Très joviale, Sokhna Thiaw Laye, née Ya Fatou Laye, est la fille de l’actuel khalife des Layènes, Serigne Abdoulaye Thiaw Laye. Affichant toujours un large sourire, la jeune dame s’occupe des activités de la maison et du khalife. «Je gère la maison ainsi que les visites et audiences du khalife depuis que ma maman, Sokhna Badiène Laly Thiaw, est décédée», note-t-elle. Celle par qui il faut impérativement passer pour accéder au khalife étreint juste ses trente ans. Fière du rôle qu’elle joue auprès de son papa, elle affirme sur un air taquin : «Sans passer par la fille, on n’accède pas au père. Il faut absolument passer par Sokhna Thiaw Laye.» Cette femme calme et discrète n’en possède pas moins une riche carrière politique qui fait d’elle une actrice respectée. Après le bac, Sokhna Thiaw Laye a en effet travaillé à la Sonatel puis taquiné la politique jusqu’en 2007, date à laquelle la Layène est partie en France. «Pour y poursuivre mes études», renseigne-t-elle. De retour depuis 3 ans, l’ancienne compagnon de parti de Oumy Khaïry Guèye Seck, son amie, soutient ne plus faire de la politique. «Je me dois d’être impartiale comme je suis près du khalife qui représente toute la communauté layène», mentionne-t-elle. Même si certains hommes politiques sollicitent son soutien, la fille du khalife dit rester ferme dans ses convictions. Pourtant, elle n’est pas seulement versée dans l’entretien du khalife et de la maison, elle s’adonne en outre à d’autres activités. «Je gère une société de Btp et je suis également dans la couture», souligne-t-elle. Même si elle reconnaît que «ce n’est pas facile». Autre chose, SokhnaThiaw continue de militer pour les femmes et de s’engager dans le social comme le faisait Badiène Laly Sokhna, sa défunte maman.
D’ailleurs à Yoff, l’on prépare activement un évènement important, un an après le décès de cette femme du khalife qui a toujours œuvré dans le social. Ce sera le 19 avril prochain. «Ma mère, de son vivant, tenait trop à son mari machallah ! Elle avait l’habitude de lui rendre hommage chaque année, un mois avant l’Appel. Elle l’appelait avant-première de l’Appel. Mais c’était plus pour rendre hommage à son mari. D’ailleurs, elle est décédée l’année dernière, 8 jours avant cet évènement qui rassemble la communauté layène. C’est pourquoi ce 19 avril, nous allons perpétuer sa mémoire en organisant cet hommage», explique l’air radieuse Sokhna Thiaw Laye. Et lorsqu’on cherche à savoir les motivations profondes qui soutiennent cette volonté de perpétuer le legs de sa défunte mère, elle répond avec force et conviction : «Ma mère aimait bien soutenir les gens, mais également magnifier l’œuvre de son mari. Je me dois aujourd’hui de suivre ses pas.» Comme d’habitude, la cérémonie prévue samedi prochain à la résidence du khalife permettra encore une fois de parler de la vie du khalife des Layènes et de son parcours. Il est prévu des prières, des dons de sang, une consultation médicale… dans la matinée, avant la soirée d’hommage. L’évènement coïncide également avec le premier anniversaire de décès de la défunte épouse du khalife. Et l’on ne manquera pas de se souvenir de ses œuvres. Sa fille évoque sa mémoire avec beaucoup d’admiration : «Ma mère, ça lui tenait à cœur d’aider les femmes et les enfants. Elle n’aimait pas voir une femme sans activité. Elle a toujours pris son argent pour aider les femmes à travailler. C’est l’héritage qu’elle m’a laissé.»
Une dame engagée dans le social…
Comme les temps sont durs pour les femmes du Sénégal, Sokhna Thiaw Laye se voue au social. «Cela se fait dans toutes les communautés religieuses», soutient-elle modestement. L’association qu’elle dirige regroupe de jeunes femmes. Encadrées par elle-même, ces femmes sont à la recherche de financements pour travailler. L’association, informe-t-elle, «compte déjà plusieurs cellules dans les régions du Sénégal et porte le nom de Wagnu Badiène Laly». Etant le seul héritage qu’elle tient de sa maman, Sokhna Thiaw Laye compte le perpétuer. «Ça lui tenait à cœur», explique-t-elle avec émotion.Tout comme sa mère, son père s’est aussi beaucoup voué aux besoins de la communauté layène. A son propos, SokhnaThiaw Laye dit : «Lorsqu’on parle de Benno siggil islam, c’est lui. Il a implanté la communauté layène partout dans le monde et a tissé de bonnes relations avec les autres confréries religieuses du Sénégal. Aussi, les populations de Guédiawaye qui l’apprécient à sa juste valeur lui ont dédié une rue portant son nom.» Mais qu’a fait concrètement Serigne Abdoulaye Thiaw Laye pour mériter cet honneur ? «Quand on parle de la communauté layène, c’est Serigne Abdoulaye. Il a eu à tisser toutes les relations que la communauté layène a avec les autres communautés. Dans sa maison, vous retrouvez tout : les Mbacké, les Sy… Il a eu à donner le nom des autres confréries à ses enfants. Quand on dit le Benno siggil Senegaal, on peut dire que c’est lui qui a instauré le Benno siggil islam», répond avec assurance et conviction SokhnaThiaw, bras droit du khalife et fervente talibé.
…Et le combat pour sa communauté
Ya Fatou Laye qui se bat pour les femmes porte aussi dans le cœur de fortes espérances pour sa communauté. Aussi lance-t-elle un message à l’endroit du Président Macky Sall. «J’aimerais que le Président prenne en charge la communauté layène dans le cadre du projet de modernisation des cités religieuses. Mon plus gros souhait, c’est de voir encore de grandes œuvres réalisées lors du magistère de mon papa», avoue SokhnaThiaw Laye. L’Etat du Sénégal, qui jadis entretenait de bonnes relations avec la communauté des Layènes, semble aujourd’hui délaisser la confrérie de Yoff et Cambérène. C’est du moins ce que pensent certains talibés layènes.«Nous voyons tout ce qu’elles font dans les autres cités religieuses… Les autorités ne passent ici qu’une fois par an. Dans la période de l’Appel. Ce n’est pas normal. Pour ce qui est de la modernisation des cités religieuses, il n’y a toujours rien chez les Layènes», dénoncent quelques habitants de la cité religieuse qui disent ne pas comprendre que Macky Sall ait fait l’ouverture de sa campagne et la clôture à Yoff, qu’il y ait fait aussi en tant que nouveau Président du Sénégal sa première prière du vendredi, et qu’aujourd’hui ce soit Yoff qui soit reléguée au dernier plan. «Khalifa Sall, maire de Dakar, se soucie du sort des Layènes. Il a réalisé un mausolée à Camberène et fait beaucoup de choses sans jamais vouloir qu’on en parle publiquement. Nous sentons que l’Etat ne prend pas bien en charge notre communauté qui pourtant a porté Macky Sall au pouvoir», se désolent quelques membres de la confrérie. Outre Khalifa Sall, l’on fait référence également à l’actuel maire de Yoff, Abdoulaye Diouf Sarr. «Il fait partie de la famille de Serigne Abdoulaye Thiaw Laye. S’il avait accepté de rester à nos côtés, il serait aujourd’hui le leader de Dakar», confie un fervent talibé, qui ne manque pas de préciser que Abdoulaye Diouf Sarr, que toute la communauté avait soutenu au point qu’il a pu remporter sa commune aux dernières élections, l’a enfin compris. «Il a commencé à véritablement poser de bons jalons», disent les jeunes de la cité de Yoff qui espèrent également le voir persévérer en ce sens et surtout le voir rehausser par des actions concrètes la localité de Yoff.
De son côté, SokhnaThiaw, engagée de plain-pied dans les préparatifs de la 135ème édition de l’Appel de Seydina Limamou Laye, invite la communauté musulmane à nourrir la paix dans leurs cœurs. «L’Appel est prévu pour ce mois de mai. Il est placé sous le signe de la paix. Je les appelle alors à la paix. Le khalife y tient sérieusement», dit-elle refusant d’évoquer toute polémique autour des relations entre le gouvernement et la confrérie layène. Toutefois, consent-elle à poser sa plus grande doléance en direction des autorités : «J’aimerais bien que sous le magistère de mon papa, que l’on réalise de grands travaux. Je veux que son œuvre reste à jamais dans les esprits. J’ai lancé un appel à tout le monde en ce sens. Pour le moment, je n’ai que des promesses verbales. Mais nous gardons espoir…», confie la voix de Yoff.