Ousmane Sonko est à n’en pas douter un homme de convictions. Il se bat pour ses idées, et ne s’embarrasse pas des conséquences fâcheuses. C’est à la limite, un téméraire. Son parcours, du lycée, où il était meneur de grèves, à l’université et aux Impôts, où, il s’est battu pour mettre en place un syndicat, le prouve à suffisance. C’est clair, c’est un combattant doté d’un courage certain car, étant toujours à la tête de ses troupes, pas, derrière. En tant que chef, il va au charbon. Mais, si jusque - là, il a pu s’en sortir, c’est parce que ses champs de batailles avaient des règles fixes, alors que le champ politique demande d’autres formes de combat. Sonko n’est pas un politicien, cela se voit à l’œil nu. La politique, c’est une affaire de stratégies, de ruses, de caches d’armes (politiques), de fausses offensives, de leurres et de coups bas. C’est un champ de confrontations qui demandent autant de l’honnêteté, que du réalisme opportuniste et surtout, des compromis douteux ou à caractère stratégique. Comme le dit si bien Nicolas Machiavel « En politique le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal ». Cela veut dire quoi ? Que la politique n’est pas l’affaire des idéalistes. Si la politique a besoin des idéalistes, c’est juste, à une étape. Après, ils sont largués en chemin, le réalisme-politique faisant rapidement le tri. En créant un parti politique, Sonko se lance dans la conquête du Pouvoir. Ce Pouvoir est entre les mains de personnes qui, avant lui, ont mené des combats féroces pour s’en emparer. Il faudra faire plus que ce qu’ils ont fait pour le leur prendre. Le Pouvoir étant une somme d’Autorités aussi bien politiques, qu’administratives, judiciaires et autres entre les mains d’un individu, surtout, sous nos cieux. Une concentration énorme de pouvoirs de décisions entre les mains d’un homme ou d’un système au pouvoir. Il faut beaucoup de courage certes pour s’attaquer à cette forteresse, mais, cela ne suffit pas. Il faut autre chose que seule, un long apprentissage politicien peut donner. On ne devient pas politicien, on l’apprend. Et c’est là, où la naïveté politique de Sonko se fait jour. Il a donné à ses ennemis les armes pour le détruire. A visage découvert, brandissant les seules armes qu’il détient ; il est monté à l’assaut sans avoir au préalable connaître celles de ses adversaires, et n’a pas mesuré à juste valeur, la détermination de ceux-ci. Il a confondu la légitimité de son combat et sa Légalité. Ou en pleine conscience, s’est jeté dans la gueule du loup. Si, aux yeux du peuple, ce que fait Sonko, est bon, cela légitime son combat. Mais, au niveau de la Loi, il est dans la faute. Et, c’est cette faute qui sera exploitée et légalement punie par l’Autorité politico-administrative, au moment où le peuple applaudit sa légitimité. Mais, il faut rappeler que la Légitimité n’a jamais vaincu la Légalité. Tout simplement parce qu’elle est en marge de la République, de la Loi. Maintenant, la stratégie de la victimisation peut fonctionner, mais, il faut tout un travail, un immense travail en aval pour le fructifier. Ce travail est politique, et Sonko n’est pas un politicien. Un seul exemple me suffit pour l’étayer. Quand il a refusé de répondre au coup de fil de Karim Wade. Tous les politiciens de ce pays attendent un coup de fil de Karim Wade, car, tous savent qu’il a un capital électoral non négligeable que tout politicien rêverait de pouvoir jeter dans son escarcelle. Macky Sall, en premier. Refuser de parler à Karim Wade en ces heures de coalitions tous azimuts, est une erreur politique que seul un mauvais politicien peut faire. Car, ne l’oublions pas, c’est une coalition de l’essentiel des forces politiques fortes de ce pays qui est aux commandes. Quiconque pense qu’il peut déraciner seul ce pouvoir, se trompe lourdement. Et comme je le disais plus haut, comme dans toutes les guerres, l’issue peut parfois dépendre de la conjonction de forces totalement opposées, que rien ne semblait pouvoir réunir avant le conflit. En attendant que les intérêts brisent les nœuds de toutes les alliances. C’est ça la politique, la capacité d’abandonner ses convictions en partie, de muer, pour avancer. La politique, c’est comme dans le cyclisme, des adversaires s’allient selon qu’on est en tête de peloton ou parmi les poursuivants. Des adversaires deviennent par stratégie des co-équipiers pour maintenir leur avance ou la réduire. La politique, c’est la loi des improbables possibles. Mais, cela n’est pas nouveau, il faut des Sonko. Des idéalistes qui se sacrifient ou qu’on sacrifie. Ils sont des pièces essentielles qui remplissent leurs rôles, mais, s’usent vite dans la longue marche qui mène au sommet. Les politiciens professionnels le savent, c’est pourquoi, tout en sachant les contours des combats de Sonko, ils applaudissent, sachant que celui-là leur balise la voie, occupe le champ qu’ils sont dans l’incapacité temporaire d’animer. Disons que pour eux, Sonko chauffe le public. Quand on voit le public politicien de Sonko, cette composition de transhumants professionnels, de frustrés du régime actuels et d’éconduits et de chercheurs de voix qui le défendent, on est largement renseigné sur la valeur de leur sincérité. Ils surfent juste sur la vague Sonko, tout en attendant et scrutant la grosse vague qui les projettera sur la berge. Et hop, par ici la bonne soupe. Si j’étais Sonko, je ferai dans le contre-pouvoir, pas dans sa conquête. Il n’a pas les moyens immoraux du politicien et le cynisme politique qui y mènent. A moins qu’il ne se renie complètement.
Ousmane Sonko. Entre Légalité et Légitimité !!!
Cheikh Amidou Kane
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