Le duo Pape et Cheikh a donné, ce week-end, encore un aperçu de son immense talent. Dans le somptueux cadre du Just 4 U, ils ont livré une prestation des plus abouties, dans leur style si particulier qui mêle acoustique et mbalax. Ils ont servi un véritable cocktail de sonorités. Après un show de plus de 3h, dans une atmosphère soft, ils se sont confiés à EnQuête.
Cela fait un temps qu’on peine à vous rencontrer. Sur quoi étiez-vous ?
On est là. On ne fait que jouer. Certes, nous ne sommes pas toujours là à Dakar, mais l’on fonctionne un peu partout, pour des prestations. Souvent à Saly, à d’autres endroits ou simplement quand nous devons assurer des soirées ailleurs où des désireux nous contactent. Sinon, on est bien présent.
Est-ce à dire qu’aujourd’hui les prestations constituent la meilleure méthode pour s’en sortir ?
C’est en tout cas ce qu’il faut pour prouver son existence : beaucoup jouer. Car les Cd ne marchent plus comme avant. C’est facile de chercher des musiciens et d’aller au studio et faire un morceau. Mais ce qui montre qu’on est un musicien, c’est d’avoir un groupe qui fonctionne. C’est le plus difficile. En ce qui nous concerne, Dieu merci nous avons eu la chance d’avoir un groupe avec qui nous travaillons, depuis 5-6 ans.
Justement, peut-on dire que faire de la musique au Sénégal est une bonne affaire ?
Nous sommes des passionnés de la musique. Donc que ça marche réellement ou pas, on considère que ça marche. Car, il faut le dire, il arrive des fois où on ne s’en sort pas. Aussi, le musicien est appelé à consoler son public. Donc, malgré les problèmes que nous rencontrons au quotidien, on ne peut qu’essayer de les mettre de côté ou aux oubliettes, en attendant de satisfaire notre public. L’essentiel pour nous est que nous pratiquons un métier que nous aimons. Que ça rapporte ou pas, on continuera à le faire. Pour nous, la richesse est le public et Dieu nous a accordé un public merveilleux. De ce côté, on ne se plaint pas. Nous rendons grâce à Dieu.
Si vous aviez à tirer la sonnette d’alarme, que dénonceriez-vous exactement dans la musique sénégalaise ?
‘’Féppày metti’’. Rien ne marche dans tous les secteurs. On ne peut même pas savoir par où commencer. Récemment, j’ai rencontré un vendeur de cd piratés qui m’a dit : ‘’Grand, faites vite de sortir un nouvel album, parce que ça marche.’’ C’est vraiment regrettable. Une chose qui me travaille la tête depuis. Et j’en déduis que la piraterie est encore là et dans la rue, sans qu’aucune mesure idoine soit prise. Si les vendeurs de Cd piratés sont là et qu’on ne fait toujours rien contre eux, c’est dire qu’on ignore même sur quoi nous sommes en vérité. Pendant ce temps, une personne qui achète un timbre falsifié se voit à l’instant entre les mains de la justice.
Autre chose, l’on, ne voit également pas un label de production à vos côtés. En quoi cela constitue-t-il un avantage ou un inconvénient ?
Nous on a opté pour la liberté. On travaille seuls, parce que c’est dans ce cas qu’on trouve tout le temps qu’il faut. C’est donc mieux pour nous. Il n’y a pas de contraintes. A chaque fois qu’on sent une chose, on se déplace et on enregistre. En outre, nous ne jouons point pour l’été ou pour les fêtes. Nous misons sur une musique qui aura une certaine durée de vie. C’est cela à vrai dire notre objectif, ou j’allais dire, notre façon de voir les choses.
A quand alors le prochain album ?
Si rien ne change, l’album sera baptisé le 3 décembre 2015, avec à peu près 11 titres. On a beaucoup joué et il n’y a pas de secret, parce que nos morceaux, nous les jouons avec un public qui réfléchit sur les textes. Donc, ça ne sera pas forcément du nouveau pour ceux qui ont l’habitude de nous suivre, mais aussi le monde ne se limite pas aux soirées que nous donnons, d’où l’intérêt de le faire. C’est comme exactement cela s’est passé avec ‘’Esprit live 1’’ (l’album précédent). Donc sans doute, il va se nommer ‘’Esprit live 2’’. Le nom de l’album n’est pas actuellement retenu, mais y a de fortes chances qu’on le baptise ainsi. Y aura des reprises, mais également pas mal de nouveautés travaillées avec un esprit nouveau.
Allez-vous cette année encore vous produire au Grand Théâtre?
Oui. Nous comptons remettre ça, parce qu’il y aura une promotion à la sortie de l’album. Donc, dans ce cadre, normalement, on le fera. Cependant, on n’a pas encore fixé de date. Comme j’ai coutume de le dire, ce n’est pas un anniversaire, mais un spectacle avec un thème bien précis autour duquel tout le groupe et le staff travailleront. Car, quand on produit, c’est pour les amis. Nous avons des amis et non des fans.
Quelques mots sur la disparition du grand artiste Moussa Ngom ?
Comme, je l’ai dit bien avant le décès du rappeur Pacotille, quand on envisageait de faire un mémorial, je suis contre. Il faut qu’on arrête d’attendre que de grandes personnes disparaissent pour leur rendre hommage. Moi, comme disait Doudou Ndiaye Rose, je ne veux pas aussi d’un mémorial. A qui le pourra, je préfère un ‘’Xuluwa ou une Fatiha’’. Un musicien de renom du nom de Pape Mboup nous a quittés récemment. Mais j’ai eu mal lorsque, malgré tout le bonheur qu’il nous a donné, le jour de son décès, il n’y avait personne à part notre voiture derrière le corbillard. Maintenant, comment une personne qui ne peut pas accompagner un mort jusqu’à sa dernière demeure peut prétendre faire des hommages. Pour Moussa, nous prions pour le repos de son âme, c’est une grande figure qui s’en est allée à jamais.
Et pour le drame à La Mecque ?
L’analyse que je peux faire de ce drame est très simple. Il faut l’aborder en ce sens que certains musulmans voulaient y aller et, soit n’ont pas eu les moyens, soit ont été contraints à des problèmes de papiers. Sur ce sens, on peut dire que c’est la volonté divine. Tout musulman prie pour rester à La Mecque, mais je pense aussi que d’autres mesures doivent être prises pour une meilleure organisation. Ceux aussi qui ont acheté leur billet et qui n’ont pas pu voyager, même s’ils ont échappé à ce drame, c’est toujours un problème d’organisation. C’est comme si quelqu’un achetait un billet et n’arrivait pas à accéder à la salle de spectacle. Encore que les frais de préparation pour le voyage à La Mecque sont exorbitants. Tout est inclus dans les failles de l’organisation.
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