Violence dans l’arène du Référendum... La raison des armes contre l’arme de la Raison

Rédigé par Dakarposte le Jeudi 17 Mars 2016 à 23:49 modifié le Jeudi 17 Mars 2016 23:54

On se demandait où elle pouvait bien être jusque-là, et là voilà enfin qui prend du service pour entrer en fanfare dans la campagne. Après un moment de balbutiement, la violence, la compagne la plus dévouée de ceux qui n’ont pas d’arguments, fait feu de tout bois dans différents théâtres de mise en solde du « OUI » et du «NON »…


La disparition de la violence, dans sa forme la plus triviale et la plus barbare, de nos réalités politiques, n’est pas proche, et pour cause. Elle s’exprime à moindre frais, de façon grégaire et, dans la plupart des cas, arme son bras noir et cruel en s’appuyant sur des forces aveugles, incultes et trop faciles à instrumentaliser. A quelques encablures de l’instant fatidique où la vérité silencieuse des urnes s’apprête à s’imposer à tous, les uns et les autres font parler la raison des armes au détriment des armes de la raison, tout en étant cependant parfaitement conscients que cette forme d’agitation, la plus barbare dans l’ordre des arguments, ne peut avoir aucune incidence positive dans leur tentative de conquête des suffrages. Ce qui s’est passé à Touba avant-hier est évidemment assez illustratif de ce triste état de fait. Se fondant sans doute sur sa réputation de politicien gangster qui dégaine et tire plus vite que son ombre, une partie de la presse a vite fait de relayer les échauffourées de manière subtilement inéquitable, de sorte à laisser voir que c’est Moustapha Cissé Lô « El Pistolero » qui est à l’origine de ce pugilat brodé de coups de feu. Cette présentation tendancieuse des faits est à l’image de cette « Une » de ce jeudi 16 mars d’un quotidien de la place : « Cissé Lô « El Pistolero » sème la pagaille à Touba ». 
Or donc, il suffirait d’oser d’observer à la loupe les déclarations des camps antagonistes au lendemain des affrontements pour se rendre à l’évidence qu’au moins, pour une première fois, la provocation ne prend pas sa source là où on croit. En  effet, des explications du sieur Moustapha Diouf, (animateur d’une coalition hostile au régime en place et dénommée « Réthiou ») au micro et devant les caméras des correspondants de certains organes de presse à Touba, il ressort que les caravanes favorables au camp du « OUI » sont interdites de passage dans les artères traversant la partie de la ville sainte qu’ils considèrent (lui et sa bande d’énergumènes) comme leur fief. L’homme est allé jusqu’à confesser que leur combat pour empêcher le camp adverse de se payer des bains populaires dans le périmètre rouge prend les allures d’un « Jihad ». 
Un tel aveu, à notre avis, est totalement condamnable au double plan moral et républicain. En effet, il n’est absolument pas concevable qu’un groupe, fut-il dépositaire d’une onction confrérique suprême, s’arroge le droit de dire à un homme comme Moustapha Cissé Lô quels chemins il doit emprunter pour dérouler une promenade politique populaire dans cette ville où s’enracine son patrimoine politique. Le fait est d’autant plus répréhensible qu’il intervient en temps de campagne, qui est, comme nous le savons, un intervalle de temps où l’élasticité de la notion de liberté d’expression, de fait, devient maximale.
Qu’on se comprenne bien donc : par l’analyse de cet épiphénomène, nous ne cherchons qu’à attirer l’attention de tous les observateurs de bonne foi sur le fait que parfois, dans notre démocratie, certaines forces de l’opposition ont tendance à abuser du principe largement  établi selon lequel la formation  au pouvoir, pour peu qu’elle soit susceptible, et parce qu’elle est aussi dépositaire de la puissance publique, n’est jamais étrangère aux facteurs favorisant l’expression de la violence. Ce n’est pas toujours vrai, et ce qui vient de se passer à Touba prouve à suffisance que l’affreux livre de la guerre porte parfois la signature de ceux-là qui passent pour être les plus grands professeurs de la Paix. 


Ibra Déguène Keung

 
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