Le fashion month 2019 : glamour et pollution
Comme tous les ans, la Paris Fashion Week de 2019 sera une semaine de défilés, de stars et de paillettes. Elle va clore un fashion month bien occupé, qui aura baladé l’industrie de la mode de New York à Milan, en passant par Londres.
La fashion week, c’est aussi le point culminant d’une industrie qui est de plus en plus critiquée pour son impact environnemental. Même si, ces derniers mois, la mode se cherche. Peu à peu, peut-être encore trop lentement, elle commence à s’éveiller et prend conscience qu’elle est la deuxième industrie la plus polluante de la planète.
Car les chiffres sont éloquents… et scandaleux. Depuis le champ où son coton a été produit jusqu’à votre armoire, votre jean préféré parcourt 65 000 kilomètres : c’est 1,5 fois le tour de la Terre. Avant de venir compléter votre garde-robe, il nécessite aussi 7 000 litres d’eau – et c’est seulement pour sa fabrication, sans compter donc les nombreux cycles de lavage qui viendront étoffer sa brève existence.
À l’heure de la fast fashion, il n’est pas rare qu’une nouvelle collection sorte toutes les semaines. Chaque année, cela représente 2 milliards de jeans produits, achetés, brièvement portés, rapidement jetés, rarement recyclés. Autant de coton planté, récolté, transporté, teint – car 40% de nos vêtements sont fabriqués à partir de coton, la culture la plus polluante du monde.
Les défilés de la fashion week de Paris n’échappent pas à ce cercle anti-écologie. Avant d’être présenté en défilé, un simple sac est reconfectionné une dizaine de fois. A l’heure actuelle, il est impossible de chiffrer la pollution engendrée par un événement de mode comme la fashion week. Personne ne s’est vraiment penché sur la question, mais imaginez : les déplacements de stars en provenance des quatre coins du monde, les décors exubérants, les spots, les vêtements… S’ils existaient, les chiffres seraient assurément vertigineux.
Derrière le glamour, un défilé de mode, c’est quinze minutes que l’on prépare des mois auparavant. C’est une montagne de papier, de bouteilles d’eau, de déplacements en avion, train et voiture, de fleurs jetées, de plantes abandonnées. Il est possible de mesurer la production de CO2 engendrée par un événement sportif – alors pourquoi pas de la fashion week ? La réponse est toute simple : jusqu’ici, personne ne s’était posé la question.
Fashion pollution… fashion revolution ?
Cette année, le fashion month n’a cependant pas été sans perturbation. La mode essuie de vives critiques ces derniers temps, et les défilés en ont payé le prix. Tout a commencé avec la fashion week de Stockholm, qui aurait dû se tenir à la fin du mois d’août. Prévue du 27 au 29 août, la fashion week suédoise a finalement été annulée.
C’est le Swedish Fashion Council, le Conseil suédois de la mode, qui a pris cette décision abrupte. En cause ? Le modèle économique et la pollution de l’industrie de la mode. Contrairement à Paris ou Londres, Stockholm entend mettre la mode face à ses responsabilités et à son impact écologique.
responsabilité écologique mode
Jennie Rosén, PDG du Swedish Fashion Council, a ainsi déclaré qu’il fallait « façonner respectueusement le monde de demain ». Elle a notamment expliqué qu’il était nécessaire de « favoriser la création d’outils amenant à une plus grande responsabilité écologique » pour repenser l’industrie contemporaine de la mode.
L’agitation n’en est pas restée là. Si Stockholm ne fait pas partie des pays qu’on appelle les « big four » – les quatre grandes villes de la mode, à savoir New York, Londres, Milan et Paris -, celles-là aussi ont dû composer avec la fashion revolution. A Londres, les activistes d’Extinction Rebellion ont ainsi perturbé l’événement en protestant contre la fast fashion et l’industrie de la mode.
Le changement climatique n’a probablement jamais eu autant de visibilité qu’à l’heure actuelle. Et la mode, elle, n’a jamais été totalement apolitique. Il n’est donc pas si surprenant de voir se heurter les deux mondes, qui se sont finalement rencontrés à Londres, en plein contexte de Brexit.
Extinction Rebellion (XR) a manifesté à plusieurs reprises, notamment en renversant du faux sang sur les trottoirs de The Strand vendredi 13. Des activistes se sont aussi couverts de liquide noir pour dénoncer l’usage du cuir dans la mode. Bref, XR a gagné sa place parmi les moments qui ont le plus marqué la fashion week londonienne cette année.
Plus tôt dans l’année, la mode avait déjà été marquée par des remous. Dans le cadre du G7, qui s’est tenu à Biarritz au mois d’août, une trentaine d’acteurs de la mode ont signé un « Fashion pact » en faveur de l’environnement. Ils se sont engagés à lutter sur trois volets : le climat, la biodiversité et les océans.
Le but ? Enrayer la production du 1,2 milliard de tonnes de CO2 qu’émet la mode chaque année. Concrètement, voici quelques idées de ce pacte :
100% d’énergies renouvelables dans les chaînes d’approvisionnement d’ici 2030
Zéro émission en 2050
Zéro plastique à usage unique d’ici 2030
Zéro approvisionnement auprès des élevages intensifs
Si l’action semble louable, le Fashion Pact a déjà été dénoncé par les ONG. Ces dernières y voient avant tout un coup de communication politique à l’heure où les préoccupations écologiques montent en grade dans les considérations des gens – et donc des acheteurs.
Comment la fashion week peut-elle survivre ?
Alors, la fashion week est-elle condamnée ? Dans sa forme actuelle, il est peu vraisemblable qu’elle soit encore viable. Le modèle économique de la mode doit changer, et vite. À l’heure actuelle, elle représente un impact environnemental sidérant qui pourrait augmenter de 60% d’ici 2030 si rien ne change. Et face aux enjeux écologiques de notre temps, ce n’est tout simplement pas tolérable.
Critiques mises à part, si le Fashion Pact montre bien une chose, c’est que la mode elle-même commence à s’en rendre compte. Elle est tombée dans un cycle d’hyper-consommation : 100 milliards de vêtements sont vendus chaque année, un chiffre qui a doublé entre 2000 et 2014. Et pour faire survivre la mode – et la fashion week -, c’est par ici qu’il faut commencer.
Déjà, des initiatives ont commencé à apparaître. Outre l’annulation pure et simple de la fashion week de Stockholm, on peut citer celle d’Helsinki. En 2019, la fashion week finlandaise a elle aussi remis en cause le modèle habituel en axant son programme autour du développement durable.
Les défilés se sont ainsi vus totalement privés de cuir, banni cette année. Les fashion designers ont donc exploré de nouvelles matières, plus écologiques. Plusieurs d’entre eux, comme Patrick McDowell ou le label australien ABCH, se sont attachés à utiliser des matériaux recyclés ou biodégradables.
À Algarve, au Portugal, il existe une Green Fashion Week, dont la neuvième édition se tiendra du 28 octobre au 4 novembre 2019. En février dernier s’est tenue la première fashion week végane à Los Angeles. Adieu cuir, laine et fourrure ! Mais pour Emmanuelle Rienda, la fondatrice de la Vegan Fashion Week, c’est bien plus que ça : « Il ne s’agit pas seulement d’être vegan ou non. Il s’agit de ce que vous faites maintenant, de comment nous pouvons évoluer tous ensemble ».
Pour cela, la Vegan Fashion Week propose des sacs biodégradables, des gobelets eco-friendly et une application pour réduire l’utilisation de papier durant les défilés. Et Emmanuelle Riendra d’ajouter : « Ce n’est plus une question de style. C’est une question de choix ».
En avril, enfin, s’est tenue la Fashion Revolution Week, à l’initiative du collectif Fashion Revolution. Une succession d’événements à travers le monde qui doivent nous inviter à repenser la mode et son impact. Et les grandes marques tentent d’en prendre de la graine.
Après avoir fait scandale en 2018 pour avoir brûlé pour 31 millions d’euros d’invendus l’année précédente, Burberry a fait amende honorable en renonçant à cette pratique au profit du don et du recyclage, ainsi qu’en faisant ses adieux à la fourrure. Gucci a annoncé un défilé milanais neutre en carbone, comme la créatrice Gabriela Hearst à New York.
En 2019, les consommateurs commencent à se poser des questions. Produire, porter et jeter n’est certainement pas l’avenir de la mode. Pour reprendre les mots d’Evelyn Mora, fondatrice de la fashion week d’Helsinki, « la mode, ce n’est pas seulement des vêtements. C’est aussi ce que vous défendez ». Et il est temps de trouver ce que nous voulons qu’elle défende.
fournisseur-energie.com
Comme tous les ans, la Paris Fashion Week de 2019 sera une semaine de défilés, de stars et de paillettes. Elle va clore un fashion month bien occupé, qui aura baladé l’industrie de la mode de New York à Milan, en passant par Londres.
La fashion week, c’est aussi le point culminant d’une industrie qui est de plus en plus critiquée pour son impact environnemental. Même si, ces derniers mois, la mode se cherche. Peu à peu, peut-être encore trop lentement, elle commence à s’éveiller et prend conscience qu’elle est la deuxième industrie la plus polluante de la planète.
Car les chiffres sont éloquents… et scandaleux. Depuis le champ où son coton a été produit jusqu’à votre armoire, votre jean préféré parcourt 65 000 kilomètres : c’est 1,5 fois le tour de la Terre. Avant de venir compléter votre garde-robe, il nécessite aussi 7 000 litres d’eau – et c’est seulement pour sa fabrication, sans compter donc les nombreux cycles de lavage qui viendront étoffer sa brève existence.
À l’heure de la fast fashion, il n’est pas rare qu’une nouvelle collection sorte toutes les semaines. Chaque année, cela représente 2 milliards de jeans produits, achetés, brièvement portés, rapidement jetés, rarement recyclés. Autant de coton planté, récolté, transporté, teint – car 40% de nos vêtements sont fabriqués à partir de coton, la culture la plus polluante du monde.
Les défilés de la fashion week de Paris n’échappent pas à ce cercle anti-écologie. Avant d’être présenté en défilé, un simple sac est reconfectionné une dizaine de fois. A l’heure actuelle, il est impossible de chiffrer la pollution engendrée par un événement de mode comme la fashion week. Personne ne s’est vraiment penché sur la question, mais imaginez : les déplacements de stars en provenance des quatre coins du monde, les décors exubérants, les spots, les vêtements… S’ils existaient, les chiffres seraient assurément vertigineux.
Derrière le glamour, un défilé de mode, c’est quinze minutes que l’on prépare des mois auparavant. C’est une montagne de papier, de bouteilles d’eau, de déplacements en avion, train et voiture, de fleurs jetées, de plantes abandonnées. Il est possible de mesurer la production de CO2 engendrée par un événement sportif – alors pourquoi pas de la fashion week ? La réponse est toute simple : jusqu’ici, personne ne s’était posé la question.
Fashion pollution… fashion revolution ?
Cette année, le fashion month n’a cependant pas été sans perturbation. La mode essuie de vives critiques ces derniers temps, et les défilés en ont payé le prix. Tout a commencé avec la fashion week de Stockholm, qui aurait dû se tenir à la fin du mois d’août. Prévue du 27 au 29 août, la fashion week suédoise a finalement été annulée.
C’est le Swedish Fashion Council, le Conseil suédois de la mode, qui a pris cette décision abrupte. En cause ? Le modèle économique et la pollution de l’industrie de la mode. Contrairement à Paris ou Londres, Stockholm entend mettre la mode face à ses responsabilités et à son impact écologique.
responsabilité écologique mode
Jennie Rosén, PDG du Swedish Fashion Council, a ainsi déclaré qu’il fallait « façonner respectueusement le monde de demain ». Elle a notamment expliqué qu’il était nécessaire de « favoriser la création d’outils amenant à une plus grande responsabilité écologique » pour repenser l’industrie contemporaine de la mode.
L’agitation n’en est pas restée là. Si Stockholm ne fait pas partie des pays qu’on appelle les « big four » – les quatre grandes villes de la mode, à savoir New York, Londres, Milan et Paris -, celles-là aussi ont dû composer avec la fashion revolution. A Londres, les activistes d’Extinction Rebellion ont ainsi perturbé l’événement en protestant contre la fast fashion et l’industrie de la mode.
Le changement climatique n’a probablement jamais eu autant de visibilité qu’à l’heure actuelle. Et la mode, elle, n’a jamais été totalement apolitique. Il n’est donc pas si surprenant de voir se heurter les deux mondes, qui se sont finalement rencontrés à Londres, en plein contexte de Brexit.
Extinction Rebellion (XR) a manifesté à plusieurs reprises, notamment en renversant du faux sang sur les trottoirs de The Strand vendredi 13. Des activistes se sont aussi couverts de liquide noir pour dénoncer l’usage du cuir dans la mode. Bref, XR a gagné sa place parmi les moments qui ont le plus marqué la fashion week londonienne cette année.
Plus tôt dans l’année, la mode avait déjà été marquée par des remous. Dans le cadre du G7, qui s’est tenu à Biarritz au mois d’août, une trentaine d’acteurs de la mode ont signé un « Fashion pact » en faveur de l’environnement. Ils se sont engagés à lutter sur trois volets : le climat, la biodiversité et les océans.
Le but ? Enrayer la production du 1,2 milliard de tonnes de CO2 qu’émet la mode chaque année. Concrètement, voici quelques idées de ce pacte :
100% d’énergies renouvelables dans les chaînes d’approvisionnement d’ici 2030
Zéro émission en 2050
Zéro plastique à usage unique d’ici 2030
Zéro approvisionnement auprès des élevages intensifs
Si l’action semble louable, le Fashion Pact a déjà été dénoncé par les ONG. Ces dernières y voient avant tout un coup de communication politique à l’heure où les préoccupations écologiques montent en grade dans les considérations des gens – et donc des acheteurs.
Comment la fashion week peut-elle survivre ?
Alors, la fashion week est-elle condamnée ? Dans sa forme actuelle, il est peu vraisemblable qu’elle soit encore viable. Le modèle économique de la mode doit changer, et vite. À l’heure actuelle, elle représente un impact environnemental sidérant qui pourrait augmenter de 60% d’ici 2030 si rien ne change. Et face aux enjeux écologiques de notre temps, ce n’est tout simplement pas tolérable.
Critiques mises à part, si le Fashion Pact montre bien une chose, c’est que la mode elle-même commence à s’en rendre compte. Elle est tombée dans un cycle d’hyper-consommation : 100 milliards de vêtements sont vendus chaque année, un chiffre qui a doublé entre 2000 et 2014. Et pour faire survivre la mode – et la fashion week -, c’est par ici qu’il faut commencer.
Déjà, des initiatives ont commencé à apparaître. Outre l’annulation pure et simple de la fashion week de Stockholm, on peut citer celle d’Helsinki. En 2019, la fashion week finlandaise a elle aussi remis en cause le modèle habituel en axant son programme autour du développement durable.
Les défilés se sont ainsi vus totalement privés de cuir, banni cette année. Les fashion designers ont donc exploré de nouvelles matières, plus écologiques. Plusieurs d’entre eux, comme Patrick McDowell ou le label australien ABCH, se sont attachés à utiliser des matériaux recyclés ou biodégradables.
À Algarve, au Portugal, il existe une Green Fashion Week, dont la neuvième édition se tiendra du 28 octobre au 4 novembre 2019. En février dernier s’est tenue la première fashion week végane à Los Angeles. Adieu cuir, laine et fourrure ! Mais pour Emmanuelle Rienda, la fondatrice de la Vegan Fashion Week, c’est bien plus que ça : « Il ne s’agit pas seulement d’être vegan ou non. Il s’agit de ce que vous faites maintenant, de comment nous pouvons évoluer tous ensemble ».
Pour cela, la Vegan Fashion Week propose des sacs biodégradables, des gobelets eco-friendly et une application pour réduire l’utilisation de papier durant les défilés. Et Emmanuelle Riendra d’ajouter : « Ce n’est plus une question de style. C’est une question de choix ».
En avril, enfin, s’est tenue la Fashion Revolution Week, à l’initiative du collectif Fashion Revolution. Une succession d’événements à travers le monde qui doivent nous inviter à repenser la mode et son impact. Et les grandes marques tentent d’en prendre de la graine.
Après avoir fait scandale en 2018 pour avoir brûlé pour 31 millions d’euros d’invendus l’année précédente, Burberry a fait amende honorable en renonçant à cette pratique au profit du don et du recyclage, ainsi qu’en faisant ses adieux à la fourrure. Gucci a annoncé un défilé milanais neutre en carbone, comme la créatrice Gabriela Hearst à New York.
En 2019, les consommateurs commencent à se poser des questions. Produire, porter et jeter n’est certainement pas l’avenir de la mode. Pour reprendre les mots d’Evelyn Mora, fondatrice de la fashion week d’Helsinki, « la mode, ce n’est pas seulement des vêtements. C’est aussi ce que vous défendez ». Et il est temps de trouver ce que nous voulons qu’elle défende.
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