GENESE DU PROJET
Le projet était, au départ, une volonté de l’ex président de la république, Me Wade, de pourvoir, aux populations de Touba, de l’eau potable. Dans le document que le plaignant nous a fait parvenir, il est mentionné que tout a démarré en 2010 au moment où la société « BSL Water Solution SA » est venue au Sénégal sur invitation du président Abdoulaye Wade. « L’objectif de cette invitation, est qu’on avait beaucoup de projet pour le Sénégal », explique Amary Gueye responsable de ladite Société au Sénégal. Les uns étaient destinés à la capitale, Dakar, qui, selon lui, devait abriter une usine de dessalement. « Mais le projet le plus important était la purification des forages de Touba », a-t-il tenu à préciser. Ce projet, soutient monsieur Gueye, intéressait au plus haut niveau le président Wade « parce qu’il entrait dans le cadre de son programme de modernisation des villes religieuses ». Avec le projet « Touba ville moderne » il voulait d’emblée régler le problème de l’eau et de l’assainissement de la capitale du mouridisme. Et il a confié ce projet à la société américaine BSL Water Solution SA. Toujours à en croire les explications de Mr Gueye, dès leur arrivée, sur place, les responsables de la société ont pris langue avec les autorités de Touba, notamment avec le khalife général des mourides, Serigne Sidy Mactar Mbacké, et les services hydrauliques de la ville. « On leur avait fait des propositions. Et on était très avancé sur ces propositions », nous a-t-il confié. A l’époque, poursuit-il, « on avait trouvé 19 forages à Touba et on avait fait des prélèvements dans chacun des 19 forages ». Ces prélèvements sur l’eau, révèle-t-il, ont été envoyés à l’institut Pasteur. Toujours selon le plaignant, lors de son audience avec le président Wade, il a attiré son attention sur les résultats de cette étude et les dangers que cette eau, qui est loin de répondre aux normes de l’OMS, représentaient pour les populations de Touba. Car, explique-t-il dans le document, « le taux de fluor et de calcium est trop élevé et par conséquent l’eau est impropre à la consommation(…) » « Mais ces propositions n’ont, malheureusement, pas abouti. Et le projet tomba à l’eau », se désole Mr Gueye. Mais parallèlement, précise-t-on dans le document, le président Wade avait acheté deux unités d’Osmose d’une capacité, chacune de 200 m3/heure, qu’il voulait installer à Touba dans deux sites différents pour, au moins, démarrer la purification de l’eau de Touba et permettre à la population d’accéder gratuitement à de l’eau potable. Il a été précisé, également dans le document que c’est le gouvernement, qui a acheté les unités, qui devait les installer à sa charge. Et selon Mr Gueye, la seule charge supplémentaire devrait être l’électricité devant faire marcher les usines. Et, déclare-t-il, « le gouvernement était prêt à endosser les frais d’électricité ».
Cette eau était, donc, destinée gratuitement à la population. En attendant de régler définitivement le problème de l’eau de Touba, on ne devait pas vendre cette eau. C’est ainsi qu’est né le projet entre la société BSL Water Solution du Sénégal sise en Californie et représenté par Amary Gueye, Directeur des opérations en Afrique ; et l’Etat du Sénégal, par le ministère de l’Hydraulique représenté par le Directeur de l’Hydraulique et de la Maintenance de l’époque Mr Babou Sarr. Le document en notre possession indique que le marché a été conclu le 26 novembre 2010 et avait pour objet exclusif la fourniture et l’installation à Touba d’une unité de purification de l’eau d’une capacité de 2400 m3/Jour pour un montant de 643 millions. « Nous avons fourni les équipements en mars 2011, assuré leur transport à Touba » affirme Mr Gueye dans le document. Mais, relève-t-il, il fallait attendre les instructions de la Direction de l’Exploitation et de la Maintenance pour procéder à l’installation et à la mise en route. Les populations devaient ensuite venir puiser gratuitement de l’eau dans trois forages que le khalife avait lui-même choisis. « Entre temps un tiraillement sur le choix du lieu d’implantation est intervenu entre Cheikh Aliou Mbacke et le directeur de l’exploitation Babou Sarr ». Ce dernier, précise le document, « avait avancé des arguments techniques s’opposant à l’implantation des unités au forage de l’université Baye Lahad, situé au quartierMadyana». Mais c’était sans compter avec la détermination de Cheikh Aliou Mbacké, président de « Mahu Rahmati ».
CHEIKH ALIOU, RESPONSABLE DE LA PENURIE D’EAU DES TROIS DERNIERES ANNEES A TOUBA MADYANA.
Le document indique que Mr Babou Sarr, qui est ingénieur de l’hydraulique, avait soutenu qu’implanter le forage à Madiyana équivaudrait à priver les populations de Madyana, Dianatoul Mahwa et environs, d’eau en quantité. « Mais Cheikh Aliou s’est entêté », souligne-ton dans le document. Selon toujours le document, le président de Mahu Rahmati était de conivence avec un fils du khalife, Cheikh Bara Maty Leye, qui a, par ailleurs, appelé Mr Gueye, pour lui dire d’implanter le matériel en suivant les instructions de Cheikh Aliou Mbacke président de Mahu Rahmati, responsable de la gestion de l’eau à Touba. Ce qui signifie, selon Mr Gueye, que ces gens ont remis en cause le Ndiguel du khalife général des Mourides, en implantant contre toutes les normes techniques le matériel de BSL Water Solutions SA sans qu’on soit informé(…).
L’explication fournie par le Directeur des Opérations de la société BSL Water Solution SA est d’autant plus valable. Car selon Mr Sarr, la capacité de ses machines est égale au débit du forage. « Si les machines fonctionnent, le forage sera incapable de fournir de l’eau à la population », avait-t-il déclaré. Ce qui a, par conséquent, expliqué les pénuries d’eau récurrentes, ces trois dernières années, de certains quartiers dépendant directement du forage de l’Université Baye Lahad. Donc le président de Mahu Rahmati est responsable directe des pénuries d’eau notées pendant et après le magal dans ces quartiers. « On l’impute à l’état, mais c’est le fait d’une seule personne qui se trouve être Cheikh Aliou Mbacke », note Mr Gueye. Il faut que les populations de Touba le sachent. Ce n’est ni, un manque de volonté politique de l’état, encore moins, la faute à la mairie de Touba, mais c’est uniquement du fait de l’installation de ces deux unités d’Osmose dans ce forage que Cheikh Aliou Mbacké exploite au grand dam de la population qui en payent les pots cassés(...) « Pire les machines qui devraient être installé sur trois sites différents sont concentrés dans un seul lieu par le chef religieux », mentionne le document. Donc techniquement, Babou Sarr avait raison de dire que l’installation de ces unités sur ce site est quasiment impossible. Entre temps l’alternance est survenue, Me Wade a quitté le pouvoir. « Comme les unités étaient déjà sur place, Cheikh Aliou et ses complices ont pris la lourde responsabilité de prendre nos machines à notre insu pour les installer au niveau du forage Université Baye Lahad(…), s’indigne le responsable de BSL Water Solution SA.
LES PREUVES DU DETOURNEMENT SONT DISPONIBLES
« Un jour Babou Sarr m’a appelé par téléphone pour m’informer de l’installation des unités par Cheikh Aliou Mbacké », a indiqué Amary Gueye dans le document. Et il dit détenir les preuves de ce qu’il a appelé « vol », parce qu’une grande fête a été organisée par Cheikh Aliou lui-même sur le lieu avec comme invité Serigne Mountakha Mbacke Bassirou, en présence de Serigne Bassirou Mbacke Abdou Khadre qui avait représenté le khalife général, ainsi que le ministère de l’Hydraulique, dirigé à l’époque par Omar Gueye. Mieux, durant toute la cérémonie Serigne Cheikh Aliou Mbacke n’a aucunement mentionné la provenance de ses unités. « Et je pense que si le khalife savait que l’eau douce qu’il vend aux populations, à raison de 10 000 FCFA le m3, est acquise de illicitement, il allait ordonner l’arrêt immédiat de l’exploitation », a confié Mr Gueye.
En somme voilà un projet détourné de son objectif. Il faut préciser que l’état du Sénégal a payé à hauteur de 90%. Il reste à recouvrer les 10% restant. Et, pour ce faire, Mr Gueye affirme qu’il est allé, dans un premier temps, voir Babou Sarr qui lui a, dit-il, opposé un niet catégorique, en lui notifiant que le payer, c’est cautionner ce que fait actuellement Cheikh Aliou Mbacke. Ce qui selon lui, est contraire aux normes. A noter que les 10% devraient être payés après réception et selon Mr Gueye sa société n’a jamais installé, encore moins réceptionné, les unités qu’on avait juste positionnées là-bas. Le nouveau régime (celui de Macky Sall) ne sachant pas les tenants et les aboutissants nous a clairement signifié à la société BSL WATER Solution SA, qu’il n’entend pas la payer. Depuis 2 ans on court derrière cet argent. « J’ai déposé une plainte contre le président de Mahu Rahmati, au parquet de Diourbel, depuis le 14 juillet 2015, sous le numéro 2109 », informe Mr Gueye. Avant d’ajouter qu’il a saisi, la veille, l’Agent Judiciaire de l’Etat par lettre parce que « c’est un projet que l’état nous avez confié en tant qu’entreprise ». Il a, ensuite déclaré qu’il s’est constitué partie civile et demande après qu'il soit établi que Cheikh Aliou Mbacke n'avait aucune autorité à s'approprier ces machines. « En attendant nous demandons l'arrêt immédiat de l'exploitation de l’eau. Réclamons, également, l'état des lieux des équipements, leur restitution et, enfin l'audit sur la commercialisation de l'eau provenant de ces unités. Nous comptons demander la réparation du préjudice causé que nous estimons à 2 milliards de francs. La capacité de l'unité qu'il a mise en route étant de 1200m3 par jour, l'exploitation ayant duré jusqu'ici plus de deux années, considérant que le m3 est vendu à 10000frs, nous estimons sans erreur aucune que le Sieur Aliou Mbacke et ses complices ont récolté au bas mot une somme de 8 milliards. Ce qui constitue pour nous un enrichissement illicite sur le dos de la ville de Touba et au détriment de l’entreprise BSL Water », a tenu à préciser Amary Gueye, directeur des opérations de la société BSL Water.
Toutefois, toutes nos tentatives de joindre, au téléphone, heikh Aliou Mbacké, président de Mahu Rahmati, pour recueillir sa version des faits, ont été vaines. Nos colonnes lui sont encore grandement ouvertes, pour s’expliquer.