Alors que toutes les attentions étaient braquées ce jeudi matin sur ce qu'il est convenu d'appeler "le cas des journalistes de l'Obs et du Quotidien", pas moins de quatre magistrats se sont discrètement présentés à la salle 4 du tribunal de Dakar.
Nos radars, qui ont réussi à les identifier nous soufflent qu'il s'agit du Président de la Chambre choisie Gberdao, d'Amdy Diouf, Moustapha Ba et Ousmane Diallo.
Le procès de l’ancien dictateur du Tchad Hissène Habré, qui doit commencer au Sénégal le 20 Juillet prochain sera le point culminant d’une campagne pour la justice ayant duré deux décennies, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.
« Il aura fallu 24 ans, mais la justice a fini par rattraper Hissène Habré », a déclaré Reed Brody, conseiller juridique à Human Rights Watch qui travaille avec les survivants depuis 1999. « Cette affaire démontre aux despotes, où qu’ils se trouvent, qu’ils ne seront jamais hors de portée de leurs victimes. »
La date du procès a été annoncé le 13 mai dernier par les Chambres Africaines Extraordinaires au sein du système judiciaire sénégalais.
Habré sera jugé pour crimes contre l’humanité, torture et crimes de guerre devant les Chambres africaines. Les Chambres ont été inaugurées par le Sénégal et l’Union africaine en février 2013 pour juger « la ou les personnes » les plus responsables pour les crimes internationaux commis au Tchad entre 1982 et 1990, quand Hissène Habré était au pouvoir. Le Juge Gberdao Gustave Kam du Burkina Faso, Président de la Chambre d’Assises, sera assisté de deux juges sénégalais expérimentés.
Avec le procès de Hissène Habré, pour la première fois, les tribunaux d’un État vont juger l’ancien dirigeant d’un autre État pour des supposées violations des droits de l'Homme. Ce sera également la première fois que l’utilisation de la compétence universelle aboutit à un procès sur le continent africain. La « compétence universelle » est un concept de droit international qui permet à des tribunaux nationaux de poursuivre l’auteur ou les auteurs des crimes les plus graves commis à l’étranger, quelle que soit sa nationalité ou celle des victimes.
Les survivants du gouvernement de Habré ont accueilli l’annonce des dates du procès avec satisfaction.
« Je veux pouvoir regarder Hissène Habré dans les yeux et lui demander pourquoi j’ai pourri trois années en prison, pourquoi mes amis ont été torturés et tués » a déclaré Souleymane Guengueng, qui a failli succomber aux mauvais traitements endurés pendant près de trois ans dans les prisons de Hissène Habré, puis a fondé l’Association des Victimes des Crimes du Régime de Hissène Habré (AVCRHH).
Hissène Habré est accusé de milliers d'assassinats et de l'usage systématique de la torture pendant son régime, de 1982 à 1990, lorsqu’il a été renversé par l’actuel président Idriss Deby Itno et a fui au Sénégal. Après une campagne de 22 ans menée par les victimes. Les Chambres ont inculpé Habré en juillet 2013 de crimes contre l’humanité, torture et crimes de guerre et l’ont placé en détention provisoire. Après une instruction de 19 mois, les juges d’instruction des Chambres africaines extraordinaires ont renvoyé Habré pour jugement.