Le « couvre-thiouraye » un tueur silencieux : Enquête de « L’Obs » sur le monoxyde très présent dans nos ‘’Ande’’

Rédigé par Dakarposte le Mercredi 24 Février 2021 à 10:11 modifié le Mercredi 24 Février 2021 07:11

L’encensoir ou « Ande Thiouraye », chez les femmes « Diongué » ou séductrices du Sénégal, en cette période de couvre-feu et de froid est un argument massif pour dans l’art de maintenir le bien-être du couple. Mais cette façon subtile de transformer, le couvre-feu, qui sonne comme une punition chez certains hommes, en « couvre-thiouraye » pour une très bonne ambiance, est facteur de risques parfois mortels. En atteste cette enquête de « L’Obs » sur le monoxyde très présent dans nos ‘’Ande’’ suite à la mort de deux familles, à peine deux mois d’intervalle, dont une mère de famille et ses deux filles…


Le gaz carbonique ou monoxyde de carbone découle de la combustion incomplète de certaines substances organique comme le charbon de bois, la fumée qui provient des véhicules, la combustion de certaines substances utilisées au quotidien, comme le gaz butane. Gaz toxique pour la santé, le monoxyde de carbone constitue, surtout en période de fraîcheur, un grand danger pour la santé des populations et peut même entraîner la mort.

Mis au banc des accusés, le monoxyde de carbone a été indexé, d’après les premiers éléments de l’enquête, comme étant l’auteur de la mort du couple Diouf. Ce gaz invisible, inodore et non irritant est émis par un appareil de chauffage.

Absorbé en quelques minutes par l'organisme, il remplace l'oxygène en se fixant sur l'hémoglobine, et rend l'asphyxie inévitable. S'il s'accumule dans un local fermé, il devient très rapidement mortel et peut tuer en une heure. Malheureusement, au Sénégal, il est très difficile d’identifier, dès les premières heures, une intoxication au monoxyde de carbone.
La cause ?

«Les gens méconnaissent beaucoup ses effets. Souvent, les gens, suite à une exposition au monoxyde de carbone, se plaignent de maux de tête, l’un des premiers symptômes, et ils ne vont pas obligatoirement se faire consulter en pneumatologie. Ils se réfèrent à d’autres structures. Ce qui rend difficile la pose du diagnostique et qui explique l’absence de chiffres pour ces cas. Souvent, ce n’est qu’après le décès et suite à une autopsie qu’on découvre que la cause de la mort est en fait due au monoxyde de carbone», confie le pneumologue Alioune Niang.


«Vertiges, maux de têtes, étourdissements, troubles du rythme cardiaque et un arrêt cardiaque»

A Sénégal, en cette période de fraîcheur, deux cas de décès connus et liés à une intoxication au monoxyde de carbone ont été répertoriés. Le dernier en date remonte à hier.

Le drame a eu lieu à Pikine-Nord. Mais avant cela, plus précisément dans la nuit du 31 janvier au 1er février 2021, au quartier dakarois de Yoff-Tonghor, une mère de famille et ses deux filles ont été découvertes sans vie dans leur chambre.

Glacés jusqu’aux os, Adama Barry et ses deux filles, Mariama et Sadio Diallo, s’étaient enfermées dans leur chambre commune et avaient choisi de réchauffer la pièce en brûlant de l’encens sur une bonbonne de gaz. Elles n’y survivront pas.

Surprises par le sommeil, elles mourront toutes les trois d’asphyxie. «L’intoxication au monoxyde de carbone est un fait très courant, surtout en temps de fraîcheur», renseigne le pneumologue Alioune Niang. Avec cette fraîcheur, les Sénégalais ont tendance à s’enfermer, utilisant le charbon de bois avec de l’encens.

«Une pratique dangereuse», de l’avis de l’homme de l’art, car «en s’enfermant avec un encensoir, la personne inhale le gaz qui a la propriété de se fixer encore plus facilement sur le sang. Il va remplacer ainsi l’oxygène au niveau de l’hémoglobine. Le carbone sera transporté au niveau des organes comme le cerveau et le cœur.»

La personne intoxiquée développe des symptômes tels que des vertiges, des maux de têtes, des étourdissements, des troubles du rythme cardiaque et un arrêt cardiaque. Mais, comme durant le sommeil, la personne ne sent pas ces signes, elle peut se retrouver avec un arrêt cardiaque. Le cerveau et le cœur sont nourris en oxygène. S’ils sont privés d’oxygène, cela va les dérégler.

Dans ce cas, il y aura des souffrances cérébrales, un coma et la mort. Pour le spécialiste, ce sont des symptômes qui ne sont pas pris en compte par les malades. Au niveau hospitalier, il est difficile de faire le lien. «Les gens ne viennent pas se faire consulter. Soit, on constate le décès, ou ils rattachent ces signes à une autre maladie tel que la grippe, la fatigue ou même le paludisme, alors que c’est dû au monoxyde de carbone.» Seule une gazométrie artérielle permettra de poser un diagnostique précis de l’affection.

«On verra que le pourcentage d’oxygène dans le sang va être faible et le pourcentage de monoxyde de carbone va être élevé dans le sang», explique Dr Niang. Pour éviter de contracter une intoxication, il faut «éteindre toutes combustions avant de dormir, aérer également la chambre et ce, même s’il fait frais. Ne jamais dormir alors qu’il y a quelque chose qui se consume dans la maison», conseille la blouse blanche. Car, la conséquence principale de l’intoxication au gaz carbonique sur le long terme est l’arrêt cardiorespiratoire et, à court terme, les troubles de mémoires, des troubles neurologiques.

lobs.sn (Titre chapeau de leral.net)
 
 
Mamadou Ndiaye
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