Le hadj sénégalais devient de plus en plus cher par rapport aux autres pays de la oummah islamique, particulièrement les pays africains. On s’est rendu compte que les voyagistes privés sénégalais y sont pour quelque chose. Ce qui est l’intime conviction de quelques acteurs de la délégation générale au pèlerinage à qui nous avons tendu notre micro et ils se sont confiés à nous en ces termes : « Certains voyagistes privés ne souhaitent que la faillite de la délégation générale pour accaparer le pèlerinage à la Mecque. C’est ce qui justifie leur désir de privatisation du hadj, qui n’a jamais été une demande sociale, mais une revendication des voyagistes privés. D’ailleurs, les plus grands râleurs parmi les voyagistes privés n’ont pas un quota étoffé et ne sont pas dotés de IATA. Parmi ces voyagistes, il y a une dame dont le quota n’atteint même pas 25 pèlerins. Et pourtant, elle arrive
vendre plus de 300 billets. Son astuce est qu’elle les inscrit, 5 millions 500 milles par pèlerin, et elle revend ces pèlerins à des privés qui n’ont pas atteint leurs quotas, à hauteur de 5 millions 800 ou 6 millions, de sorte à avoir un bénéfice de 500.000 ou un million par pèlerin. Beaucoup de voyagistes privés sont coutumiers des faits. Voilà des pratiques qui rendent cher le package de la Mecque d’année en année ».
Les deux raisons de la cherté du hadj
La cherté du hadj est due, en grande partie, aux privés parce que beaucoup parmi eux logent leurs pèlerins dans des hôtels 5 étoiles, alors qu’à la Mecque, il y en a pour toutes les bourses. Il y a des maisons très habitables non loin de la Kaaaba, des hôtels une, deux, trois, quatre étoiles etc. Beaucoup de pèlerins asiatiques et africains logent non loin de la Kaba, et pourtant, ils ne sont pas dans des hôtels 5 étoiles. C’est le cas des Nigérians, Ivoiriens, Maliens et Guinéens qui logent à côté de la fameuse et mythique mosquée Ben Laden, donc à quelques mètres de la Kaaba, et ils sont très bien logés. Pourquoi les privés sénégalais veulent à tout prix loger dans des hôtels 5 étoiles, à quelques pas de la Kaaba ? C’est ce qui fait la cherté du hadj. Ne nécessiterait-il pas une sensibilisation à l’attention des privés et des pèlerins sénégalais pour démystifier les hôtels 5 étoiles ?
Nous le répétons, la cherté du package du hadj se situe à deux niveaux. Premièrement, c’est la cherté du billet d’avion. Deuxièmement, les hôtels 5 étoiles que certains voyagistes privés louent. Sur le billet d’avion, il y a un paradoxe que personne ne peut expliquer. Par exemple, les compagnies aériennes qui font des vols réguliers, c’est à dire Emirati Airlines, Tutkish Airlines, Ethiopian Airlines, Royal Air Maroc etc., les billets d’avion de ces compagnies varient entre 900.000 Fcfa et un million Fcfa. Et pourtant, les avions de ces compagnies font plus de kilomètres, plus d’heures de vol et, donc utilisent beaucoup plus de kérosène, que
Air Sénégal et Fly Nass auxquels le gouvernement du Sénégal donne le monopole chaque année. Le trajet qu’effectuent les avions de ces compagnies aériennes de vols réguliers est plus long car ils passent d’abord par leurs pays d’origine. Ethiopian par Addis Abela avant d’atterrir en Arabie Saoudite, à la Mecque ou Jeddah Emirati passe par Dubaï, Turkish par Istanbul. Par contre Fly Nass et Air Sénégal font moins de kilomètres et d’heures de vol, donc moins de kérosène, parce que ces compagnies font des vols directs. Elles quittent Dakar et atterrissent directement à Médine ou à Jeddah. N’empêche, leur billet est plus cher, soit un million 400 milles Fcfa, contre 900.000 ou un million au maximum pour Turkish et Emirati.
Le Sénégal comparé à d’autres pays
Si on prend le cas de la Côte d’Ivoire, qui a un quota de 10.000 pèlerins, au lieu de privatiser, l’Etat ivoirien a préféré convoyer le plus grand nombre, soient 7.000 pèlerins ivoiriens convoyés par la filière gouvernementale pour 3 millions 250 milles Fcfa. Les 3 milles pèlerins restants sont convoyés par les privés dont le prix ne dépasse pas 5 millions de Fcfa et ils logent leurs pèlerins dans des hôtels 4 ou 5 étoiles proches de la Kaaba. Là où la Côte d’Ivoire convoie le plus grand nombre de pèlerins par la filière gouvernementale, pourquoi le Sénégal n’en ferait-il pas autant, étant donné que le Sénégal est la deuxième puissance économique de la CEDEAO et de l’UEMOA, surtout qu’il est maintenant pays producteur de pétrole et de gaz ?
Comment expliquer que le Sénégal soit le pays le plus cher en matière de hadj quand on sait que pour la filière gouvernementale de la Côte d’Ivoire, les pèlerins paient 3 millions 250 milles Fcfa, au Niger c’est 3 millions 300 milles, au Nigeria 3 millions 800 milles, au Cameroun 2 millions 920 milles, au Tchad 2 millions 820 milles etc. ? Comment justifier cette cherté au Sénégal ? Avec la filière gouvernementale, le pèlerin sénégalais paie 4 millions 300 milles. On dit même que le gouvernement et certains privés logent souvent leurs pèlerins loin de la Kaaba, soient 6 à 7 kilomètres de distance et que, parmi les privés, le plus bas prix est 5 millions 300 milles. Il est temps que le gouvernement du Sénégal fixe un prix plancher aux voyagistes privés parce que beaucoup d’entre eux exigent plus de 5 millions ?
Le monopole du transport aérien
Une autre préoccupation des pèlerins sénégalais, c’est le choix de la compagnie aérienne. On se rend compte que l’ancien gouvernement sortant avait l’habitude d’imposer une compagnie aux pèlerins sénégalais à la place d’un appel d’offre international. Cet appel d’offre permettra à toutes les compagnies régulières de faire une soumission. Et à l’issue du dépouillement, on retient la compagnie la moins chère.
Les pèlerins disent ne pas comprendre pourquoi on leur impose chaque année Air Sénégal et Fly Nass, qui est une compagnie aérienne privée saoudienne, qui n’ont
pas de flotte bien garnie. Le gouvernement sortant a l’habitude d’obliger les privés
travailler avec ces deux compagnies. Elles louent des avions ailleurs, ce qui rend le billet d’avion cher. Par contre, si le marché est octroyé à une compagnie bien garnie, le billet sera moins cher. C’est le cas de Turkish, Ethiopian, Emirati, Saudia Airlines ou Royal Air Maroc. En définitive, Fly Nass et Air Sénégal ne font que du courtage. Ce sont des courtiers, on leur donne le marché du transport aérien gré à gré. Bien que n’ayant pas une flotte, elles vont louer des avions, même jusqu’en Indonésie, pour pouvoir transporter les pèlerins sénégalais. Le gouvernement oblige les privés à travailler avec ces deux compagnies, 50% chacune. Pratique qu’on ne voit pas dans d’autres pays africains.
Chaque année, au lieu de lancer un appel d’offre pour que plusieurs compagnies soumettent afin qu’il y ait une concurrence de prix, le Sénégal a l’habitude de donner le monopole à Air Sénégal et à Fly Nass. Il semble y avoir un paradoxe entre privatisation du hadj et monopole du transport aérien ? Quand on privatise un secteur, nécessairement, on doit faire une politique de libéralisation. Alors, qu’est-ce qui empêche le Sénégal de libéraliser le transport aérien pour qu’il y ait concurrence entre les compagnies d’aviation ? A cela, beaucoup de convoyeurs de pèlerins ont répondu ceci : « Concernant le transport aérien, Air Sénégal ne fait pas l’affaire de certains voyagistes privés qui passent leur temps à discréditer ladite compagnie. A défaut d’Air Sénégal, si Fly Nass fixe le billet à un million 400 milles, les voyagistes privés négocient le billet à 900.000 ou un million avec d’autres compagnies comme Turkish Airlines ou Emirati. Ensuite, ils revendent les billets à leurs pèlerins à un million 200 ou 300 pour avoir un bénéfice. L’honnêteté voudrait qu’ils rendent aux pèlerins la différence. Mais ils ne veulent pas que l’on découvre leur jeu, c’est pourquoi certains privés qui font ce genre de pratique disent qu’on leur impose des compagnies aériennes, alors que c’est faux ».
La complainte des pèlerins
Les pèlerins sénégalais se plaignent aussi de la restauration durant leur séjour à la Mecque, à Médine, à Mouna et à Arafat. Soit, ils ne mangent pas bien, soit ils mangent peu, et souvent tardivement. Les déjeuners sont servis à 17 heures, les diners servis tard dans la nuit, alors qu’ils ont payé cher. Dans la même logique de leur complainte, beaucoup d’entre eux se plaignent de la cherté du package, surtout avec les privés qui ont tendance maintenant à réduire le séjour jusqu’à 20 jours. Les pèlerins paient cher sans avoir assez de temps pour pouvoir faire avec quiétude leurs rites et ziar du hadj.
Lourdes et inutiles dépenses de la délégation générale
Le décret 482-2016 portant création de la délégation générale au pèlerinage et le cahier de charges des voyagistes privés doivent être modifiés pour être en phase avec les réalités du hadj ? En d’autres termes, la composition de ladite délégation
doit être revue. Trois délégués, dont un délégué général et deux adjoints, c’est trop lourd et coûteux pour le contribuable sénégalais. Le délégué général et l’ambassadeur, coordonnateur qui joue le rôle de DAF, ne suffiraient-ils pas ?
L’ancien gouvernement avait l’habitude de pourvoir des quotas de missionnaires à la présidence de la république, à la primature, à quelques ministères et
l’assemblée nationale ? Ces missionnaires, souvent, ne maîtrisent pas le circuit du hadj ou sont des analphabètes en matière de religion. Ils causent de lourdes dépenses à la délégation qui est obligée de leur payer le billet d’avion, le logement
l’hôtel et les perdiems. Pourquoi ne pas prendre des contractuels parmi les Sénégalais vivant en Arabie Saoudite ? Avec cette formule, le budget de la délégation serait allégé. Il est donc urgent de dégonfler le nombre pléthorique du personnel de la délégation générale au pèlerinage ? On voit souvent des missionnaires qui ont fait plusieurs années et qui sont souvent cooptés par les anciens délégués généraux sortants. Aussi, un quota de missionnaires est généralement octroyé aux familles maraboutiques. Il faut ôter à la délégation générale cet aspect politico-religieux, c’est-à-dire dépolitiser ou « déconfrériser » le hadj, surtout quand on sait que certains missionnaires passent tout leur temps à faire du shopping et du fret aérien parce qu’ils font du business pour leur retour à Dakar ?
On parle aussi d’une tricherie à la délégation générale concernant certains membres qui sont gracieusement payés et qui, parallèlement, pilotent secrètement des agences de voyage confiées généralement à leurs parents, enfants, épouses ou époux. En clair, ils créent des GIE avec des prête-noms. Pourquoi la délégation générale ne freinte-t-elle pas cette tricherie ? Aussi, comment expliquer ce nombre pléthorique de missionnaires encadreurs durant les étapes de Dakar et de la Mecque ? On voit même des missionnaires très âgés. Un nombre
restreint pourrait suffire si on sait qu’il y a des étudiants sénégalais dans les universités saoudiennes ou des émigrés qui peuvent faire office d’encadreurs.
Trop d’agences privées
Cette année, 2024, le Sénégal a un quota de 12.860 pèlerins. Mais l’Etat n’a convoyé que 1.860 pèlerins, les 11.000 qui restent ont été convoyés par des voyagistes privés. La tendance doit être inversée pour que le coût du hadj soit supportable. En effet, compte tenu de la cherté des prix que pratiquent les privés, le gouvernement devrait revoir la répartition du quota et donner à la délégation générale le plus grand nombre de pèlerins ? Par exemple 7 milles pour la filière gouvernementale et 5 milles aux privés qui, pour la plupart d’entre eux, logent leurs pèlerins très loin de la Kaba, par exemple à Sara Siteen, donc bien après le pont Sara Mansour, dans des immeubles ou hôtels ordinaires ou même dans de simples maisons. De plus, le nombre d’agences privées, je dirai même GIE, est pléthorique. Et les 80% sont composés de femmes propriétaires de ces agences de voyages. Généralement, ces femmes ne sont pas des arabophones, elles ne maîtrisent pas la langue de travail et la langue du culte musulman. D’ailleurs,
cette année, des observateurs avertis disent qu’il y a une dame voyagiste dont le quota n’atteint même pas 25 pèlerins, mais elle est parvenue à vendre jusqu’à 200 billets. Elle ne peut pas convoyer ce nombre de pèlerins, elle les revend à d’autres voyagistes privés qui les convoient à chers prix. En clair, le package qu’elle demande aux pèlerins, elle le majore pour le vendre à d’autres voyagistes privés. C’est pourquoi nous avons toujours dénoncé le business qui prévaut dans le hadj. Cette pratique doit cesser. Au regard de ces remarques, des acteurs du pèlerinage
la Mecque nous ont rapporté : « Nous avons constaté qu’il y a des privés qui ne respectent pas leurs engagements en termes de transport et de logement avec leurs pèlerins une fois en terre saoudienne. Mais la délégation générale prendra des mesures sévères pour lutter contre ces pratiques. Nous avons également remarqué qu’il existe des voyagistes privés qui ne paient pas comme il se doit certaines taxes saoudiennes, qui ne mettent pas à la disposition de leurs pèlerins des guides et qui, au terme du hadj, n’accompagnent pas leurs pèlerins. Pire, ils rentrent au Sénégal avant eux. A cause de ces manquements, le ministère saoudien du hadj a failli sanctionner l’Etat du Sénégal. Heureusement, la délégation générale a discrètement géré ces manquements que certains privés fautifs veulent mettre sur le dos de la délégation ».
Pour faire baisser le package du pèlerinage à la Mecque, c’est dès maintenant que les voyagistes privés devraient faire des réservations d’hôtel à partir de fonds propres. Cela leur permettrait d’avoir des hôtels proches des lieux saints à bon prix. C’est ce que les convoyeurs des pays de la oummah islamique font. Au lieu de cela, les privés sénégalais attendent tardivement, c’est-à-dire l’ouverture du pèlerinage à la Mecque ici au Sénégal, pour récupérer les versements des pèlerins.
Et c’est avec cet argent qu’ils veulent réserver des hôtels. C’est anormal ! Ce sont des businessmen, ils devraient pouvoir réserver des hôtels tôt avant le hadj par leurs fonds propres.
Cheikh Oumar TALL
Directeur de publication du mensuel « le jour – al yawmou »
vendre plus de 300 billets. Son astuce est qu’elle les inscrit, 5 millions 500 milles par pèlerin, et elle revend ces pèlerins à des privés qui n’ont pas atteint leurs quotas, à hauteur de 5 millions 800 ou 6 millions, de sorte à avoir un bénéfice de 500.000 ou un million par pèlerin. Beaucoup de voyagistes privés sont coutumiers des faits. Voilà des pratiques qui rendent cher le package de la Mecque d’année en année ».
Les deux raisons de la cherté du hadj
La cherté du hadj est due, en grande partie, aux privés parce que beaucoup parmi eux logent leurs pèlerins dans des hôtels 5 étoiles, alors qu’à la Mecque, il y en a pour toutes les bourses. Il y a des maisons très habitables non loin de la Kaaaba, des hôtels une, deux, trois, quatre étoiles etc. Beaucoup de pèlerins asiatiques et africains logent non loin de la Kaba, et pourtant, ils ne sont pas dans des hôtels 5 étoiles. C’est le cas des Nigérians, Ivoiriens, Maliens et Guinéens qui logent à côté de la fameuse et mythique mosquée Ben Laden, donc à quelques mètres de la Kaaba, et ils sont très bien logés. Pourquoi les privés sénégalais veulent à tout prix loger dans des hôtels 5 étoiles, à quelques pas de la Kaaba ? C’est ce qui fait la cherté du hadj. Ne nécessiterait-il pas une sensibilisation à l’attention des privés et des pèlerins sénégalais pour démystifier les hôtels 5 étoiles ?
Nous le répétons, la cherté du package du hadj se situe à deux niveaux. Premièrement, c’est la cherté du billet d’avion. Deuxièmement, les hôtels 5 étoiles que certains voyagistes privés louent. Sur le billet d’avion, il y a un paradoxe que personne ne peut expliquer. Par exemple, les compagnies aériennes qui font des vols réguliers, c’est à dire Emirati Airlines, Tutkish Airlines, Ethiopian Airlines, Royal Air Maroc etc., les billets d’avion de ces compagnies varient entre 900.000 Fcfa et un million Fcfa. Et pourtant, les avions de ces compagnies font plus de kilomètres, plus d’heures de vol et, donc utilisent beaucoup plus de kérosène, que
Air Sénégal et Fly Nass auxquels le gouvernement du Sénégal donne le monopole chaque année. Le trajet qu’effectuent les avions de ces compagnies aériennes de vols réguliers est plus long car ils passent d’abord par leurs pays d’origine. Ethiopian par Addis Abela avant d’atterrir en Arabie Saoudite, à la Mecque ou Jeddah Emirati passe par Dubaï, Turkish par Istanbul. Par contre Fly Nass et Air Sénégal font moins de kilomètres et d’heures de vol, donc moins de kérosène, parce que ces compagnies font des vols directs. Elles quittent Dakar et atterrissent directement à Médine ou à Jeddah. N’empêche, leur billet est plus cher, soit un million 400 milles Fcfa, contre 900.000 ou un million au maximum pour Turkish et Emirati.
Le Sénégal comparé à d’autres pays
Si on prend le cas de la Côte d’Ivoire, qui a un quota de 10.000 pèlerins, au lieu de privatiser, l’Etat ivoirien a préféré convoyer le plus grand nombre, soient 7.000 pèlerins ivoiriens convoyés par la filière gouvernementale pour 3 millions 250 milles Fcfa. Les 3 milles pèlerins restants sont convoyés par les privés dont le prix ne dépasse pas 5 millions de Fcfa et ils logent leurs pèlerins dans des hôtels 4 ou 5 étoiles proches de la Kaaba. Là où la Côte d’Ivoire convoie le plus grand nombre de pèlerins par la filière gouvernementale, pourquoi le Sénégal n’en ferait-il pas autant, étant donné que le Sénégal est la deuxième puissance économique de la CEDEAO et de l’UEMOA, surtout qu’il est maintenant pays producteur de pétrole et de gaz ?
Comment expliquer que le Sénégal soit le pays le plus cher en matière de hadj quand on sait que pour la filière gouvernementale de la Côte d’Ivoire, les pèlerins paient 3 millions 250 milles Fcfa, au Niger c’est 3 millions 300 milles, au Nigeria 3 millions 800 milles, au Cameroun 2 millions 920 milles, au Tchad 2 millions 820 milles etc. ? Comment justifier cette cherté au Sénégal ? Avec la filière gouvernementale, le pèlerin sénégalais paie 4 millions 300 milles. On dit même que le gouvernement et certains privés logent souvent leurs pèlerins loin de la Kaaba, soient 6 à 7 kilomètres de distance et que, parmi les privés, le plus bas prix est 5 millions 300 milles. Il est temps que le gouvernement du Sénégal fixe un prix plancher aux voyagistes privés parce que beaucoup d’entre eux exigent plus de 5 millions ?
Le monopole du transport aérien
Une autre préoccupation des pèlerins sénégalais, c’est le choix de la compagnie aérienne. On se rend compte que l’ancien gouvernement sortant avait l’habitude d’imposer une compagnie aux pèlerins sénégalais à la place d’un appel d’offre international. Cet appel d’offre permettra à toutes les compagnies régulières de faire une soumission. Et à l’issue du dépouillement, on retient la compagnie la moins chère.
Les pèlerins disent ne pas comprendre pourquoi on leur impose chaque année Air Sénégal et Fly Nass, qui est une compagnie aérienne privée saoudienne, qui n’ont
pas de flotte bien garnie. Le gouvernement sortant a l’habitude d’obliger les privés
travailler avec ces deux compagnies. Elles louent des avions ailleurs, ce qui rend le billet d’avion cher. Par contre, si le marché est octroyé à une compagnie bien garnie, le billet sera moins cher. C’est le cas de Turkish, Ethiopian, Emirati, Saudia Airlines ou Royal Air Maroc. En définitive, Fly Nass et Air Sénégal ne font que du courtage. Ce sont des courtiers, on leur donne le marché du transport aérien gré à gré. Bien que n’ayant pas une flotte, elles vont louer des avions, même jusqu’en Indonésie, pour pouvoir transporter les pèlerins sénégalais. Le gouvernement oblige les privés à travailler avec ces deux compagnies, 50% chacune. Pratique qu’on ne voit pas dans d’autres pays africains.
Chaque année, au lieu de lancer un appel d’offre pour que plusieurs compagnies soumettent afin qu’il y ait une concurrence de prix, le Sénégal a l’habitude de donner le monopole à Air Sénégal et à Fly Nass. Il semble y avoir un paradoxe entre privatisation du hadj et monopole du transport aérien ? Quand on privatise un secteur, nécessairement, on doit faire une politique de libéralisation. Alors, qu’est-ce qui empêche le Sénégal de libéraliser le transport aérien pour qu’il y ait concurrence entre les compagnies d’aviation ? A cela, beaucoup de convoyeurs de pèlerins ont répondu ceci : « Concernant le transport aérien, Air Sénégal ne fait pas l’affaire de certains voyagistes privés qui passent leur temps à discréditer ladite compagnie. A défaut d’Air Sénégal, si Fly Nass fixe le billet à un million 400 milles, les voyagistes privés négocient le billet à 900.000 ou un million avec d’autres compagnies comme Turkish Airlines ou Emirati. Ensuite, ils revendent les billets à leurs pèlerins à un million 200 ou 300 pour avoir un bénéfice. L’honnêteté voudrait qu’ils rendent aux pèlerins la différence. Mais ils ne veulent pas que l’on découvre leur jeu, c’est pourquoi certains privés qui font ce genre de pratique disent qu’on leur impose des compagnies aériennes, alors que c’est faux ».
La complainte des pèlerins
Les pèlerins sénégalais se plaignent aussi de la restauration durant leur séjour à la Mecque, à Médine, à Mouna et à Arafat. Soit, ils ne mangent pas bien, soit ils mangent peu, et souvent tardivement. Les déjeuners sont servis à 17 heures, les diners servis tard dans la nuit, alors qu’ils ont payé cher. Dans la même logique de leur complainte, beaucoup d’entre eux se plaignent de la cherté du package, surtout avec les privés qui ont tendance maintenant à réduire le séjour jusqu’à 20 jours. Les pèlerins paient cher sans avoir assez de temps pour pouvoir faire avec quiétude leurs rites et ziar du hadj.
Lourdes et inutiles dépenses de la délégation générale
Le décret 482-2016 portant création de la délégation générale au pèlerinage et le cahier de charges des voyagistes privés doivent être modifiés pour être en phase avec les réalités du hadj ? En d’autres termes, la composition de ladite délégation
doit être revue. Trois délégués, dont un délégué général et deux adjoints, c’est trop lourd et coûteux pour le contribuable sénégalais. Le délégué général et l’ambassadeur, coordonnateur qui joue le rôle de DAF, ne suffiraient-ils pas ?
L’ancien gouvernement avait l’habitude de pourvoir des quotas de missionnaires à la présidence de la république, à la primature, à quelques ministères et
l’assemblée nationale ? Ces missionnaires, souvent, ne maîtrisent pas le circuit du hadj ou sont des analphabètes en matière de religion. Ils causent de lourdes dépenses à la délégation qui est obligée de leur payer le billet d’avion, le logement
l’hôtel et les perdiems. Pourquoi ne pas prendre des contractuels parmi les Sénégalais vivant en Arabie Saoudite ? Avec cette formule, le budget de la délégation serait allégé. Il est donc urgent de dégonfler le nombre pléthorique du personnel de la délégation générale au pèlerinage ? On voit souvent des missionnaires qui ont fait plusieurs années et qui sont souvent cooptés par les anciens délégués généraux sortants. Aussi, un quota de missionnaires est généralement octroyé aux familles maraboutiques. Il faut ôter à la délégation générale cet aspect politico-religieux, c’est-à-dire dépolitiser ou « déconfrériser » le hadj, surtout quand on sait que certains missionnaires passent tout leur temps à faire du shopping et du fret aérien parce qu’ils font du business pour leur retour à Dakar ?
On parle aussi d’une tricherie à la délégation générale concernant certains membres qui sont gracieusement payés et qui, parallèlement, pilotent secrètement des agences de voyage confiées généralement à leurs parents, enfants, épouses ou époux. En clair, ils créent des GIE avec des prête-noms. Pourquoi la délégation générale ne freinte-t-elle pas cette tricherie ? Aussi, comment expliquer ce nombre pléthorique de missionnaires encadreurs durant les étapes de Dakar et de la Mecque ? On voit même des missionnaires très âgés. Un nombre
restreint pourrait suffire si on sait qu’il y a des étudiants sénégalais dans les universités saoudiennes ou des émigrés qui peuvent faire office d’encadreurs.
Trop d’agences privées
Cette année, 2024, le Sénégal a un quota de 12.860 pèlerins. Mais l’Etat n’a convoyé que 1.860 pèlerins, les 11.000 qui restent ont été convoyés par des voyagistes privés. La tendance doit être inversée pour que le coût du hadj soit supportable. En effet, compte tenu de la cherté des prix que pratiquent les privés, le gouvernement devrait revoir la répartition du quota et donner à la délégation générale le plus grand nombre de pèlerins ? Par exemple 7 milles pour la filière gouvernementale et 5 milles aux privés qui, pour la plupart d’entre eux, logent leurs pèlerins très loin de la Kaba, par exemple à Sara Siteen, donc bien après le pont Sara Mansour, dans des immeubles ou hôtels ordinaires ou même dans de simples maisons. De plus, le nombre d’agences privées, je dirai même GIE, est pléthorique. Et les 80% sont composés de femmes propriétaires de ces agences de voyages. Généralement, ces femmes ne sont pas des arabophones, elles ne maîtrisent pas la langue de travail et la langue du culte musulman. D’ailleurs,
cette année, des observateurs avertis disent qu’il y a une dame voyagiste dont le quota n’atteint même pas 25 pèlerins, mais elle est parvenue à vendre jusqu’à 200 billets. Elle ne peut pas convoyer ce nombre de pèlerins, elle les revend à d’autres voyagistes privés qui les convoient à chers prix. En clair, le package qu’elle demande aux pèlerins, elle le majore pour le vendre à d’autres voyagistes privés. C’est pourquoi nous avons toujours dénoncé le business qui prévaut dans le hadj. Cette pratique doit cesser. Au regard de ces remarques, des acteurs du pèlerinage
la Mecque nous ont rapporté : « Nous avons constaté qu’il y a des privés qui ne respectent pas leurs engagements en termes de transport et de logement avec leurs pèlerins une fois en terre saoudienne. Mais la délégation générale prendra des mesures sévères pour lutter contre ces pratiques. Nous avons également remarqué qu’il existe des voyagistes privés qui ne paient pas comme il se doit certaines taxes saoudiennes, qui ne mettent pas à la disposition de leurs pèlerins des guides et qui, au terme du hadj, n’accompagnent pas leurs pèlerins. Pire, ils rentrent au Sénégal avant eux. A cause de ces manquements, le ministère saoudien du hadj a failli sanctionner l’Etat du Sénégal. Heureusement, la délégation générale a discrètement géré ces manquements que certains privés fautifs veulent mettre sur le dos de la délégation ».
Pour faire baisser le package du pèlerinage à la Mecque, c’est dès maintenant que les voyagistes privés devraient faire des réservations d’hôtel à partir de fonds propres. Cela leur permettrait d’avoir des hôtels proches des lieux saints à bon prix. C’est ce que les convoyeurs des pays de la oummah islamique font. Au lieu de cela, les privés sénégalais attendent tardivement, c’est-à-dire l’ouverture du pèlerinage à la Mecque ici au Sénégal, pour récupérer les versements des pèlerins.
Et c’est avec cet argent qu’ils veulent réserver des hôtels. C’est anormal ! Ce sont des businessmen, ils devraient pouvoir réserver des hôtels tôt avant le hadj par leurs fonds propres.
Cheikh Oumar TALL
Directeur de publication du mensuel « le jour – al yawmou »