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Jugement en appel du meurtre d’Ibrahima Samb: les quatre policiers condamnés à 5 ans de prison

Rédigé par Dakarposte le Mercredi 24 Mai 2017 à 12:36 modifié le Mercredi 24 Mai 2017 - 12:38

Jugement en appel du meurtre d’Ibrahima Samb: les quatre policiers condamnés à 5 ans de prison
Les policiers Almamy Lawaly Touré, Thiandella Ndiaye, Mame Cor Ndong et Ousmane Ndao ont écopé, chacun, de 5 ans d’emprisonnement ferme pour meurtre. Une peine réduite de moitié par la Chambre criminelle d’appel de la Cour d’appel de Thiès, puisqu’ils avaient été condamnés à 10 ans en première instance.   

 En interjetant appel, les policiers Almamy Lawaly Touré, Thiandella Ndiaye, Mame Cor Ndong et Ousmane Ndao n’espéraient peut-être pas s’en tirer à aussi bon compte. Hier, la Chambre criminelle d’appel de la Cour d’appel de Thiès a réduit de moitié la peine de 10 ans que leur avait infligée le Tribunal d’instance de Diourbel, en 2013, pour meurtre avec actes de barbarie. En effet, l’affaire date de la même année. Elle a ouvert hier les audiences spéciales de la chambre criminelle de ladite Cour d’appel. Une nouvelle fois, les quatre policiers se sont présentés à la barre pour s’expliquer sur le meurtre commis sur Ibrahima Samb, le surlendemain de la fête de Tabaski de 2013.

Ce jour-là, les quatre policiers, tous membres de la Brigade de recherches de Mbacké, sont descendus sur le lieu du concert qu’organisait la chanteuse Coumba Gawlo. Ils ont interpellé plusieurs personnes dont Ibrahima Samb. Le véhicule de service étant plein, les agents du chef de brigade Issac Gassama ont décidé d’installer Ibrahima Samb dans la malle arrière de la voiture d’un des agents. C’était dans la nuit du 18 au 19 octobre 2013. Ensuite, ils sont rentrés et ont oublié le défunt âgé alors de 18 ans dans le coffre. Il y a passé toute la nuit.

Hier, devant la barre de la Cour d’appel, les quatre anciens limiers ont reconnu les faits. Cependant, Ousmane Ndao, stagiaire au moment des faits et qui avait procédé à l’arrestation d’Ibrahima Samb, a tenté d’enfoncer son supérieur. Il a déclaré que c’est sur instruction de Thiandella Ndiaye que le jeune homme a été placé dans la malle arrière. Faux, a répliqué Thiandella Ndiaye. ‘’Tout ce qu’il dit n’est pas fondé. D’ailleurs, je ne sais pas pourquoi il s’acharne sur moi. Peut-être qu’il a des problèmes avec moi. En revanche, je n’ai aucun problème avec lui’’, a-t-il lancé devant la Cour. Avant de préciser qu’il n’avait pas participé à l’arrestation du défunt Ibrahima Samb, encore moins à sa mise dans la malle arrière du véhicule immatriculé DK-0009-X que conduisait Almamy Lawaly Touré.

Lors de l’enquête préliminaire devant le juge d’instruction, Thiandella Ndiaye avait nié avoir donné l’ordre à Ousmane Ndao d’introduire le prévenu dans la malle. Hier encore, lors de son face-à-face avec l’avocat général de la Cour d’appel de Thiès, Thiandella Ndiaye a dit la même chose. ‘’En aucun cas, j’ai vu Ibrahima Samb. Je n’étais même pas au courant qu’il a été installé dans la malle de notre véhicule et qu’il y a passé toute la nuit. C’est le lendemain qu’Almamy Touré a débarqué chez moi à 14h pour m’en informer. Ce sont mes collègues qui l’ont mis dans la malle’’, a poursuivi le policier radié. Tout en rappelant que ‘’lui et ses collègues sont responsables de cette affaire’’, parce que c’est une unité constituée qui participait à cette opération. ‘’Nous avions agi en tant qu’éléments d’une unité constituée. Et donc, en cas de pépin, c’est tout le monde qui est responsable’’, a dit Thiandella Ndiaye.

 

‘’Nous avons oublié Ibrahima Samb dans le coffre’’

Pour sa part, Almamy Lawaly Touré, chauffeur du véhicule, a soutenu qu’il était bel et bien au courant qu’Ibrahima Samb était installé dans le coffre de son véhicule. Cependant, il a révélé devant la barre qu’ils avaient le choix entre laisser partir Ibrahima Samb ou le retenir, le temps de l’embarquer dans le véhicule Foton qui était stationné à 300 m du lieu de l’interpellation, parce que l’autre voiture était déjà pleine. Malheureusement, a-t-il ajouté, ‘’le malheur ne vient jamais seul. Nous en avions trop fait. Et c’est une seule personne qui nous a mis dans ce gouffre. J’étais sur le lieu des opérations avec mes collègues et le malheur s’est produit. Moi, en personne, je dois l’assumer’’, a-t-il dit devant la Cour d’appel de Thiès. Le chef de l’opération Mame Cor Ndong a également reconnu les faits. Il a dit regretter ce qui s’est passé. ‘’C’est dommage et c’est regrettable. Je reconnais que nous avons oublié Ibrahima Samb dans le coffre. On n’avait pas l’intention de lui faire du mal, parce qu’on n’avait pas de problème avec lui’’, s’est désolé Mame Cor Ndong.

Après avoir entendu les quatre policiers, l’avocat général Djibril Bâ les a tous déclarés coupables du meurtre d’Ibrahima Samb et a requis 10 ans d’emprisonnement dont 5 avec sursis. D’après lui, le fait d’introduire quelqu’un dans une malle est un ‘’délit’’. Il a aussi rappelé que lors de l’enquête préliminaire devant le juge d’instruction du Tribunal d’instance de Diourbel, Thiandella Ndiaye avait nié les faits qui lui sont reprochés. ‘’Thiandella Ndiaye, qui a nié n’être pas au courant de l’arrestation d’Ibrahima Samb, a déclaré qu’ils sont tous responsables. Donc, il était bien au courant que le jeune homme était dans le coffre du véhicule. Ils ont pris la décision de le faire. C’est pourquoi ils ont décidé de se cotiser pour amener le prévenu au district sanitaire de Mbacké. Donc, ils ont su que ce qu’ils avaient commis est un délit’’, a déclaré Me Djibril Bâ.

Selon lui, le jeune est mort dans des ‘’circonstances dramatiques’’, même s’il est décédé à 14 heures. ‘’Le premier niveau de violence résulte de l’acte. Le jeune homme a été mis dans le coffre d’un véhicule, pendant au moins 14 heures. Ils sont tous responsables de la mort de jeune homme, parce le certificat de décès révèle qu’il est décédé des suites de ses blessures. Ils n’ont aucune excuse’’, a-t-il martelé. Avant que Me Abdoulaye Babou, constitué pour la défense, ne demande la clémence du la Cour, en convoquant les dispositions de l’article 280 du code de procédure pénale. ‘’Les policiers exercent un métier extrêmement difficile. Ils sont victimes d’homicide involontaire. Ils n’avaient aucune intention de tuer’’, a fait savoir l’ancien officier de Police devenu par la suite avocat. Par contre, il a rappelé que la première erreur de son client Thiandella Ndiaye, c’est le fait qu’il a accepté de mener cette mission avec des moyens limités.

L’Etat va verser 20 millions de F Cfa en guise de réparation

Ainsi, Me Babou a souligné que le Tribunal de Diourbel n’a pas été clément au moment de rendre son jugement. ‘’La volonté de tuer est différente de l’oubli. Il n’y a aucun aspect volontaire dans ce cas. Ibrahima Samb, mort aujourd’hui, n’avait pas de différend avec les policiers. C’est l’oubli qui doit être convoqué dans cette affaire. J’étais policier comme eux. Ils n’ont certes pas fait leur travail qui est de rendre compte. C’est pourquoi Ibrahima Samb a été oublié dans la malle de leur véhicule jusqu’au lendemain. Je ne suis pas d’accord avec le jugement qui a été rendu par le Procureur de la chambre criminelle de Diourbel’’, a plaidé Me Babou. ‘’C’est juste un oubli. Ils ne l’ont pas fait exprès. Ils l’ont fait par inadvertance. Le Tribunal de Diourbel n’a pas tiré les conséquences’’, a-t-il insisté, même s’il a reconnu que le jeune homme est décédé par manque d’oxygène. ‘’Nous demandons la compréhension du juge qui doit infirmer le jugement’’, a-t-il conclu.

De son côté, Me Ciré Clédor Ly a tout simplement demandé l’annulation du jugement et la disqualification des faits. ‘’Ils ne cherchaient pas à le tuer. Je vous invite à revoir votre jugement. Je pense que 5 ans suffisent largement. Le Tribunal avait requis la perpétuité. La qualification des faits n’était pas des meilleures. Le ministère public doit procéder à l’annulation du jugement sur la base de l’art 508 du code de procédure pénale’’, a expliqué Me Ly, précisant que le fait que le juge ait requis 10 de travaux forcés contre les quatre policiers était une ‘’violation de la loi’’. ‘’Ce jugement ne doit pas être confirmé, il doit être annulé tout simplement. Et la Cour doit abandonner les charges d’actes de torture et de barbarie. La véritable qualification, c’est de retenir que la mort a suivi par négligence. Pas autre chose. Je vous demande de disqualifier les faits’’, a lancé Me Ciré Clédor Ly. Quant à l’avocat de la partie civile Assane Dioma Ndiaye, il a réclamé le somme de 20 millions de F Cfa en guise de réparation.

Dans son verdict final, le président de la Cour Pape Amadou Sow a rappelé que les faits s’analysent en ‘’violences ayant entraîné la mort’’ du jeune Ibrahima Samb. Ainsi, il a prononcé cinq ans d’emprisonnement ferme pour chacun, avec une amende de 20 millions de F Cfa qui sera versé par l’État du Sénégal.

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