beige-marron. Epinglé et emprisonné pour mauvaise gestion et malversation financière après la chute du régime libéral, Baïla Wane, libre, assume son statut de transhumant. Et n'en a cure des critiques. "Les partis politiques au Sénégal appartiennent à des personnes. Si moi, je ne me retrouve pas dans un parti politique, je le quitte. Personne ne peut m'imposer de rester dans un parti. Moi, je ne peux pas rester dans un parti où il y a des obstacles, des pièges. Quand je me sens pas bien quelque part, je m'en vais. Si vous appelez transhumant le fait de quitter un parti qui se retourne contre vous alors oui, je suis un transhumant. Quant au débat sur le sujet, j'en ai cure de ces gens-là. J'ai ma conviction. C'est un débat d'Abdoulaye Wade et de Tanor Dieng qui ne veulent pas que leurs partis soient dégarnis", soutenait-il dans un entretien accordé au journal L'Observateur. Voilà au moins, qui a le mérite d'être clair!
 

Pape Diouf : Un Teigne à l'Apr


 

Après huit années de compagnonnage, Pape Diouf a rejoint Macky Sall. Ancien maire de Bambey, il avait tourné le dos au Parti démocratique sénégalais (Pds) pour suivre Idrissa Seck en 2007, après sa disgrâce auprès de Abdoulaye Wade. L’ancien ministre de la Pêche et de l’Economie maritime, devenu plus tard ministre de l’Agriculture, a finalement quitté Rewmi. Et a initié son propre mouvement avant de rallier le camp présidentiel où il s'est trouvé son cocon. Bombardé à la présidence du Conseil d'administration de la Société de recouvrement en remplacement de Mata Sy Diallo, il coule désormais des jours heureux à l'Alliance pour la République (Apr). En attendant les échéances électorales, il essaie de séduire et de rallier le Baol à la cause apériste. Mais, la magie du vieux politicien a du mal à opérer.
 

Oumar Guèye : Le baiser de Judas


 

Après Nafissatou Diop Cissé et Pape Diouf, Idrissa Seck a perdu un autre soutien de taille. Oumar Guèye, le maire de Sangalkam, a lui aussi choisi de tourner le dos à Idrissa Seck après que celui-ci ait décidé de quitter la coalition présidentielle. Oumar Guèye, un de ses plus fidèles lieutenants, avait déjà annoncé la couleur en gelant ses activités au sein de Rewmi avant de s'engouffrer dans les vertes prairies marron-beige. Depuis, il flirte avec l'Apr. Nommé ministre des Transports et du Tourisme, il est actuellement ministre de la Pêche et de l'Économie maritime dans le gouvernement de Mohamed Dionne, Premier ministre nommé le 6 juillet 2014.
 

Abdou Fall: Le nouveau Baye Fall de Macky


 

Ministre et défenseur de Abdoulaye Wade à qui il vouait une admiration, Abdou Fall s'est refait depuis peu une virginité politique. Deux fois ministre de la Santé, puis ministre de la Culture et de la Communication, porte-parole du gouvernement avant de démissionner en 2011, peu avant la chute du Pape du Sopi, Abdou Fall est revenu aux affaires pour "aider" Macky Sall. Actuellement conseiller départemental à Thiès, il a été élu sur la liste de la coalition dirigée par l'Alliance pour la République (Apr). Et a officialisé son entrée dans le camp présidentiel en avril 2015 sous la bannière de son mouvement "Alternative citoyenne Andu Nawlé". "Nous pensons qu’il est temps de tourner la page de la compétition pour entrer dans la phase de la mobilisation de la majorité  pour réaliser ce pour quoi les Sénégalais ont élu un Président. Après le temps de la compétition, il faut le temps du travail pour nous attaquer  aux problèmes qui se posent à notre pays et à notre peuple comme la question de l’emploi des jeunes, le développement économique, le défi de la sécurité alimentaire, le défi de l’énergie, l’enjeu de l’éducation, de la formation ", a soutenu Abdou Fall pour motiver son "allégeance" à Macky. 
 

Sitor Ndour : Coucou, le revoilà!


 

Après avoir quitté l'Alliance pour la République (Apr) pour intégrer le Parti démocratique sénégalais (Pds), Sitor Ndour a rejoint à nouveau la maison beige-maison. L'ancien Directeur du Centre des œuvres universitaires de Dakar, premiers des libéraux à s'engager aux côtés de Macky Sall en 2008 avant de le quitter, a décidé de retrouver son ancien camarade. Patron d'Energie libérale pour une avancée nationale (Elan), il a pris la décision de fondre son mouvement dans l'Alliance pour la république (Apr). Une décision prise en mars 2015 au lendemain d'une audience avec Macky Sall. " Nous avons discuté et il fallait par la suite, en tant que chef de parti, que je puisse consulter les instances de mon parti. Tous, à l’unanimité, m’ont donné mandat de répondre à la main tendue du président de la République et de le soutenir pour d’abord qu’il réussisse la mission que le Peuple a bien voulu lui confier, et ensuite l’aider à obtenir une réélection triomphale en 2017. Je peux donc solennellement dire que Elan, mon parti, a pris la décision de soutenir le Président Macky Sall", avait fait savoir Sitor Ndour dans les colonnes du Quotidien.
 

Bécaye Diop : Pour quelques prébendes de plus...


 

" Le secret de ma longévité au gouvernement, c'est ma loyauté au président Wade. Je n'ai qu'un objectif, faire plaisir à Wade et le servir sous toutes les formes". Ainsi, parlait Bécaye Diop, il y a encore quelques années. Proche du président Abdoulaye Wade, il a été ministre des Forces armées de 2002 à 2009. En 2009, il est bombardé ministre de l'Intérieur. Et continue d'occuper des postes ministériels jusqu'à la chute de Wade en 2012. Après une période qui l'a éloigné de la politique du fait d'une maladie, il a fini par répondre à l'appel de Macky Sall. Même si certains partisans de Macky Sall pensent que le recrutement de Bécaye Diop dans les rangs apéristes est "une mauvaise affaire", lui n'en a cure et compte appuyer l'ancien "fils" de Wade à la prochaine présidentielle.
 

Ces exemples prouvent à suffisance que certains de nos hommes politiques sont plus mobiles qu'un bétail en transhumance. Et les chefs d'Etat, censés donner le bon exemple, sont les premiers recruteurs de ces...girouettes ambulantes.


Ce que Macky Sall pensait de la transhumance en 2012

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