Après les vives critiques sur le caractère neutre de la juridiction spéciale qu’est la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), la mise en demeure du douanier Diadji Ba démontre que la léthargie de la poursuite n’est qu’apparente.
La Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) se rappelle au bon souvenir de l’opinion. Après une accalmie, que beaucoup justifiait par l’atteinte de son principal objectif à savoir faire condamner Karim Wade, la juridiction d’exception reprend du service. En mettant en demeure le colonel Diadji Ba des Douanes sénégalaises de justifier la licéité de biens estimés ‘‘à un demi-milliard’’, selon nos confrères de Libération, les services du procureur Abdoulaye Diagne changent un peu d’air.
L’affaire a connu des évolutions depuis novembre 2013, où le commandant de la Douane a été victime d’un cambriolage à Pikine. Le douanier, n°2 du bureau de Dakar pétrole, et chef de section de la zone nord du môle 8 (chargé de la déclaration des produits pétroliers, de leur valeur et de leur taxation) a été ‘‘délesté’’ de 150 millions chez lui par des visiteurs indélicats. Suffisant pour courroucer sa hiérarchie, le ministre de l’Economie et des Finances, qui a ordonné sa suspension et un rapport circonstancié sur ce vol. Après une enquête interne de la douane, le procureur de la République s’est saisi de l’affaire et a demandé à la Crei de réactiver cette affaire en dormance depuis lors. Au terme d’une enquête préliminaire conduite par la Section de recherches sur saisine du Procureur spécial près la Crei Abdoulaye Diagne, les soupçons sérieux d’enrichissement illicite se sont avérés puisqu’il a sommé le douanier de justifier, dans un délai d’un mois, ‘‘l’origine licite des ressources qui lui permettent d’être en possession d’un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec ses revenus légaux’’, comme le stipule l’article 163 bis de la loi 81-53 du 10 juin 1981, qui définit l’infraction d’enrichissement illicite. Si ces justifications ne lui semblent pas convaincantes, le Procureur spécial devrait transmettre alors le dossier à la Commission d’instruction, qui dispose d’un maximum de six mois pour décider d’un non-lieu ou d’un renvoi devant la Cour. Le double degré de juridiction n’étant pas prévu, seul un pourvoi en cassation peut alors être envisagé par Diadji Ba.
Le cas Aida Ndiongue
Ces poursuites contre le douanier sont, avec le dossier Aida Ndiongue et celui d’Abdoulaye Baldé, les dossiers actifs sur lesquels table la juridiction spéciale. Après un imbroglio judiciaire dans l’affaire du Plan Jaxaay au correctionnel, l’ex-sénatrice libérale n’est pas encore sortie de l’auberge, puisqu’une procédure pour enrichissement illicite l’attend à la Crei. Etant donné qu’avec cette juridiction, l’instruction ne peut pas dépasser six mois, sa commission d’instruction a procédé à plusieurs prolongations de ce délai. La cinquième et dernière remonte au 4 mars 2016 pour une durée de quatre mois. Une autre paire de manches judiciaire qui tarde à se concrétiser après que l’ex-mairesse des HLM a été relaxée, avec ses coinculpés, par le tribunal correctionnel de Dakar le 29 mai 2015. La mainlevée de ses biens a également été ordonnée. Le parquet avait interjeté appel aussitôt et la Cour d’Appel de Dakar infirma partiellement le jugement rendu en première instance, par décision N°271 du 5 avril 2016. Aida Ndiongue écopera finalement d’une peine d’un an de prison avec sursis mais bénéficiera toujours d’une mainlevée sur ses biens saisis. Ses complices présumés, Madou Sall, Abdoul Aziz Diop et Amadou Ndiaye sont relaxés, conformément au jugement de première instance. Toujours insatisfait, le Parquet se pourvoit en cassation, de même que les avocats de la prévenue, devant la Cour suprême. Cette dernière de la déclarer coupable d’escroquerie portant sur des deniers publics ; la condamne à un an d’emprisonnement ferme, deux millions de F CFA d’amende…et la confiscation de ses biens. Ses avocats ont promis d’attaquer cette décision par un rabat d’arrêt.
Baldé baladé par la Crei
Epée de Damoclès sur la tête du maire de Ziguinchor ? Les prorogations répétées de l’instruction de son dossier montrent qu’Abdoulaye Baldé est dans un cas presque similaire à celui de Aida Ndiongue. Poursuivi pour enrichissement illicite, l’avenir judiciaire de l’ancien directeur exécutif de l’Agence nationale de l’organisation de la conférence islamique (Anoci) relève de l’incertain. Son dossier a fait encore l’objet d’une prorogation d’instruction en mai dernier pour une durée de trois mois. Un dilatoire qui s’expliquerait par l’attente du rapport de l’expert-comptable, Alboury Ndao, commis pour éclairer l’instruction. Mais des indiscrétions sur le non-paiement des experts de la Crei parues dans la presse ne seraient pas étrangères aussi à ce blocage. En tout état de cause, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis le mois d’août passé, date d’expiration de cette prolongation. Karim Meissa Wade, le ‘‘plus gros client’’ de la Crei, a été libéré entre-temps. En 2017, le sort de l’édile de Ziguinchor pourrait connaître un tournant décisif.
EnQuête
La Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) se rappelle au bon souvenir de l’opinion. Après une accalmie, que beaucoup justifiait par l’atteinte de son principal objectif à savoir faire condamner Karim Wade, la juridiction d’exception reprend du service. En mettant en demeure le colonel Diadji Ba des Douanes sénégalaises de justifier la licéité de biens estimés ‘‘à un demi-milliard’’, selon nos confrères de Libération, les services du procureur Abdoulaye Diagne changent un peu d’air.
L’affaire a connu des évolutions depuis novembre 2013, où le commandant de la Douane a été victime d’un cambriolage à Pikine. Le douanier, n°2 du bureau de Dakar pétrole, et chef de section de la zone nord du môle 8 (chargé de la déclaration des produits pétroliers, de leur valeur et de leur taxation) a été ‘‘délesté’’ de 150 millions chez lui par des visiteurs indélicats. Suffisant pour courroucer sa hiérarchie, le ministre de l’Economie et des Finances, qui a ordonné sa suspension et un rapport circonstancié sur ce vol. Après une enquête interne de la douane, le procureur de la République s’est saisi de l’affaire et a demandé à la Crei de réactiver cette affaire en dormance depuis lors. Au terme d’une enquête préliminaire conduite par la Section de recherches sur saisine du Procureur spécial près la Crei Abdoulaye Diagne, les soupçons sérieux d’enrichissement illicite se sont avérés puisqu’il a sommé le douanier de justifier, dans un délai d’un mois, ‘‘l’origine licite des ressources qui lui permettent d’être en possession d’un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec ses revenus légaux’’, comme le stipule l’article 163 bis de la loi 81-53 du 10 juin 1981, qui définit l’infraction d’enrichissement illicite. Si ces justifications ne lui semblent pas convaincantes, le Procureur spécial devrait transmettre alors le dossier à la Commission d’instruction, qui dispose d’un maximum de six mois pour décider d’un non-lieu ou d’un renvoi devant la Cour. Le double degré de juridiction n’étant pas prévu, seul un pourvoi en cassation peut alors être envisagé par Diadji Ba.
Le cas Aida Ndiongue
Ces poursuites contre le douanier sont, avec le dossier Aida Ndiongue et celui d’Abdoulaye Baldé, les dossiers actifs sur lesquels table la juridiction spéciale. Après un imbroglio judiciaire dans l’affaire du Plan Jaxaay au correctionnel, l’ex-sénatrice libérale n’est pas encore sortie de l’auberge, puisqu’une procédure pour enrichissement illicite l’attend à la Crei. Etant donné qu’avec cette juridiction, l’instruction ne peut pas dépasser six mois, sa commission d’instruction a procédé à plusieurs prolongations de ce délai. La cinquième et dernière remonte au 4 mars 2016 pour une durée de quatre mois. Une autre paire de manches judiciaire qui tarde à se concrétiser après que l’ex-mairesse des HLM a été relaxée, avec ses coinculpés, par le tribunal correctionnel de Dakar le 29 mai 2015. La mainlevée de ses biens a également été ordonnée. Le parquet avait interjeté appel aussitôt et la Cour d’Appel de Dakar infirma partiellement le jugement rendu en première instance, par décision N°271 du 5 avril 2016. Aida Ndiongue écopera finalement d’une peine d’un an de prison avec sursis mais bénéficiera toujours d’une mainlevée sur ses biens saisis. Ses complices présumés, Madou Sall, Abdoul Aziz Diop et Amadou Ndiaye sont relaxés, conformément au jugement de première instance. Toujours insatisfait, le Parquet se pourvoit en cassation, de même que les avocats de la prévenue, devant la Cour suprême. Cette dernière de la déclarer coupable d’escroquerie portant sur des deniers publics ; la condamne à un an d’emprisonnement ferme, deux millions de F CFA d’amende…et la confiscation de ses biens. Ses avocats ont promis d’attaquer cette décision par un rabat d’arrêt.
Baldé baladé par la Crei
Epée de Damoclès sur la tête du maire de Ziguinchor ? Les prorogations répétées de l’instruction de son dossier montrent qu’Abdoulaye Baldé est dans un cas presque similaire à celui de Aida Ndiongue. Poursuivi pour enrichissement illicite, l’avenir judiciaire de l’ancien directeur exécutif de l’Agence nationale de l’organisation de la conférence islamique (Anoci) relève de l’incertain. Son dossier a fait encore l’objet d’une prorogation d’instruction en mai dernier pour une durée de trois mois. Un dilatoire qui s’expliquerait par l’attente du rapport de l’expert-comptable, Alboury Ndao, commis pour éclairer l’instruction. Mais des indiscrétions sur le non-paiement des experts de la Crei parues dans la presse ne seraient pas étrangères aussi à ce blocage. En tout état de cause, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis le mois d’août passé, date d’expiration de cette prolongation. Karim Meissa Wade, le ‘‘plus gros client’’ de la Crei, a été libéré entre-temps. En 2017, le sort de l’édile de Ziguinchor pourrait connaître un tournant décisif.
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