Le procres en appel de l'ancien homme fort de Ndjamena, Hissène Habré, s'ouvre ce lundi 9 janvier 2016 à la salle 4 du tribunal Lat Dior de Dakar, devant la chambre criminelle d'assises d'appel.
Déclaré coupable des crimes contre l’humanité, crime de tortures, crime de guerre, viol, Habré, qui a dirigé le Tchad d'une main de fer entre 1982 et 1990, a été condamné, en première instance, à la prison à perpétuité.
De la gloire à la déchéance
Hissène Habré, né en 1942 à Faya-Largeau (Nord du Tchad), est le troisième président de la République du Tchad. Membre du mouvement rebelle du Frolinat dans les années 1970, il a été brièvement Premier ministre puis chef des Forces armées du Nord (Fan). Le 7 juin 1982, il renverse le président Goukouni Oueddeï. Après huit années passées au pouvoir, il est renversé à son tour par Idriss Déby. C’était le 1er décembre 1990.
La même année, Hissène Habré débarque au Sénégal avec sa famille. Le président Abdou Diouf lui accorde l’asile politique.
En 2000, à la faveur de la première alternance au Sénégal, Abdou Diouf cède son fauteuil au président Abdoulaye Wade. Sept (7) victimes profitent de cette aubaine et déposent une plainte contre Habré. Le Doyen des juges de l’époque, Demba Kandji, instruit le dossier, fait arrêter Habré. L’ancien président tchadien est emprisonné pendant un moment à Dakar avant que la Cour suprême, estimant que les juridictions sénégalaises ne sont pas compétentes pour le juger, ne le libère.
Entre 2005 et 2010, Wade tente de l’extrader vers la Belgique. Mais, ce n’est qu’après la deuxième alternance, avec l’accession de Macky Sall à la magistrature suprême, que l’affaire Habré s’emballe.
Début des déboires judiciaires
En effet, en 19 février 2009, la Belgique avait introduit une demande devant la Cour internationale de justice contre le Sénégal pour obtenir le jugement ou l’extradition vers la Belgique de Hissène Habré. La juridiction accède à la requête de la Belgique et somme le Sénégal de juger l’ancien président ou de l’extrader en Belgique.
Le 24 juillet 2012, l’Union africaine donne mandat au Sénégal de juger l’ex-homme fort du Tchad. Le 22 août 2012, des chambres africaines extraordinaires (Cae) sont érigées au sein des juridictions sénégalaises pour juger Hissène Habré.
Arrestation et inculpation
Hissène Habré est arrêté le dimanche 30 juin 2013 sur instruction du Procureur général près les chambres africaines, Mbacké Fall. Il a été cueilli à son domicile dakarois par des éléments de la Brigade d’intervention polyvalente (Bip) de la police.
Le mardi 2 juillet 2013, soit, 48 heures après son arrestation, il est inculpé pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de tortures puis placé sous mandat de dépôt au pavillon spécial de l’administration pénitentiaire sis à l’hôpital Aristide Le Dantec avant d’être transféré à la prison du Cap Manuel.
La cage dorée d’un président
Le 4 novembre 2013, Hissène Habré est transféré dans sa résidence carcérale construite sur une aile de la prison du Cap Manuel. Une résidence construite à 130 millions qui répond aux normes internationales. Outre sa chambre spacieuse équipée d’un grand lit, d’un climatiseur, d’une télé avec un abonnement Canal Horizons et d’une table de travail, le logement carcéral est doté d’un salon, d’un compartiment pour les Éléments pénitentiaires d’intervention (Épi, le corps d’élite de l’administration pénitentiaire), qui assurent sa garde et d’une cour gazonnée où il effectue ses promenades journalières.
Un ancien juge du Tribunal pénal international pour le Rwanda choisi pour le juger
Le 6 avril 2015, le magistrat burkinabé, Gberdao Gustave Kam, ancien juge au Tribunal pénal international pour le Rwanda (Tpir), est nommé Président de la Chambre africaine extraordinaire d’Assises. À la tête d’une équipe de magistrats, le président Kam, avec ses assesseurs, est chargé de juger Habré.
Le 3 juin 2015, l’ancien président tchadien, Hissène Habré est présenté à l’audience d’identification. Son procès débute le 20 juillet 2015.
Le procès est suivi à travers le monde. C’est la première fois, en effet, qu’un ancien chef d’État Africain est jugé par des juridictions d’un pays étranger, dans le continent noir. Profitant de la présence des médias du monde, Habré fait son show. « Ces chambres que j’appelle moi “Comité administratif extraordinaire » sont illégitimes et illégales. Ceux qui y siègent ne sont pas des juges, mais de simples fonctionnaires au service d’une mission commandée, donc politique. J’ai été kidnappé et depuis, détenu. Par conséquent, je ne vais répondre à aucune demande du Comité administratif extraordinaire dont les activités sont illégitimes et illégales », a-t-il déclaré devant les juges de la CAE.
La perpétuité requise contre Habré
Après une suspension de 45 jours, le procès reprend le 7 septembre 2015. Non seulement Habré ne compte pas répondre aux questions des juges, mais aussi refuse de comparaître à la barre de l’audience de la Chambre africaine extraordinaire (Cae). Ce qui oblige le procureur général Mbacké Fall à ordonner aux agents de l’administration pénitentiaire de conduire Habré de force. Ses proches, présents dans la salle, haussent le ton et dénoncent un « traitement inhumain ».
Le 15 décembre 2015, six mois après l’ouverture du procès, l’audition des 90 témoins est bouclée. Les réquisitoires et plaidoiries débutent le lundi 8 février 2016.
Le 10 février 2016, Mbacké Fall, le procureur général près la Chambre africaine extraordinaire (Cae) d’assises, se dit convaincu de la culpabilité de l’ex-chef d’État tchadien. Il requiert l’emprisonnement de Habré à perpétuité et la saisie de tous ses biens.
Le 11 février 2016, les trois avocats commis d’office pour défendre Hissène Habré finissent leur plaidoirie, soutenant qu’il n’y a aucun fait matériel qui peut être imputé à l’ancien Président tchadien. Il était chef d’État et ne descendait pas sur le terrain. Par conséquent, on ne peut pas lui reprocher d’avoir organisé des assassinats de masse.
Mais la chambre africaine extraordinaire d’assises n’est pas de cet avis. Elle déclare Hisséne Habré coupable et le condamne à perpétuité. Non content de la décision, ses avocats interjettent appel.
L'homme, âgé de 75 ans aujourd'hui, est rejugé à partir de ce lundi. Reste à savoir si la juridiction d'appel va confirmer ou infirmer la première sentence.
Auteur: Seneweb
Déclaré coupable des crimes contre l’humanité, crime de tortures, crime de guerre, viol, Habré, qui a dirigé le Tchad d'une main de fer entre 1982 et 1990, a été condamné, en première instance, à la prison à perpétuité.
De la gloire à la déchéance
Hissène Habré, né en 1942 à Faya-Largeau (Nord du Tchad), est le troisième président de la République du Tchad. Membre du mouvement rebelle du Frolinat dans les années 1970, il a été brièvement Premier ministre puis chef des Forces armées du Nord (Fan). Le 7 juin 1982, il renverse le président Goukouni Oueddeï. Après huit années passées au pouvoir, il est renversé à son tour par Idriss Déby. C’était le 1er décembre 1990.
La même année, Hissène Habré débarque au Sénégal avec sa famille. Le président Abdou Diouf lui accorde l’asile politique.
En 2000, à la faveur de la première alternance au Sénégal, Abdou Diouf cède son fauteuil au président Abdoulaye Wade. Sept (7) victimes profitent de cette aubaine et déposent une plainte contre Habré. Le Doyen des juges de l’époque, Demba Kandji, instruit le dossier, fait arrêter Habré. L’ancien président tchadien est emprisonné pendant un moment à Dakar avant que la Cour suprême, estimant que les juridictions sénégalaises ne sont pas compétentes pour le juger, ne le libère.
Entre 2005 et 2010, Wade tente de l’extrader vers la Belgique. Mais, ce n’est qu’après la deuxième alternance, avec l’accession de Macky Sall à la magistrature suprême, que l’affaire Habré s’emballe.
Début des déboires judiciaires
En effet, en 19 février 2009, la Belgique avait introduit une demande devant la Cour internationale de justice contre le Sénégal pour obtenir le jugement ou l’extradition vers la Belgique de Hissène Habré. La juridiction accède à la requête de la Belgique et somme le Sénégal de juger l’ancien président ou de l’extrader en Belgique.
Le 24 juillet 2012, l’Union africaine donne mandat au Sénégal de juger l’ex-homme fort du Tchad. Le 22 août 2012, des chambres africaines extraordinaires (Cae) sont érigées au sein des juridictions sénégalaises pour juger Hissène Habré.
Arrestation et inculpation
Hissène Habré est arrêté le dimanche 30 juin 2013 sur instruction du Procureur général près les chambres africaines, Mbacké Fall. Il a été cueilli à son domicile dakarois par des éléments de la Brigade d’intervention polyvalente (Bip) de la police.
Le mardi 2 juillet 2013, soit, 48 heures après son arrestation, il est inculpé pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de tortures puis placé sous mandat de dépôt au pavillon spécial de l’administration pénitentiaire sis à l’hôpital Aristide Le Dantec avant d’être transféré à la prison du Cap Manuel.
La cage dorée d’un président
Le 4 novembre 2013, Hissène Habré est transféré dans sa résidence carcérale construite sur une aile de la prison du Cap Manuel. Une résidence construite à 130 millions qui répond aux normes internationales. Outre sa chambre spacieuse équipée d’un grand lit, d’un climatiseur, d’une télé avec un abonnement Canal Horizons et d’une table de travail, le logement carcéral est doté d’un salon, d’un compartiment pour les Éléments pénitentiaires d’intervention (Épi, le corps d’élite de l’administration pénitentiaire), qui assurent sa garde et d’une cour gazonnée où il effectue ses promenades journalières.
Un ancien juge du Tribunal pénal international pour le Rwanda choisi pour le juger
Le 6 avril 2015, le magistrat burkinabé, Gberdao Gustave Kam, ancien juge au Tribunal pénal international pour le Rwanda (Tpir), est nommé Président de la Chambre africaine extraordinaire d’Assises. À la tête d’une équipe de magistrats, le président Kam, avec ses assesseurs, est chargé de juger Habré.
Le 3 juin 2015, l’ancien président tchadien, Hissène Habré est présenté à l’audience d’identification. Son procès débute le 20 juillet 2015.
Le procès est suivi à travers le monde. C’est la première fois, en effet, qu’un ancien chef d’État Africain est jugé par des juridictions d’un pays étranger, dans le continent noir. Profitant de la présence des médias du monde, Habré fait son show. « Ces chambres que j’appelle moi “Comité administratif extraordinaire » sont illégitimes et illégales. Ceux qui y siègent ne sont pas des juges, mais de simples fonctionnaires au service d’une mission commandée, donc politique. J’ai été kidnappé et depuis, détenu. Par conséquent, je ne vais répondre à aucune demande du Comité administratif extraordinaire dont les activités sont illégitimes et illégales », a-t-il déclaré devant les juges de la CAE.
La perpétuité requise contre Habré
Après une suspension de 45 jours, le procès reprend le 7 septembre 2015. Non seulement Habré ne compte pas répondre aux questions des juges, mais aussi refuse de comparaître à la barre de l’audience de la Chambre africaine extraordinaire (Cae). Ce qui oblige le procureur général Mbacké Fall à ordonner aux agents de l’administration pénitentiaire de conduire Habré de force. Ses proches, présents dans la salle, haussent le ton et dénoncent un « traitement inhumain ».
Le 15 décembre 2015, six mois après l’ouverture du procès, l’audition des 90 témoins est bouclée. Les réquisitoires et plaidoiries débutent le lundi 8 février 2016.
Le 10 février 2016, Mbacké Fall, le procureur général près la Chambre africaine extraordinaire (Cae) d’assises, se dit convaincu de la culpabilité de l’ex-chef d’État tchadien. Il requiert l’emprisonnement de Habré à perpétuité et la saisie de tous ses biens.
Le 11 février 2016, les trois avocats commis d’office pour défendre Hissène Habré finissent leur plaidoirie, soutenant qu’il n’y a aucun fait matériel qui peut être imputé à l’ancien Président tchadien. Il était chef d’État et ne descendait pas sur le terrain. Par conséquent, on ne peut pas lui reprocher d’avoir organisé des assassinats de masse.
Mais la chambre africaine extraordinaire d’assises n’est pas de cet avis. Elle déclare Hisséne Habré coupable et le condamne à perpétuité. Non content de la décision, ses avocats interjettent appel.
L'homme, âgé de 75 ans aujourd'hui, est rejugé à partir de ce lundi. Reste à savoir si la juridiction d'appel va confirmer ou infirmer la première sentence.
Auteur: Seneweb