​Front politique / Lendemains incertains

Rédigé par Dakarposte le Mardi 27 Septembre 2016 à 20:50 modifié le Mercredi 28 Septembre 2016 09:35

Ce sont les jeunes républicains de Rufisque qui sonnent l’alerte pour le camp présidentiel. «Si les élections législatives se déroulent en 2017 conformément au calendrier républicain, il y aura un risque de cohabitation» au sommet de l’Etat car l’opposition pourrait sortir majoritaire de ce scrutin.
Ce n’est pas une simple vue de l’esprit, c’est une crainte réelle de la majorité présidentielle. Celle-ci est en effet malmenée ces derniers temps par une opposition de plus en plus soudée autour d’une forte coalition et une société civile incarnée par des «lanceurs d’alerte» comme Ousmane Sonko de Pasteef ou encore Birahim Seck du Forum civil. Face aux révélations sur les scandales économiques (affaires Bictogo, Pétro Tim, etc.) et les maladresses d’un pouvoir frileux qui agite des menaces de représailles dès qu’il est contrarié, le camp de l’opposition met la pression en projetant de mener le combat dans la rue.
La marche prévue pour les prochains jours aura ainsi valeur de test pour celle-ci, qui s’emploie depuis plusieurs mois à présenter le pouvoir de Macky Sall sous le visage hideux d’un régime à tendance dictatoriale.
En fait le débat politique est d’ailleurs transposé dans la rue car il prend les contours d’une interminable querelle de charretiers avec les invectives qui volent au plus bas. Constamment sur la défensive depuis le fameux «dialogue national» qui a fait long feu et la libération de Karim Wade qui sonne comme la fin de la traque des biens mal acquis, le pouvoir ne parvient plus à convaincre de sa capacité à résoudre les problèmes réels des Sénégalais ni à proposer des solutions.
Dans de telles conditions comment aborder les prochaines législatives ? Si la traque des biens mal acquis ne peut être comptabilisée comme un des succès du président Macky Sall que restera-t-il alors à présenter aux électeurs comme élément positif susceptible de faire pencher la balance en faveur du camp présidentiel ? La couverture maladie universelle est un échec, les bourses familiales un pis-aller sans aucune conséquence positive pour les familles et le Yoonu Yokute a perdu toute sa signification depuis que la famille présidentielle est présentée comme la seule qui voit ses revenus s’améliorer de jour en jour… 
Mais la gouvernance «sombre et tortueuse» (selon le bon mot du néo-opposant Ousmane Sonko) ne profite pas spécialement à l’opposition traditionnelle. Celle-ci ne parvient pas non plus à convaincre de sa capacité à prendre en charge la demande sociale, occupée qu’elle est à tenter de se refaire une virginité auprès d’une opinion désabusée par douze ans d’un régime libéral accusé de gabegie et quatre ans d’une gouvernance ni sobre ni vertueuse car ponctuée de scandales financiers à répétition.
Ni le Pds qui est à la traîne parce que dirigé depuis Paris et Doha ni Khalifa Sall à qui la direction du Ps dénie le droit d’être son candidat pour la prochaine élection présidentielle ne peuvent capitaliser à leur profit cette gouvernance «sombre et tortueuse». Mais profitera-t-elle à la nouvelle opposition incarnée par de jeunes technocrates ambitieux comme Abdoul Mbaye, Ousmane Sonko ou… Birahim Seck ? Quel apport sera celui de ces jeunes technocrates pour contraindre le pouvoir à la cohabitation en remportant les législatives face au camp présidentiel ?

En tout cas la «mère des batailles» s’annonce périlleuse pour le camp présidentiel tout comme pour le camp opposé. Car si l’Apr et ses alliés sortent minoritaires de ce scrutin, l’avenir politique de son leader s’assombrit. En revanche si elle sort victorieuse de ces joutes avec une bonne majorité, cela signifiera que l’opposition n’a pas su mettre à profit la mauvaise posture du camp présidentiel qui ne cesse de perdre du crédit depuis les révélations de scandales économiques et financiers.
Mamadou Ndiaye
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