Hamidou Dia aimait répéter que la mort est le souvenir poussiéreux de la vie. Je répliquais sans cesse que notre vocation est plutôt de méditer sur la vie pour un jour gagner les cimes de l’Immortalité.
Il s’est éteint hier matin, notre frère et ami, Hamidou Dia, et, en ce moment, il gravit les cimes de l’Immortalité. Par son œuvre multiple et riche de mots justes, de jets de lumière et d’éclats de diamant en l’honneur d’un monde de paix et de joie qu’il cherchait tant.
C’est que Hamidou Dia était d’une culture immense, peu commune. Il faut réécouter l’une de ses dernières interventions publiques sur Jérusalem.
Il connaissait, jusqu’à l’anecdotique, Senghor, Césaire, Damas et tous ceux qui ont porté haut le cri nègre. Il avait une connaissance passionnée de David Diop à la « poésie incandescente » ainsi que tous les poètes du monde noir dont il a produit une belle anthologie.
Homme de lettres, Hamidou Dia était aussi familier de la littérature française à travers son histoire. Il était philosophe et avait de la philosophie à travers une parfaite maitrise.
Il était poète et romancier et je peux citer Les Sanglots de l’espoir, Les remparts de la mémoire, livres essentiels où le concept, de nature austère, est toujours chargé de subjectivité.
Il était ouvert à tous les souffles avec une capacité inouïe d’être, dans la pensée et l’action, le siège d’une synthèse joyeusement assumée.
Sa vie durant, il a été militant, depuis les années 70 lorsque, très jeune, il rencontre, par le biais de la culture et de l’art, le mouvement maoïste.
Si, avec toutes ces facettes, il n’est pas humaniste, mais alors qui est humaniste?
Voilà pourquoi nous étions là, hier, pour l’accompagner et, « pour l’ultime fois », lui dire, en sa présence silencieuse, toute notre amitié et notre affection.
Je vois ses amis et camarades.
J’aperçois Ousmane William Mbaye, le cinéaste utile.
J’entends son frère Mamadou Dia, la gorge enrouée, submergée de douleur, dire des mots justes, sur le frère disparu.
J’aperçois Thierno Kane, Mallé Kassé, Amadou Kane, Bachir Diop, ses compagnons des années de braise, rêve d’un soir de paix et de bonheur pour notre peuple.
Je vois, charrié d’émotion, mais lucide et concentré, son oncle Cheikh Hamidou Kane, l’immense écrivain.
Je vois ses neveux, Abdoulaye Sow et les autres, ses frères et sœurs, éplorés mais dignes.
J’entends Amadou Tidiane Wone étreint par la douleur dire généreusement sur Hamidou des propos élogieux que je confirme.
Je vois ses collègues de la Présidence, ses frères et amis, unis par la souffrance de raccompagner un homme chaleureux et bon. Je vois Baba Maal, le regard perdu dans le flot du temps, pensant sans aucun doute à leur passé commun à Saint Louis et leur séjour en Europe.
Je vois Alioune Badara Beye, Président de l’Association des écrivains du Sénégal, très présent pour l’ami et au nom de tous les écrivains du Sénégal.
Je vois sa veuve, inconsolable, parce que Hamidou fut pour elle un père, un ami, un compagnon.
Et je pense à Maimouna et à ses filles qu’il aimait tant, éprouvées mais fortes.
Enfin, j’entends le Président Macky Sall rendre hommage à son conseiller qui a renforcé en lui l’amour des arts et des lettres, son frère et ami, écrivain talentueux, intellectuel fécond et, dit-il, « incapable de méchanceté ».
Toi, grand frère et ami, qui m’a tant donné, y compris et surtout la passion de l’écriture, je te dis simplement: Sois en paix dans les instants de l’éternité. Enfin...