Randonnée à 'Jaxaay', site de victimes d'inondations

Rédigé par Dakarposte le Mardi 22 Aout 2017 à 18:32 modifié le Mardi 22 Aout 2017 18:33

Malgré ses soixante ans, Amy Guèye garde encore frais dans sa mémoire les péripéties qui l’ont amenée avec sa famille au quartier Jaxaay (aigle en wolof), lieu de relogement des habitants de plusieurs quartiers de la banlieue dakaroise victimes d’inondations en 2005. Pareille décision avait été prise par l’ex-président Abdoulaye Wade qui, pour réunir les 52 milliards de FCFA nécessaires à la réalisation du projet, avait pris sur lui de décaler les élections législatives, au grand dam de l’opposition.

Douze ans après, Amy Guèye semble bien à l’aise dans sa maison à Jaxaay I, troquée de force à cause de la pluie contre son premier habitat situé à Pikine, la grande banlieue dakaroise. « A Pikine, ressasse la sexagénaire tout de blanc vêtue, on vivait paisiblement. Il y avait souvent des inondations, mais il n y avait jamais eu une telle catastrophe comme celle de 2005. Elle avait tout détruit, la quiétude, la vie sociale… bref tout’’.

A en croire Amy Guèye, elle avait presque tout à portée de main : le marché, le centre de santé, l’école où ses enfants allaient apprendre, de même que les ateliers de soudure et de menuiserie pour les potaches rejetés par l’école. Quand la pluie a envahi plusieurs maisons de son quartier ainsi que la sienne, elle est partie se réfugier en catastrophe dans les abris provisoires mis à la disposition des sinistrés par l’Etat.

‘’Nous y sommes restés plusieurs mois (…). Les abris provisoires avaient aussi une limite. Les tentes à un moment donné ne tenaient plus sous les effets des intempéries. Ma famille et moi nous étions logés dans des tentes militaires installées dans une école à Yembeul. Il était difficile de dormir, car il y avait des fuites d’eau un peu partout et il fallait mettre des récipients pour recueillir l’eau’’, raconte Amy Guèye qui, sur un ton fataliste, souligne quelle était obligée de rester pour endurer toutes ces difficultés car n’ayant pas où aller. 

Le calvaire de Amy prend fin quelques mois après avec l’attribution des logements de Jaxaay, le nouveau site de relogement des victimes des inondations ouvert à 25 kilomètres du centre-ville de Dakar. En ce lundi 13 août 2017, le quartier porte certes des stigmates de l’hivernage avec quelques flaques d’eau à l’entrée mais on est loin des images de déluge qui ont chassé ses habitants de leurs premières demeures. 

Ici, les rues qu’on devine sablonneuses malgré les récentes pluies bordent les maisons qui s’alignent les unes après les autres, offrant une belle harmonie qui n’a rien à voir avec l’habitat spontané et anarchique des quartiers populaires de la banlieue.

Bâties sur une superficie de 150 mètres carrés, les maisons sont entourées de murettes dont la peinture est défraichie ici et là par les intempéries. 

Pour construire les 3000 maisons envisagées dans le cadre du plan ‘’Jayaay 1’’, l’Etat avait prévu une enveloppe de 52 milliards de FCFA. Vu que chaque maison lui a coûté 18 millions de FCFA, il a été demandé à chaque attributaire une contribution de 4 millions de FCFA. Cette contribution est étalée sur une durée de 20 ans, au bout de laquelle l’attributaire devient propriétaire de sa maison.

A en croire, le chef de quartier Samba Ndiaye, 90 % des victimes des inondations de 2005 sont aujourd’hui relogés à Jaxaay 1. Le reste des recensés vivent dans l’espoir de voir les nouvelles autorités s’occuper de leur cas comme avait promis de le faire l’ex-président la République Abdoulaye Wade, peu après l’attribution des premières maisons.

« Chacun (des attributaires) est libre de modifier sa maison, selon ses moyens ou de la revendre sans aucune contrainte. Certains ont déjà revendu leur maison », confie le chef de quartier qui fait partie des premiers habitants du site.

Si à ’’ Jaxaay’’ peu de maisons ont subi des modifications, il reste que quelques unes sont encore inoccupées. La faute peut-être au défaut de certaines structures à caractère social comme un centre de santé, l’éclairage public malgré l’installation de lampadaires et un système de canalisation.

On est loin du spectre des inondations de 2005, mais il urge, selon Amy Guèye et sa voisine Haby Fall, de penser à faire évacuer les eaux de pluie dont l’accumulation explique les quelques flaques observées ici et là.

Autre problème préoccupant pour les femmes : l’absence d’un marché digne de ce nom. Pour y pallier, des habitantes tiennent devant leur maison de petits commerces de légumes pris d’assaut chaque matin par leurs voisines.

« Ce sont ces problèmes qui nous préoccupent, sinon ça va dans l’ensemble », soutiennent Amy et Haby, heureuses de n’avoir plus les pieds dans l’eau. Partant de ne plus passer le temps à prier pour que le ciel n’ouvre pas trop ses vannes durant l’hivernage.
 

Auteur: Apanews - Apanews

Cheikh Amidou Kane
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