S’il y a un scandale dont l’onde de choc continuera pour longtemps encore de résonner dans les cœurs de nos compatriotes épris d’équité et de justice, c’est bien le cas de ces pèlerins que l’Etat sénégalais, par une incurie affligeante, a « oublié » de convoquer aux Lieux saints de l’Islam. Un état de fait inqualifiable aux conséquences insoupçonnées.
Depuis de longues années, le Sénégal convoie quantité de pèlerins à la Mecque. Mais comme sous l’effet d’une mystérieuse malédiction, jamais les structures habilitées n’ont pu organiser ce périple collectif dans des conditions suffisamment correctes. Jusqu’à la fin du magistère du régime libéral, le Ministère des Affaires étrangères était presque certain, pour chaque édition, de devoir faire face à des ratés. Qui pouvait imaginer que cette situation déjà inquiétante irait de mal en pis sous le règne de Macky Sall ? A y regarder de près, ce qu’on vient de faire vivre à ces centaines de pèlerins est la preuve accablante de l’incompétence notoire que beaucoup de gens que le nouveau pouvoir a nommés ne cessent d’afficher aux yeux de l’opinion. Et si ce n’était que de l’incapacité seulement ! Mais non, c’est de l’incapacité mélangée à une incroyable et lamentable mauvaise foi. C’est le ministre des Affaires étrangères, lui-même, qui trône au sommet de ce cirque de mauvais goût en attribuant notamment l’impossibilité de l’Etat sénégalais à confectionner des visas pour une partie des pèlerins laissés en rade à une défectuosité de la machine prévue pour une telle activité.
« Le ridicule ne tue plus ! » Jamais formule n’a aussi remarquablement convenu pour qualifier les errements spectaculaires d’un ministre qui, avec une désinvolture invraisemblable, confond mettre du baume au cœur et remuer le couteau dans la plaie des victimes. Pendant près d’une décade, ce monsieur à l’orgueil un peu trop hypertrophié a parqué ces dignes et vaillants croyants dans un hangar, où les conditions primaires d’hygiène et de confort étaient loin d’être réunies et ; dans la foulée, s’est permis d’ériger devant ce « bunker des lamentations » une panoplie d’obstacles pour empêcher les nombreux éléments de la presse nationale venus aux nouvelles de faire correctement leur travail.
A ces actes totalement coupables, s’ajoutent d’autres non moins navrants et liés notamment, soit à une absence de communication apaisante au moment où les laissés en rade s’y attendaient le moins, soit alors à une communication catastrophique toute cousue du ténébreux fil de la langue de bois.
Mais dans le douloureux ballet de l’irresponsabilité, monsieur le Ministre Mankeur Ndiaye danse-t-il mieux que son commissaire au Pèlerinage à la Mecque ? Sans doute non. Voilà un homme qui affiche une habileté déroutante, inégalable devrions-nous dire, dans l’art de passer à côté de ce pour quoi il est élevé à un grade aussi prestigieux. Sinon, comment Diable se peut-il que ce « commis-serf » d’un autre genre, informé du calvaire inadmissible d’une partie de sa « famille », se permette de vaquer à ses occupations aux Lieux Saints, au lieu de rappliquer dare dare au « pays natal », non pas forcément pour trouver une solution pour leur permettre de rallier la Mecque, mais au moins pour leur manifester sa disponibilité et son entière solidarité par rapport à la lancinante situation qu’ils étaient en train de vivre, par la faute de sa hiérarchie.
Le Sénégal est et reste l’un des pays les plus influents de la Ummah islamique, et ce n’est pas rien. Nous avons la présidence de l’OCI, et ce n’est pas rien. Nous sommes constitués de plus de 95% de Musulmans, et ce n’est pas rien non plus. Autant d’attributs devraient servir de garde-fous pour nous empêcher de tomber dans certaines légèretés du genre de celle à laquelle se sont livrés l’Etat, Mankeur Ndiaye et son extraordinaire Commissaire au Pèlerinage ; des légèretés qui nous exposent à la risée du monde entier, hélas.
Aujourd’hui, face à de tels manquements dont ils sont coupables au premier degré, ce ministre des Affaires étrangères et son Commissaire, ne devraient avoir qu’un seul souci : comment faire pour sortir par la petite porte de la démission volontaire sans trop se blesser ?
A moins que...
Edouard