MARCHES POUR LA PLATEFORME INDUSTRIELLE DE DIAMNADIO: les errements de l’aprosi

Rédigé par Dakarposte le Samedi 24 Juin 2017 à 08:18 modifié le Samedi 24 Juin 2017 09:06

Un rapport d’audit du cabinet BSC commandité par l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) met formellement en
cause plusieurs marchés passés par l’APROSI (Agence d’aménagement et de promotiondessites industriels) lors de sa gestion 2015.

De gros contratssignésdansle cadrede laplateforme industrielle de Diamnadio sont en cause. Selon le rapport obtenu par Libération, par exemple, l’APROSI, en sa qualité de Maître d’ouvrage délégué de son autoritéde tutelle, le ministère de l’Industrie et des Mines, a lancé plusieurs procédures d’acquisition dont la sélection de prestataires pour une mission d’étude d’impact environnemental et socialet la sélection d’un prestataire pour les études géotechniques de la plateforme industrielle de Diamniadio (sortie de Dakar).

Le cabinet BSC a noté sur les deux procédures précitées, que c’est la Commission des marchés du Maître d’ouvrage qui a procédé aux opérations d’ouverture, d’évaluation et d’attribution, en lieu et place de la Commission des marchés de l’APROSI qui a lancé la
procédure de sélection, en sa qualité de Maître d’ouvrage délégué en violation des dispositions de l’article 36 du CMP. Il s’y ajoute qu’au vu du procès- verbal d’ouverture des offres, le Secrétaire général de l’APROSI a siégé dans la Commission des marchés du ministère de l’Industrie et des Mines, avec la qualité de membre, alors qu’il n’est pas formellementdésigné comme tel par l’arrêté du ministre de l’Industrie et des Mines, instituant la Commission des marchés.

Le SG de l’APROSI pris en flagrant délit L’examen de la Demande de renseignements et de prix (DRP) portant sélection d’un prestataire pour la réalisation des études géotechniques pour la plateforme industrielle deDiamniadio, attribuée à CEREEQ, pour un
montant de 29 513 275 F CFA, a permis de noter que les lettres d’invitation à soumissionner ne mentionnent pas l’identité de tous les candidats invités à participer à la procédure de sélection ; il s’agit d’une exigence de transparence à laquelle, il convient de se conformer. Elles ne portent pas non plus de mention de leur date de réception effective, par leurs destinataires.

Une copie de la page du cahier de transmission devrait être classée dans le dossier de marché, pour permettre aux vérificateurs de
s’assurer de la transmission et de la réception effective des Dossiers d’appel à la concurrence (DAC). La date limite de dépôt des offres n’est pas précisée dans les lettres de saisine des candidats, ni la durée de validité de soffres. Il est par ailleurs, indiqué dans les lettres de saisine que l’étudedoit être livrée à l’APROSI, le 26 décembre 2014, soit 3 jours après la date d’établissement des lettres d’invitation à soumissionner. Il s’agit d’une erreur dans la formulation de la lettre, car cette date du 26 décembre 2014 correspond plutôt à la date limite de dépôt des offres.

Pire, le point 4 des termes de référencerelatif à la méthode des élection, mentionne à la fois la méthode de sélection basée sur
la qualité etle coût etla méthode de sélection au moindre coût.

Deux méthodes de sélection ne peuvent être invoquées dans une seule et unique procédure concurrentielle.

« Le choixde laméthodedoit être clair et ne prêter à aucune confusion, susceptible d’entrainer l’annulation de la procédure, à la requête de toute personne intéressée à son bon déroulement »,

selon les auditeurs qui signalent que l’article 6 du contrat prévoit le paiement d’une avance de démarrage de 40%. Ce taux n’est pas conforme au Code des marchés publics (CMP) et l’avance n’est pas non plus couverte par une garantie de restitution d’avance, en violation des dispositions de l’article 97 du CMP. Le contrat n’a pas été soumis à la formalité de l’enregistrement avantla mise en règlement des factures, en violation de l’article 464.9 du CGI et de l’article 150 du CMP.

L’APROSI, en sa qualité de Maître d’ouvrage délégué, a conduit les procédures de sélection de prestataires pour cette mission d’étude géotechnique. « Nous avons noté que c’est la Commission des marchés du Maître d’ouvrage,(leMIM)qui aprocédé aux opérations d’ouverture ,d’évaluation et d’attribution, en lieu et place de la Commission des marchés de l’APROSI qui a lancé la procédure de sélection.Ceci n’est pas conforme aux dispositions de l’article 36 du CMP », signale BSC.

L’examen de la procédure de sélection d’un Consultant pour la réalisation de l’étude d’impact environnemental et social du projet
Plateforme Industrielle de Diam- niadio, attribué à Synergie Environnement, pour un montant de 17 700 000 F CFA, a permis de
noter que les lettres d’invitation à soumissionner ne mentionnent pas l’identité de tous les candidats invités, à participer à la procédure de sélection.

Nébuleuse autour d’un à gré à gré de 19 milliards L’examen de laprocédure d’attribution du marché par entente directe de la réalisation clé en main de la plateforme industrielle de Diamniadio, attribué à CGCOC, pour un montant de 19 705 090, 330 F CFA HT HD (50% en USD, soit 17 995 537 USD et 50% en F CFA, soit 9 897 545 165 F CFA HT HD, a permis de noter qu'après l’avis défavorable de la DCMP sur la requête formuléeparl’APROSI, aux fins d’obtenir l’autorisation de passer ce marché par entente directe, l’Autorité contractante a saisi l’ARMP, pour obtenir cette autorisation et informer l’Etat, aux fins de certification par ce dernier de la nécessité de poursuivre la procédure d’attribution, en vertu de l’article 76 du CMP.

Par décision N°027/15 en date du 4 février 2015 in fine, l’ARMP « autorise l’APROSI, à titre exceptionnel, à conclure par entente directe avec Cgcoc, le contrat relatif à la construction de la plateforme intégrée de Diamniadio».

Dans l’exposé des faits, le CRD évoque la lettre N°00111 PM/CAB/CS.GOUV.SD du 3 février 2015, certifiant que la signature du contrat avec la société chinoise CGCOverseasConstructionGroup. Co. Ltd(CGCOC),doit se faire pour des motifs d’intérêt général, conformément à l’article 76 du CMP.Anotre avis, il convient juste de prendre acte de la décision de poursuivre ordonnée par le Premier Ministre ,envertu des dispositions de l’article 76 du CMP.

Les auditeursont noté dans l’article 16-02.b) du contrat qu’au « titre d’avance exceptionnelle sur fournitures à très long délais et
onéreuses, le Maitre d’ouvrage pourra accorder également, une avance au maximum de 75% de la valeur des fournitures, sur présentation des pièces justificatives accompagnées d’une caution de garantie de remboursement, cette avance sera déductible sur
les décomptes à venir, au même titre que l’avance de démarrage». Ce taux de 75 % n’est pas conforme au taux prévudans l’article 95-3 du CMP, qui prévoit au titre des avances sur approvisionnement, un plafonnement à 50% du montant du contrat d’achat ou de la commande considérée.Ils signalent que la garantie de restitution d’avance sur matériel et matériaux, délivrée par ECOBANK, est plafonnée à 1 020 937 500 F CFA alors que les avances faites à ce titre au titulaire du marché, se chiffrent à 1 249 178 000 F CFA, soit un montant de 228 240 500 F CFA non couvert.

Une garantie complémentaire aurait dû être exigée au titulaire avant le paiement de l’avance. Il s’y ajoute qu’à l’exception de la commande faite au fournisseur MAMUT, pour 175 312 000 F CFA, les justificatifsdes commandes et les contrats ne sont pas classés
dans le dossier de marché.

L’article 20 du contrat prévoit une retenue de garantie de 10% sur les paiements, enviolation de l’article 118 du CMP qui limite le taux à 5% du montant des paiements. A l’exécutionc’est ce tauxde 5%qui a été appliqué.

Un décompte N° 3 a été établi pour la période allant du 10 juillet 2015 au 8 août 2015, alors qu’un ordre de service de suspension
des travaux avait été notifié au titulaire, en réponse à sa requête au motif que la pluie empêchait la poursuite des travaux, pou rla période allant du 15 juillet au 15 août 2015. La période couverte par le décompte, ne correspond pas à une période d’activité, pouvant justifier l’émission de ce décompte. La même observation est valable pour le décompte N°5,établi pour la période allant du 3 août 2015 au 10 septembre 2015, alors qu’un ordre de service de suspension des travaux a éténotifié au titulaire du marché, pour la période allant du 1er au 30 septembre 2015.

Deux décomptesirréguliers Des modifications ont été notées dans la devise de règlement de la quote-part en dollars, sur les décomptes N° 6, N° 9 et N°10, sans avenant de modification des conditions initiales de paiement du marché. La différence de
change négative cumulée est estimée à 103 880 191 F CFA.

Seule la première avance sur approvisionnementde 103 125000F CFA, payée en septembre 2015, a été récupérée sur le décompte
N°7, alors que d’autres avances sur approvisionnement estimées à 1 015 327 500 F CFA, avaient été facturées et payées. Les décomptes N°8 à N°13 n’ont pas été visés par le Maitre d’œuvre qui est censé valider les dits décomptes, avant paiement.

Le montant cumulé des travaux au 8 juillet 2016, se chiffre à 18 318 107 USD et 10 074 958 893 F CFA, pour des travaux dontle coûtinitial était estimé à 17 995 537 USD et 9 897 545 165 F CFA, induisant un surcoût de 22 570 USD et 177 413 728 F CFA, soit un dépassement global de 354 827 000 F CFA, sans ordre de service.

Un dépassement de 354 millions sans ordre de service

Ce dépassement ne doit pas être payé dans le cadre du marché ; il peut ce pendant donner lieu au paiement d’une indemnité, sur la
base des dépenses réelles encou- rues. Les auditeurs précisent que l’entreprise aurait dû aviser le maî-tre d’œuvre un mois au moins à l’avance, de la date probable à laquelle le cumul des travaux atteindra le montant total du marché, à charge pour le maître d’œuvre, de lui notifier un ordre de service d’arrêt des travaux, au moins dix jours avant cette date ou un ordre de service de poursuivre les travaux. A défaut d’ordre de service d’arrêter les travaux, ils doivent être poursuivis dans la limite de 5% du montant du marché, qui est facturé à prix global et forfaitaire, selon BSC.

Cheikh Mbacké Guissé
Libération
Cheikh Amidou Kane
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