Le rétablissement de la peine de mort! Voilà un débat qui divise actuellement l’opinion au Sénégal. La série de meurtres barbares est passée par là. Mais, qu’est-ce que la peine de mort ? Où est-elle pratiquée aujourd’hui? Combien de détenus ont écopé de la peine capitale ces dernières années, combien d’entre eux ont été exécutés, comment se font les exécutions ? Quel est l’impact de la peine de mort sur la criminalité? La peine capitale est-elle la solution qu’il faut au Sénégal ? Seneweb a tenté de trouver des réponses à ces questions.
Octobre dernier, l’info avait fait le tour du monde. En effet, le Prince Turki bin Saud Al-Kabir, membre de la famille royale saoudienne, a été exécuté. Reconnu coupable d’avoir tué un de ses compatriotes, le prince avait écopé de la peine capitale et sa vie lui a été ôtée. Il fut la 134ème personne à avoir été exécutée en Arabie Saoudite en 2016. En effet, dans son pays, tout est clair. Tout individu qui veut s’aventurer dans le meurtre, le trafic de drogue, le vol à main armée, le viol ou l’apostasie, sait d’avance que la loi sera sans pitié avec lui. Il sera condamné à la peine de mort.
Plus de 1634 détenus exécutés en 2015
En effet, la peine de mort, ou peine capitale, est une peine prévue par la loi, consistant à exécuter une personne ayant été reconnue coupable d’une faute qualifiée de «crime capitale» par l’institution judiciaire du pays qui l'applique à l’issue d’un procès. Et Selon Amnesty international, au moins 1998 personnes ont été condamnées à mort dans 61 pays en 2015 contre 2466 en 2014. Durant la même période, plus de 1634 prisonniers ont été exécutés. Chiffre qui ne tient pas compte des personnes exécutées en Chine, où les statistiques sur la peine de mort sont considérées comme un secret d’État.
57 Etats pratiquants dont la Chine, les Usa, la Somalie
La Chine vient en tête dans le classement du nombre d’exécutions, suivie de l’Iran, du Pakistan avec ses 326 exécutions, de l’Arabie Saoudite qui a exécuté plus de 158 condamnés à mort en 2015, des Usa qui a ôté la vie à 28 prisonniers. La Somalie, premier pays africain, a exécuté plus de 25 condamnés à mort en 2015 et arrive 7ème au classement mondial. L’Egypte, lui, a fait plus de 22 exécutions et le Tchad 10.
Quant à la mise à mort de ces 1634 détenus, plusieurs méthodes ont été utilisées. La décapitation avait été pratiquée seulement en Arabie saoudite. La pendaison est utilisée en Afghanistan, au Bangladesh, en Égypte, en Inde, en Irak, en Iran, au Japon, en Jordanie, en Malaisie, au Pakistan, à Singapour, au Soudan et au Soudan du Sud. L’injection létale en Chine, aux États-Unis et au Viêt-Nam. La fusillade, quant à elle, a été opérée en Arabie saoudite, en Chine, en Corée du Nord, aux Émirats arabes unis, en Indonésie, en Somalie, à Taiwan, au Tchad et au Yémen.
L’injection létale ou la mort silencieuse
L’injection létale consiste à injecter un ou plusieurs produits à un condamné afin de lui ôter la vie. Aux Usa par exemple, parmi les 1440 exécutions depuis 1977, 1265 l’ont été par injection létale. Le condamné est installé et sanglé sur une table matelassée ou sur une chaise. Puis, une série de trois injections est administrée pour exécuter le condamné. La première, un barbiturique, du thiopental sodique ou du pentobarbital, est destinée à anesthésier le condamné. A forte dose, il provoque son inconscience en dix secondes. La seconde injection, un curare, du bromure de pancuronium, est destinée à paralyser ses muscles. Il sert à rendre la mort plus digne, dit-on, puisqu’il permet d’éviter que le condamné bouge durant l’exécution. Et c’est la troisième injection qui est fatale. En effet, contenant du chlorure de potassium, c’est elle qui provoque l’arrêt cardiaque, explique Wikipédia.
La décapitation consiste à la séparation de la tête et du corps du condamné, tandis que pour le peloton d’exécution, le condamné est fusillé par des tireurs.
57 Etats pratiquants, 105 abolitionnistes
Aujourd’hui, dans le monde, la tendance est à l’abolition de cette pratique. Mais, 57 pays pratiquent encore la peine de mort. Ces Etats, dont la Chine, les Usa, l’Arabie Saoudite, prévoient la peine capitale dans leur législation et l'appliquent effectivement. Dans ce lot des pays qui pratiquent des exécutions, figurent 16 Etats africains comme le Zimbabwe, la Gambie, le Nigéria, le Tchad etc. En plus de ces 57 Etats, 9 autres pays prévoient la peine de mort dans leur législation sans, toutefois, l’appliquer. En revanche, 105 Etats ont aboli la peine de mort. C'est dans ce lot qu’est le Sénégal, qui a supprimé la peine de mort en 2004.
Ils ont rétabli la peine de mort
D'autres pays ont supprimé puis rétabli la peine de mort. En novembre 2016, le dernier Etat à avoir rétabli la peine de mort est le Nebraska. Les électeurs l’y ont ramené lors d’un référendum. En Afrique, le Libéria a lui aussi ressuscité la peine capitale sans pour autant l’appliquer, depuis 2008. La loi y prévoit la peine capitale pour le vol à main armée, le terrorisme et le détournement de véhicule s'ils entraînent mort d'homme. Le Pakistan a, lui, rétabli la peine de mort même pour les mineurs et exécuté en novembre 2001, un condamné à mort reconnu coupable d'un meurtre commis alors qu'il avait treize ans, renseigne peinedemort.org.
La peine de mort est-elle dissuasive ?
Comme au Sénégal, aux Usa, le débat sur l’impact de la peine de mort sur la criminalité a eu lieu. En effet, dans son article intitulé «Does Death Penalty save lives (Est-ce que la peine de mort sauve des vies», le New York Times renseigne qu’une douzaine d’études aux Usa renseignent que les exécutions sauvent des vies. C’est-à-dire, qu’elles réduisent le taux de criminalité. «Pour chaque détenu mis à mort, les études disent que 3 à 18 meurtres sont évités», renseigne l’article. «Je suis personnellement opposé à la peine de mort», a déclaré H. Naci Mocan, économiste à la Louisiana State University et auteur d'une étude concluant que chaque exécution sauve cinq vies. «Ma recherche montre qu'il y a un effet dissuasif», a-t-il conclu. Mais, ses études ont fait l'objet de vives critiques et ont été rejetées par une grande partie des juristes, selon New York Times. Ils soutiennent que les théories des économistes ne sont pas applicables dans le monde violent du crime. Le prix Nobel d’économie, Gary Becker, s’est même invité au débat. Il a déclaré qu’il n’avait pas été obtenu «assez de variation pour être sûr d’un effet dissuasif».
Professeurs de Droit dans la prestigieuse Université de Harvard, Sunstein et Adrian Vermeule, ont, eux, estimé que «la preuve récente d'un effet dissuasif de la peine capitale semble impressionnante». Pour eux, «la peine capitale pourrait bien sauver des vies». «Ceux qui s'opposent à la peine capitale et ceux qui la défendent au nom de la protection de la vie humaine, doivent se réconcilier car l’échec de l’application de la peine capitale ne parviendra pas à protéger la vie», disent-ils.
La bonne solution pour le Sénégal ?
Au Sénégal, le débat fait rage depuis que les cas de meurtre odieux (celui du taximan et de la vice-président du Conseil economique, social et environnemental) se sont succédés. Le pays a connu deux exécutions depuis son indépendance. Ceux de Moustapha Lô et de Abdou Ndaffa Faye, en 1967. Mais, est ce que la société sénégalaise est bien préparée à l’application de la peine capitale et aux exécutions? La peine de mort est-elle la solution dissuasive qui mettra un frein à cette lancée meurtrière ? «La peine capitale a encore un effet de dissuasion dans la société sénégalaise», avait indiqué Senghor, selon Le Témoin, à la suite de l’exécution de Moustapha Lô, condamné à mort pour avoir tenté de lui ôter la vie. En tout cas, quoique la criminalité ait semblé monter d’un cran depuis quelques temps, il serait judicieux que notre pays et ses enfants s’assurent d’abord de l’impact dissuasif de l’application de la peine de mort, avant toute forme d’action.
Youssouf SANE
Auteur: Seneweb.com
Octobre dernier, l’info avait fait le tour du monde. En effet, le Prince Turki bin Saud Al-Kabir, membre de la famille royale saoudienne, a été exécuté. Reconnu coupable d’avoir tué un de ses compatriotes, le prince avait écopé de la peine capitale et sa vie lui a été ôtée. Il fut la 134ème personne à avoir été exécutée en Arabie Saoudite en 2016. En effet, dans son pays, tout est clair. Tout individu qui veut s’aventurer dans le meurtre, le trafic de drogue, le vol à main armée, le viol ou l’apostasie, sait d’avance que la loi sera sans pitié avec lui. Il sera condamné à la peine de mort.
Plus de 1634 détenus exécutés en 2015
En effet, la peine de mort, ou peine capitale, est une peine prévue par la loi, consistant à exécuter une personne ayant été reconnue coupable d’une faute qualifiée de «crime capitale» par l’institution judiciaire du pays qui l'applique à l’issue d’un procès. Et Selon Amnesty international, au moins 1998 personnes ont été condamnées à mort dans 61 pays en 2015 contre 2466 en 2014. Durant la même période, plus de 1634 prisonniers ont été exécutés. Chiffre qui ne tient pas compte des personnes exécutées en Chine, où les statistiques sur la peine de mort sont considérées comme un secret d’État.
57 Etats pratiquants dont la Chine, les Usa, la Somalie
La Chine vient en tête dans le classement du nombre d’exécutions, suivie de l’Iran, du Pakistan avec ses 326 exécutions, de l’Arabie Saoudite qui a exécuté plus de 158 condamnés à mort en 2015, des Usa qui a ôté la vie à 28 prisonniers. La Somalie, premier pays africain, a exécuté plus de 25 condamnés à mort en 2015 et arrive 7ème au classement mondial. L’Egypte, lui, a fait plus de 22 exécutions et le Tchad 10.
Quant à la mise à mort de ces 1634 détenus, plusieurs méthodes ont été utilisées. La décapitation avait été pratiquée seulement en Arabie saoudite. La pendaison est utilisée en Afghanistan, au Bangladesh, en Égypte, en Inde, en Irak, en Iran, au Japon, en Jordanie, en Malaisie, au Pakistan, à Singapour, au Soudan et au Soudan du Sud. L’injection létale en Chine, aux États-Unis et au Viêt-Nam. La fusillade, quant à elle, a été opérée en Arabie saoudite, en Chine, en Corée du Nord, aux Émirats arabes unis, en Indonésie, en Somalie, à Taiwan, au Tchad et au Yémen.
L’injection létale ou la mort silencieuse
L’injection létale consiste à injecter un ou plusieurs produits à un condamné afin de lui ôter la vie. Aux Usa par exemple, parmi les 1440 exécutions depuis 1977, 1265 l’ont été par injection létale. Le condamné est installé et sanglé sur une table matelassée ou sur une chaise. Puis, une série de trois injections est administrée pour exécuter le condamné. La première, un barbiturique, du thiopental sodique ou du pentobarbital, est destinée à anesthésier le condamné. A forte dose, il provoque son inconscience en dix secondes. La seconde injection, un curare, du bromure de pancuronium, est destinée à paralyser ses muscles. Il sert à rendre la mort plus digne, dit-on, puisqu’il permet d’éviter que le condamné bouge durant l’exécution. Et c’est la troisième injection qui est fatale. En effet, contenant du chlorure de potassium, c’est elle qui provoque l’arrêt cardiaque, explique Wikipédia.
La décapitation consiste à la séparation de la tête et du corps du condamné, tandis que pour le peloton d’exécution, le condamné est fusillé par des tireurs.
57 Etats pratiquants, 105 abolitionnistes
Aujourd’hui, dans le monde, la tendance est à l’abolition de cette pratique. Mais, 57 pays pratiquent encore la peine de mort. Ces Etats, dont la Chine, les Usa, l’Arabie Saoudite, prévoient la peine capitale dans leur législation et l'appliquent effectivement. Dans ce lot des pays qui pratiquent des exécutions, figurent 16 Etats africains comme le Zimbabwe, la Gambie, le Nigéria, le Tchad etc. En plus de ces 57 Etats, 9 autres pays prévoient la peine de mort dans leur législation sans, toutefois, l’appliquer. En revanche, 105 Etats ont aboli la peine de mort. C'est dans ce lot qu’est le Sénégal, qui a supprimé la peine de mort en 2004.
Ils ont rétabli la peine de mort
D'autres pays ont supprimé puis rétabli la peine de mort. En novembre 2016, le dernier Etat à avoir rétabli la peine de mort est le Nebraska. Les électeurs l’y ont ramené lors d’un référendum. En Afrique, le Libéria a lui aussi ressuscité la peine capitale sans pour autant l’appliquer, depuis 2008. La loi y prévoit la peine capitale pour le vol à main armée, le terrorisme et le détournement de véhicule s'ils entraînent mort d'homme. Le Pakistan a, lui, rétabli la peine de mort même pour les mineurs et exécuté en novembre 2001, un condamné à mort reconnu coupable d'un meurtre commis alors qu'il avait treize ans, renseigne peinedemort.org.
La peine de mort est-elle dissuasive ?
Comme au Sénégal, aux Usa, le débat sur l’impact de la peine de mort sur la criminalité a eu lieu. En effet, dans son article intitulé «Does Death Penalty save lives (Est-ce que la peine de mort sauve des vies», le New York Times renseigne qu’une douzaine d’études aux Usa renseignent que les exécutions sauvent des vies. C’est-à-dire, qu’elles réduisent le taux de criminalité. «Pour chaque détenu mis à mort, les études disent que 3 à 18 meurtres sont évités», renseigne l’article. «Je suis personnellement opposé à la peine de mort», a déclaré H. Naci Mocan, économiste à la Louisiana State University et auteur d'une étude concluant que chaque exécution sauve cinq vies. «Ma recherche montre qu'il y a un effet dissuasif», a-t-il conclu. Mais, ses études ont fait l'objet de vives critiques et ont été rejetées par une grande partie des juristes, selon New York Times. Ils soutiennent que les théories des économistes ne sont pas applicables dans le monde violent du crime. Le prix Nobel d’économie, Gary Becker, s’est même invité au débat. Il a déclaré qu’il n’avait pas été obtenu «assez de variation pour être sûr d’un effet dissuasif».
Professeurs de Droit dans la prestigieuse Université de Harvard, Sunstein et Adrian Vermeule, ont, eux, estimé que «la preuve récente d'un effet dissuasif de la peine capitale semble impressionnante». Pour eux, «la peine capitale pourrait bien sauver des vies». «Ceux qui s'opposent à la peine capitale et ceux qui la défendent au nom de la protection de la vie humaine, doivent se réconcilier car l’échec de l’application de la peine capitale ne parviendra pas à protéger la vie», disent-ils.
La bonne solution pour le Sénégal ?
Au Sénégal, le débat fait rage depuis que les cas de meurtre odieux (celui du taximan et de la vice-président du Conseil economique, social et environnemental) se sont succédés. Le pays a connu deux exécutions depuis son indépendance. Ceux de Moustapha Lô et de Abdou Ndaffa Faye, en 1967. Mais, est ce que la société sénégalaise est bien préparée à l’application de la peine capitale et aux exécutions? La peine de mort est-elle la solution dissuasive qui mettra un frein à cette lancée meurtrière ? «La peine capitale a encore un effet de dissuasion dans la société sénégalaise», avait indiqué Senghor, selon Le Témoin, à la suite de l’exécution de Moustapha Lô, condamné à mort pour avoir tenté de lui ôter la vie. En tout cas, quoique la criminalité ait semblé monter d’un cran depuis quelques temps, il serait judicieux que notre pays et ses enfants s’assurent d’abord de l’impact dissuasif de l’application de la peine de mort, avant toute forme d’action.
Youssouf SANE
Auteur: Seneweb.com