MBAYE JACQUES DIOP UN COMBATTANT DANS L’AME

Rédigé par Dakarposte le Mercredi 14 Septembre 2016 à 11:21 modifié le Mercredi 14 Septembre 2016 11:24

«Je n’ai jamais été nommé, j’ai toujours eu des mandats électifs»
Cette phrase, le  défunt  aimait  à la  répéter, sans  doute, avait–il  raison. Exception faite de son passage au Conseil  de  la  république  pour  les  affaires  économiques et sociale (Craes), l’ancien maire  de Rufisque glanait  fièrement  ses mandats  plusieurs  fois  renouvelés  de député et de maire  de Rufisque.
 
Mbaye Jacques Diop, fils  unique  de  sa maman Thiaba Diop et  d’un père polygame Madické  Diop, est né un 15 janvier 1934 à Rufisque, au quartier Mérina.  Très tôt, le  fils  de Thiaba  Diop a eu le  sens des responsabilité et  s’est toujours  battu pour  gagner  sa vie  et aider sa maman, qui vivait  dans la  grande  maison familiale « faite  en baraques ». Après des études primaires  brillantes  à Rufisque, il  atterrit à l’école primaire  supérieure  de Dakar. Comme il aimait le  rappeler  fièrement aux jeunes. Ses vacances,  il les passait à l’usine  de Bata où, il recevait  une  paie chaque  semaine  et qu’il versait  intégralement à sa maman adorée pour  l’aider. «Ce n’est  qu’à l’approche  de la  rentrée  des classes que je  prenais une  partie  de ma paie pour préparer ma rentrée  et m’acheter des fournitures et des livres ». Cette mère, Mbaye Jacques lui vouait  une admiration à nulle autre pareille, parce que,  disait-il « c’est elle qui m’a pris  par la main pour aller m’inscrire à l’école , ce geste m’a valu  tous  les honneurs que j’ai eu dans ma vie, c’est pourquoi je ne le  remercierai jamais assez ».  Mbaye Jacques Diop a toujours  invité les jeunes à vénérer leurs parents et surtout  leur maman.
 
Après un cursus  scolaire écourté pour des raisons sociales, Mbaye Jacques Diop va faire une  incursion en politique à partir  de 1954. Il traversera toute l’histoire  politique des socialistes. Mais  en même temps, il prendra  le temps  de poursuivre  ses études de capacités en droit, avant  de devenir  expert maritime et ayant formé  plusieurs  générations  d’experts.  
 
Il fut  membre fondateur  du Mouvement  des Jeunesses du Bloc Démocratique Sénégalais au congrès  de Louga. Il  occupa  diverses fonctions dans les différents appareils  senghoriens. De 1957 à 1964, il fut Secrétaire Général à l’Organisation et à la Propagande de l’Union des Jeunes du Bloc Populaire Sénégalais (UJ-BPS)  et du Mouvement des Jeunes de l’Union Progressiste Sénégalaise (MJ-UPS). En  juillet 1958, il participa  à Cotonou comme délégué de la Jeunesse du Sénégal au Congrès du Parti du Regroupement Africain (PRA) qui réclama « l’Indépendance immédiate » de certains  pays africains. 
 
Entre 1964 et 1967, Mbaye Jacques  fut  premier Secrétaire Général-Adjoint du Bureau National du Mouvement des Jeunes de l’Union Progressiste Sénégalaise (MJ-UPS) et membre des  bureaux Politiques du Bloc Populaire Sénégalais et de l’Union Progressiste Sénégalaise. Co-rédacteur de la Charte de l’Inter-Africaine Socialiste (IAS) avec l’égyptien Pierre Boutros Ghali  et le tunisien  Mohamed Sayah.
 
Héritier d’Alioune  Badara Mbengue, il poursuivi  le combat de son mentor, contre Cora Fall, son éternel adversaire  dans le parti socialiste. Il fut secrétaire Général de la Coordination Communale PS de Rufisque Mbaye Jacques Diop était élu  secrétaire Politique de l’Union Régionale PS de Dakar  de 1990 de 2000.
 
En tant  que  secrétaire Permanent du Bureau Politique du Parti socialiste de 1977 à 1980, Me Mbaye Jacques Diop  prendra  part, au nom du Ps, à toutes les rencontres organisées autour  de l’élaboration d’un code électoral consensuel entre 1989 à 2000.
 
A la  faveur  de l’alternance  survenue en 2000, Mbaye Jacques Diop divorça d’avec le  PS le 02 mars 2000, dans l’entre deux tours de la présidentielle. Il  va fonder son propre parti politique, le  Parti pour le Progrès et la Citoyenneté (PPC), après un bref passage à l’AFP de Moustapha Niasse. Il sera nommé  à la  tête du CRAES (Conseil  de la Républiques aux affaires économiques  et sociales). Un poste qu’il ne quittera qu’après une brouille avec le seul qui lui accordé un poste de nomination, en l’occurrence Me Abdoulaye Wade.
 
TEMOIGNAGES
 
DERNIER HOMMAGE D’UN QUARTIER A SON FILS : Les jeunes refusent le corbillard pour la marche funèbre
Mbaye  Jacques Diop a été inhumé, le lundi 12 septembre, au cimetière de Thiawlène, où il repose désormais à côté  de sa maman Thiaba Diop. Pour ce dernier voyage, la population rufisquoise lui a rendu l’amour  qu’il vouait à la ville  de Mame Coumba Lamb. Ils  étaient nombreux, adultes et jeunes sans distinction  de coloration politique, à l’accompagner  à sa dernière demeure. 
Les jeunes  de son quartier ont refusé que la dépouille de Mbaye  Jacques soit transportée au cimetière par le corbillard, ils ont exigé et obtenu de la  famille  et des proches de porter leur père sur  une  distance  de près  de 1500m avec des chants à la gloire  de Dieu. Certains  parmi ces jeunes,  une  fois  à l’intérieur  du cimetière, n’ont pu s’empêcher de tomber en transe, avec des pleurs et des évanouissements. Certains qui n’ont pu accéder au cimetière, ce sont  massés sur le barrage pour suivre le rituel de l’enterrement.
Auparavant, à la levée du corps, à l’hôpital Principal de Dakar, c’est les représentants de tous les segments de la société qui lui ont rendu un vibrant hommage. Hommes politiques, syndicalistes, universitaires, patronat etc ont tous loué les qualité d’un homme multidimensionnel dont le nom se confond à l’histoire du Sénégal d’avant et d’après indépendance.
 
ISMAÏLA DIAKHATE EXPERT MARITIME : «Sa carrure politique a tendance à éclipser sa dimension professionnelle»
Rufisque a perdu un grand Monsieur.  Mais  la carrure politique a tendance à éclipser sa dimension professionnelle.  J’ai été formé  dans son cabinet, comme expert maritime  de 1984 à 1991, je  retiens  de lui un homme  honnête, intègre et d’un très grand professionnalisme. Et comme il disait, il voulait  toujours ce qu’il y a  de meilleur  pour les autres, j’espère  que son héritage professionnel sera perpétué. Il a formé  des gens  qui en ont formé  d’autres qui rayonnent en Afrique. Tous ceux qui sont sortis  des flancs  de son cabinet gèrent  aujourd’hui de très grands cabinets.  Donc, il ne faudrait pas aussi qu’on occulte cette dimension, c’est quelqu’un qui toujours travaillé, qui a gagné  sa vie  à la sueur  de son front et qui nous a inculqué de grandes valeurs comme la rigueur  professionnelle, l’honnêteté intellectuelle. Il disait :  nous ne détenons pas la vérité, mais celui qui veut  nous  enlever notre travail, il n’a qu’à se donner plus que la peine  que nous nous sommes donné pour l’enlever.  Il disait  aussi : n’ayez pas peur de la solitude  de la vérité parce qu’on vous reviendra. Il disait  surtout une compétence  sans valeur morale, ce n’est rien du tout.
 
ARONA BATHILY, ANCIEN CHEF DE CABINET  DE MBAYE JACQUES : «C’était un homme de rigueur dans le  travail»
Pour avoir  été  son chef  de cabinet  à la mairie et son attaché  de cabinet au conseil de la République  aux affaires économiques et sociales, je  retiens  de Me Mbaye Jacques Diop un grand homme, un homme de rigueur dans le  travail, un homme  de perfection, exigeant sur les valeurs. Il est surtout un maître spirituel qui nous a formé, qui nous a forgé dans  l’amour de Rufisque  d’abord et du Sénégal ensuite. C’est un homme  qui vouait  un amour profond  à Rufisque, j’en veux pour  preuve  son combat  pour  que Rufisque puisse profiter des retombées  de la  Sococim.  Quand il fallait privatiser la Sococim, Mbaye  Jacques Diop parlementaire  et maire  de Rufisque, s’est mobilisé  pour dire  qu’il n’était pas question que  Sococim soit  privatisée alors que Rufisque qui abrite l’usine  et  souffre de ses nuisances, n’en soit pas bénéficiaire. Ce qui a poussé la Sococim à prendre l’engagement  de verser un pourcentage de  son chiffre d’affaires pour l’éducation et le développement  dans la ville  de Rufisque.
 
OUMAR GUEYE, MINISTRE DE LA PECHE ET DE L’ECONOMIE MARITIME : «Il a été témoin de l’histoire politique du Sénégal»
Ce n’est pas seulement Rufisque qui a perdu un grand homme, mais tout le Sénégal. Me Mbaye Jacques Diop était un symbole d’engagement et de détermination. Il a beaucoup œuvré pour le développement de Rufisque. Il a toujours su incarner les valeurs de la démocratie. Je retiens toujours une phrase de lui :   « L’élu prime sur le nommé ». Il a été témoin de l’histoire politique du Sénégal. Nous nous rappelons des porteurs de pancartes, tout cela nous le devons tous à la clairvoyance et à la détermination de Me Mbaye Jacques Diop.
 
GENERAL MAMADOU GUEYE FAYE : «Le Sénégal a perdu un grand homme»
Le Sénégal a perdu un grand homme. Je l’ai connu à travers  un cousin feu Pape Gora Faye, ancien maire de Rufisque Est. Il m’appelait  toujours mon neveu. Je l’ai rencontré pour la dernière lorsqu’il a été décoré. Nous prions tous pour que le bon dieu l’accueille dans son paradis céleste.
Cheikh Amidou Kane
Recommandé Pour Vous