C’est donc à Paris que « Manko Wattu Sénégal » a déplacé le combat politique le temps d’une visite d’Etat du Président Macky Sall en France. Mais à six mois des prochaines législatives, à qui profite réellement le rapport de forces ?
En tout cas, on a d’un côté un président de la République qui les préparer activement et méthodiquement, conscient qu’il s’agit là d’une étape cruciale pour s’offrir un second mandat en 2019. Lui sait ce qu’il veut, où il va et trace astucieusement sa voie pour y parvenir. L’opposition, de son côté, peine à trouver la sienne. Elle n’est ni sur le bon sillage ni sur le bon tempo. La coalition « Manko Wattu Sénégal » se laisse plutôt imposer son propre rythme.
Comme dans une guerre froide, elle ne fait que réagir aux signaux émis par l’adversaire. Elle était dans une posture radicale jusqu’à ce que Macky n’accorde subitement sa grâce à Karim Wade, ramollissant du coup la position de sa principale composante : le Pds. Puis, il embraya avec son appel au dialogue national et brisa l’élan unitaire de ses adversaires partagés entre pro et anti pourparlers.
Une fois ses « concertations» lancées en grandes pompes, le 28 mai dernier, Macky reprend alors la main et redevient le seul maître du jeu. Soufflant le chaud et le froid, il ne tarde pas à renouer avec l’adversité, défiant à nouveau ses opposants sur le ton de la moquerie. « Méfiez-vous du lion qui dort », leur balance-t-il à la figure en marge du Conseil des ministres délocalisé dans la banlieue, un mois à peine après les avoir conviés au dialogue.
Il n’en fallait pas plus pour que reprennent les hostilités sur fond de polémique autour de la gestion des ressources pétrolières et gazeuses, de la présence d’Abdoulaye Daouda Diallo au ministère de l’Intérieur et du processus électoral. Et ce, après les désaccords constatés lors des travaux sur la revue du code électoral entre majorité et opposition autour du ministre de l’Intérieur.
Les choses iront par la suite de mal en pis jusqu’à la marche réprimée de « Manko Wattu Sénégal ». La crise est alors à son paroxysme. Et il a fallu que Macky, qui prend visiblement un malin plaisir à manier la carotte et le bâton, décide une nouvelle fois de baisser la température. Il s’est vu en effet offrir l’opportunité de renouer le dialogue avec la correspondance que lui ont adressée les leaders de l’opposition pour exprimer leurs inquiétudes sur le processus électoral. Et, naturellement, il la saisit pour décrisper la situation.
Plutôt que de réagir par voie épistolaire, il a préféré convier « Manko Wattu Sénégal » à une rencontre, semant par la même occasion la zizanie en son sein. Certains de ses membres seront en effet opposés à l’envoi d’une délégation au Palais. Et dès qu’ils l’ont fait connaître publiquement, ils se sont fait exclure tout bonnement. La coalition de l’opposition verra en outre un nouveau regroupement, « Sam lignou bokk », naître de ses flancs.
Bref, Macky est passé maître dans l’art de tourner en bourriques ses adversaires qu’il en arrive facilement à les faire déjouer. Pour preuve, plutôt que de mettre la pression sur son gouvernement à propos de la refonte du fichier électoral - assurément la priorité de l’heure -, l’opposition se laisse distraire par la question des libertés publiques et la gestion des ressources pétrolières et gazières. Des questions certes importantes, mais que l’opposition gagnerait à reléguer pour l’instant au second plan pour se concentrer sur le processus électoral et sa stratégie d’alliance à tout juste six mois des prochaines législatives.
N’est-ce pas là la priorité s’il est vrai, comme le soupçonne d’ailleurs « Manko Wattu Sénégal », que l’actuelle majorité a fait un forcing sur la refonte totale du fichier uniquement pour se donner les moyens de gagner en amont les prochaines élections.
Or, c’est plutôt en ordre dispersé que les composantes de « Manko Wattu Sénégal » gèrent jusque-là cette question, ô combien cruciale. Le « Rewmi » d’Idrissa Seck avait menacé de mettre un coup d’arrêt à la campagne de délivrance des cartes d’identité biométriques à Thiès pour s’ériger contre « une rupture d’égalité entre les citoyens ». Hélas, il n’y est pas parvenu. De son côté, Bok Gis Gis de Pape Diop a pris sur lui de faire des communiqués par voie de presse appelant les Sénégalais à s’inscrire massivement, sans être suivi par ses alliés de la coalition.
Aussi, l’opposition a-t-elle laissé le terrain libre à Macky et sa coalition sur cette question. Et si tant est que leur volonté est de biaiser le jeu, ils s’en sont donc pris naturellement sans coup férir.
Et que dire de la marche programmée de « Manko Wattu Sénégal » ce 21 mars à Paris si ce n’est que c’est une preuve supplémentaire de l’attitude inconséquente de l’opposition. Comment prétendre vilipender Macky à l’international après lui avoir arraché des concessions à l’issue de sa récente rencontre avec une délégation de l’opposition au Palais ? Comment convaincre l’opinion internationale de l’opacité qu’entretiendrait le ministre de l’Intérieur sur le processus électoral au moment même où il décide de rouvrir les discussions avec l’opposition sur le sujet ?
Décidément, Macky manœuvre si bien qu’il pousse régulièrement ses détracteurs à la faute. Et ce n’est pas que par sa capacité à se jouer d’eux qu’il a pris une bonne longueur d’avance sur ses adversaires.
En offrant le perchoir du Haut Conseil des collectivités territoriales à Ousmane Tanor Dieng et en prenant à bras-le-corps la campagne d’Abdoulaye Bathily pour la présidence de la Commission de l’Union africaine, il conforte et fortifie sa majorité. Alors que c’est visiblement tout le contraire à « Manko Wattu Sénégal ».
De même, à travers son programme de modernisation des cités religieuses, il mène tambour battant une opération de séduction auprès de toutes les confréries du pays et espère en tirer les dividendes à quelques encablures d’une échéance aussi cruciale que les prochaines législatives. Enfin, en multipliant à grand renfort de publicité les cérémonies d’inauguration et de pose de première pierre, il est d’ores et déjà en campagne pendant que l’opposition s’empêtre dans ses propres contradictions.
Il y a toutefois un bémol et il est de taille. A défaut de voir l’opposition se dresser efficacement contre lui, Macky risque tout de même de voir ses plans contrarier par l’autre Pds, en l’occurrence le Parti de la Demande Sociale. Car il a beau réaliser des travaux d’infrastructures, ils n’ont guère amélioré le quotidien de l’écrasante majorité des Sénégalais. Ses travaux visent certes le bien-être des populations à moyen terme, mais ils sont loin d’avoir transformé notre économie au point d’impacter le panier de la ménagère. C’est le seul risque que Macky encourt face à une opposition qui cherche encore désespérément sa voie.
Momar Diongue
En tout cas, on a d’un côté un président de la République qui les préparer activement et méthodiquement, conscient qu’il s’agit là d’une étape cruciale pour s’offrir un second mandat en 2019. Lui sait ce qu’il veut, où il va et trace astucieusement sa voie pour y parvenir. L’opposition, de son côté, peine à trouver la sienne. Elle n’est ni sur le bon sillage ni sur le bon tempo. La coalition « Manko Wattu Sénégal » se laisse plutôt imposer son propre rythme.
Comme dans une guerre froide, elle ne fait que réagir aux signaux émis par l’adversaire. Elle était dans une posture radicale jusqu’à ce que Macky n’accorde subitement sa grâce à Karim Wade, ramollissant du coup la position de sa principale composante : le Pds. Puis, il embraya avec son appel au dialogue national et brisa l’élan unitaire de ses adversaires partagés entre pro et anti pourparlers.
Une fois ses « concertations» lancées en grandes pompes, le 28 mai dernier, Macky reprend alors la main et redevient le seul maître du jeu. Soufflant le chaud et le froid, il ne tarde pas à renouer avec l’adversité, défiant à nouveau ses opposants sur le ton de la moquerie. « Méfiez-vous du lion qui dort », leur balance-t-il à la figure en marge du Conseil des ministres délocalisé dans la banlieue, un mois à peine après les avoir conviés au dialogue.
Il n’en fallait pas plus pour que reprennent les hostilités sur fond de polémique autour de la gestion des ressources pétrolières et gazeuses, de la présence d’Abdoulaye Daouda Diallo au ministère de l’Intérieur et du processus électoral. Et ce, après les désaccords constatés lors des travaux sur la revue du code électoral entre majorité et opposition autour du ministre de l’Intérieur.
Les choses iront par la suite de mal en pis jusqu’à la marche réprimée de « Manko Wattu Sénégal ». La crise est alors à son paroxysme. Et il a fallu que Macky, qui prend visiblement un malin plaisir à manier la carotte et le bâton, décide une nouvelle fois de baisser la température. Il s’est vu en effet offrir l’opportunité de renouer le dialogue avec la correspondance que lui ont adressée les leaders de l’opposition pour exprimer leurs inquiétudes sur le processus électoral. Et, naturellement, il la saisit pour décrisper la situation.
Plutôt que de réagir par voie épistolaire, il a préféré convier « Manko Wattu Sénégal » à une rencontre, semant par la même occasion la zizanie en son sein. Certains de ses membres seront en effet opposés à l’envoi d’une délégation au Palais. Et dès qu’ils l’ont fait connaître publiquement, ils se sont fait exclure tout bonnement. La coalition de l’opposition verra en outre un nouveau regroupement, « Sam lignou bokk », naître de ses flancs.
Bref, Macky est passé maître dans l’art de tourner en bourriques ses adversaires qu’il en arrive facilement à les faire déjouer. Pour preuve, plutôt que de mettre la pression sur son gouvernement à propos de la refonte du fichier électoral - assurément la priorité de l’heure -, l’opposition se laisse distraire par la question des libertés publiques et la gestion des ressources pétrolières et gazières. Des questions certes importantes, mais que l’opposition gagnerait à reléguer pour l’instant au second plan pour se concentrer sur le processus électoral et sa stratégie d’alliance à tout juste six mois des prochaines législatives.
N’est-ce pas là la priorité s’il est vrai, comme le soupçonne d’ailleurs « Manko Wattu Sénégal », que l’actuelle majorité a fait un forcing sur la refonte totale du fichier uniquement pour se donner les moyens de gagner en amont les prochaines élections.
Or, c’est plutôt en ordre dispersé que les composantes de « Manko Wattu Sénégal » gèrent jusque-là cette question, ô combien cruciale. Le « Rewmi » d’Idrissa Seck avait menacé de mettre un coup d’arrêt à la campagne de délivrance des cartes d’identité biométriques à Thiès pour s’ériger contre « une rupture d’égalité entre les citoyens ». Hélas, il n’y est pas parvenu. De son côté, Bok Gis Gis de Pape Diop a pris sur lui de faire des communiqués par voie de presse appelant les Sénégalais à s’inscrire massivement, sans être suivi par ses alliés de la coalition.
Aussi, l’opposition a-t-elle laissé le terrain libre à Macky et sa coalition sur cette question. Et si tant est que leur volonté est de biaiser le jeu, ils s’en sont donc pris naturellement sans coup férir.
Et que dire de la marche programmée de « Manko Wattu Sénégal » ce 21 mars à Paris si ce n’est que c’est une preuve supplémentaire de l’attitude inconséquente de l’opposition. Comment prétendre vilipender Macky à l’international après lui avoir arraché des concessions à l’issue de sa récente rencontre avec une délégation de l’opposition au Palais ? Comment convaincre l’opinion internationale de l’opacité qu’entretiendrait le ministre de l’Intérieur sur le processus électoral au moment même où il décide de rouvrir les discussions avec l’opposition sur le sujet ?
Décidément, Macky manœuvre si bien qu’il pousse régulièrement ses détracteurs à la faute. Et ce n’est pas que par sa capacité à se jouer d’eux qu’il a pris une bonne longueur d’avance sur ses adversaires.
En offrant le perchoir du Haut Conseil des collectivités territoriales à Ousmane Tanor Dieng et en prenant à bras-le-corps la campagne d’Abdoulaye Bathily pour la présidence de la Commission de l’Union africaine, il conforte et fortifie sa majorité. Alors que c’est visiblement tout le contraire à « Manko Wattu Sénégal ».
De même, à travers son programme de modernisation des cités religieuses, il mène tambour battant une opération de séduction auprès de toutes les confréries du pays et espère en tirer les dividendes à quelques encablures d’une échéance aussi cruciale que les prochaines législatives. Enfin, en multipliant à grand renfort de publicité les cérémonies d’inauguration et de pose de première pierre, il est d’ores et déjà en campagne pendant que l’opposition s’empêtre dans ses propres contradictions.
Il y a toutefois un bémol et il est de taille. A défaut de voir l’opposition se dresser efficacement contre lui, Macky risque tout de même de voir ses plans contrarier par l’autre Pds, en l’occurrence le Parti de la Demande Sociale. Car il a beau réaliser des travaux d’infrastructures, ils n’ont guère amélioré le quotidien de l’écrasante majorité des Sénégalais. Ses travaux visent certes le bien-être des populations à moyen terme, mais ils sont loin d’avoir transformé notre économie au point d’impacter le panier de la ménagère. C’est le seul risque que Macky encourt face à une opposition qui cherche encore désespérément sa voie.
Momar Diongue