Le pouvoir d’Ibrahim Boubacar Keïta n’a jamais été aussi fragilisé. Le mouvement du 05 juin-Rassemblent des Forces patriotiques (M5-RFP) a remis ça ce vendredi 19 juin après une première manifestation qui a mobilisé des dizaines de milliers de Maliens au rond-point de l’Indépendance, à Bamako.
Sous l’impulsion de l’Imam Mahmoud Dicko, ces organisations de la société civile et des partis politiques de l’opposition ne réclament ni plus, ni moins que la démission du chef de l’État malien élu et réélu en 2013 et 2018, la dissolution de l’Assemblée nationale et de la Cour constitutionnelle.
L’ancien président du Haut conseil islamique du Mali et ses partisans reprochent au régime malien une batterie de griefs dont son impuissance à faire face à l’insurrection jihadiste dans le nord et dans le centre du pays. Ils dénoncent également la corruption érigée selon eux, en mode de gouvernance. Mais l’issue des dernières législatives a beaucoup pesé sur la tournure qu’est en train de prendre la contestation au Mali. Organisées entre mars-avril, en pleine épidémie du Coronavirus, ces joutes électorales se sont révélées peu transparentes. Pour en rajouter, la Cour constitutionnelle a inversé une trentaine de résultats dont dix au profit du camp présidentiel.
À la tête de ce mouvement, un homme connu des maliens. Président du Haut conseil islamique du Mali pendant des années avant de passer la main l’année dernière à Chérif Ousmane Madani Haïdara, Mahmoud Dicko semble cristalliser les revendications d’un peuple qui ne sait plus à quel chef se fier. Seulement, son appartenance au salafisme d'obédience wahabite ainsi que ses liens présumés avec les groupes jihadistes qui ont déstabilisé le pays pendant plus de dix ans indisposent certains observateurs. Pas que. Le président de l’Assemblée nationale Moussa Timbiné a mis en garde jeudi en plénière contre toute capitulation de l’État en accusant certains manifestants d’être de connivence avec les jihadistes.
Selon Alioune Tine, « ne voir que la dimension religieuse du fait du leadership de l’Imam Dicko, c’est très simpliste ». Le directeur du Think Thank Africa Jom Center invite à ne pas minimiser le ralliement à cette cause de partis d’opposition, de syndicats et d’anciens ministres. « Maintenant que le leadership soit religieux et que les manifestations démarrent des mosquées après la prière du vendredi, cela fait terriblement sens sur la vacuité des idéologies politiques et l'absence d'alternative. Ça donne le vertige sur l'ampleur et les effets du vide politique », souligne l’ancien Secrétaire Général de la Rencontre africaine de défense des Droits de l’Homme (RADDHO). Le mal est-il aussi profond ? La tentation de répondre par l’affirmative est pressante. La ferme volonté des contestataires à « dégager » IBK est une preuve irréfutable. Ce, en dépit de la tentative de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest de circonscrire le feu qui couve à Bamako.
Une mission composée du président de la Commission de la CEDEAO, des ministres des Affaires étrangères du Niger, du Nigeria et de la Côte d'Ivoire a été dépêchée au Mali à la veille du rassemblement du 19 juin. Ils ont rencontré les leaders du M5-RFP, dont l’Imam Mahmoud Dicko, ainsi que le camp adverse. Le religieux a rassuré les émissaires du président Issoufou qu’il ne mettra pas le feu au Mali. « Mais nous allons nous battre jusqu’à la satisfaction de notre demande », a-t-il réitéré lors du rassemblement de ce vendredi.
Preuve de la détermination du M5-RFP à gagner ce bras de fer, les propositions de la CEDEAO dans son communiqué en date du 19 juin ont été rejetées. « La Mission note que l’Arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle dans le cadre du contentieux des dernières élections législatives est à la base de la crispation socio –politique actuelle. Elle invite donc le Gouvernement de la République du Mali à reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révision par l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle. De nouvelles élections partielles pour les circonscriptions concernées devraient être organisées dans les meilleurs délais », a proposé la mission conduite par Kalla Ankourao, président du Conseil des ministres de la CEDEAO.
Le lendemain, le M5-RFP répond dans un communiqué signé par trois de ses responsables ; Cheikh Oumar Sissoko, Issa Katou N’djim et Choguel Kokalla Maïga. « L’idée d’élections partielles proposée dans le communiqué précité de la Mission ministérielle, outre sa totale illégalité, occulte la teneur des conclusions du 18 octobre 2018 de la CEDEAO elle-même qui indiquait : « Prenant acte de la prolongation de la législature actuelle selon l’avis de la Cour Constitutionnelle et au regard des dysfonctionnements largement reconnus et évoqués par tous les interlocuteurs lors du scrutin présidentiel passé, il est impératif que le Gouvernement et tous les acteurs sociopolitiques conviennent, de manière consensuelle, d’entreprendre des réformes courageuses des cadres légaux, y compris la Constitution de février 1992, et du système électoral avant de s’engager dans les prochaines échéances électorales que compte mener le pays » », rappelle le M5-RFP qui fait noter que le gouvernement du régime IBK n’a pas tenu compte de ces conclusions ».
Le Rassemblement des Forces patriotiques réfute également toute participation dans un gouvernement d’union nationale pour la simple raison que cette option « ne saurait résoudre les problèmes du Mali ».
Visiblement intraitables, ils réitèrent leur demande de démission du président Ibrahim Boubacar Keita et son régime et réaffirment leur détermination « à mettre en œuvre tous les moyens légaux et légitimes pour l’atteinte de cet objectif qui seul peut aujourd’hui sauver le Mali ».
Le point de non-retour semble atteint à moins que la rencontre sollicitée ce 20 juin par les partis et regroupements de la majorité présidentielle auprès du M5-RFP ne change la donne. Ce qui semble peu probable. L’histoire est-elle en train de bégayer dans ce pays ? Tout semble le faire croire. Les prochains jours seront édifiants.
« Dans tous les cas, cette crise doit servir de leçon aux autres pays de la sous-région », se veut prévenant Alioune Tine. « Nous avons des présidentielles en Octobre, en Guinée, Novembre en Côte d'Ivoire et en Décembre au Niger. L'élection au suffrage universel est en crise profonde dans la sous-région et donne lieu à des confrontations violentes qu'il faut surtout éviter dans une période post-covid très incertaine », prévient le Fondateur d’Africa Jom Center.
Sous l’impulsion de l’Imam Mahmoud Dicko, ces organisations de la société civile et des partis politiques de l’opposition ne réclament ni plus, ni moins que la démission du chef de l’État malien élu et réélu en 2013 et 2018, la dissolution de l’Assemblée nationale et de la Cour constitutionnelle.
L’ancien président du Haut conseil islamique du Mali et ses partisans reprochent au régime malien une batterie de griefs dont son impuissance à faire face à l’insurrection jihadiste dans le nord et dans le centre du pays. Ils dénoncent également la corruption érigée selon eux, en mode de gouvernance. Mais l’issue des dernières législatives a beaucoup pesé sur la tournure qu’est en train de prendre la contestation au Mali. Organisées entre mars-avril, en pleine épidémie du Coronavirus, ces joutes électorales se sont révélées peu transparentes. Pour en rajouter, la Cour constitutionnelle a inversé une trentaine de résultats dont dix au profit du camp présidentiel.
À la tête de ce mouvement, un homme connu des maliens. Président du Haut conseil islamique du Mali pendant des années avant de passer la main l’année dernière à Chérif Ousmane Madani Haïdara, Mahmoud Dicko semble cristalliser les revendications d’un peuple qui ne sait plus à quel chef se fier. Seulement, son appartenance au salafisme d'obédience wahabite ainsi que ses liens présumés avec les groupes jihadistes qui ont déstabilisé le pays pendant plus de dix ans indisposent certains observateurs. Pas que. Le président de l’Assemblée nationale Moussa Timbiné a mis en garde jeudi en plénière contre toute capitulation de l’État en accusant certains manifestants d’être de connivence avec les jihadistes.
Selon Alioune Tine, « ne voir que la dimension religieuse du fait du leadership de l’Imam Dicko, c’est très simpliste ». Le directeur du Think Thank Africa Jom Center invite à ne pas minimiser le ralliement à cette cause de partis d’opposition, de syndicats et d’anciens ministres. « Maintenant que le leadership soit religieux et que les manifestations démarrent des mosquées après la prière du vendredi, cela fait terriblement sens sur la vacuité des idéologies politiques et l'absence d'alternative. Ça donne le vertige sur l'ampleur et les effets du vide politique », souligne l’ancien Secrétaire Général de la Rencontre africaine de défense des Droits de l’Homme (RADDHO). Le mal est-il aussi profond ? La tentation de répondre par l’affirmative est pressante. La ferme volonté des contestataires à « dégager » IBK est une preuve irréfutable. Ce, en dépit de la tentative de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest de circonscrire le feu qui couve à Bamako.
Une mission composée du président de la Commission de la CEDEAO, des ministres des Affaires étrangères du Niger, du Nigeria et de la Côte d'Ivoire a été dépêchée au Mali à la veille du rassemblement du 19 juin. Ils ont rencontré les leaders du M5-RFP, dont l’Imam Mahmoud Dicko, ainsi que le camp adverse. Le religieux a rassuré les émissaires du président Issoufou qu’il ne mettra pas le feu au Mali. « Mais nous allons nous battre jusqu’à la satisfaction de notre demande », a-t-il réitéré lors du rassemblement de ce vendredi.
Preuve de la détermination du M5-RFP à gagner ce bras de fer, les propositions de la CEDEAO dans son communiqué en date du 19 juin ont été rejetées. « La Mission note que l’Arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle dans le cadre du contentieux des dernières élections législatives est à la base de la crispation socio –politique actuelle. Elle invite donc le Gouvernement de la République du Mali à reconsidérer les résultats de toutes les circonscriptions ayant fait l’objet de révision par l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle. De nouvelles élections partielles pour les circonscriptions concernées devraient être organisées dans les meilleurs délais », a proposé la mission conduite par Kalla Ankourao, président du Conseil des ministres de la CEDEAO.
Le lendemain, le M5-RFP répond dans un communiqué signé par trois de ses responsables ; Cheikh Oumar Sissoko, Issa Katou N’djim et Choguel Kokalla Maïga. « L’idée d’élections partielles proposée dans le communiqué précité de la Mission ministérielle, outre sa totale illégalité, occulte la teneur des conclusions du 18 octobre 2018 de la CEDEAO elle-même qui indiquait : « Prenant acte de la prolongation de la législature actuelle selon l’avis de la Cour Constitutionnelle et au regard des dysfonctionnements largement reconnus et évoqués par tous les interlocuteurs lors du scrutin présidentiel passé, il est impératif que le Gouvernement et tous les acteurs sociopolitiques conviennent, de manière consensuelle, d’entreprendre des réformes courageuses des cadres légaux, y compris la Constitution de février 1992, et du système électoral avant de s’engager dans les prochaines échéances électorales que compte mener le pays » », rappelle le M5-RFP qui fait noter que le gouvernement du régime IBK n’a pas tenu compte de ces conclusions ».
Le Rassemblement des Forces patriotiques réfute également toute participation dans un gouvernement d’union nationale pour la simple raison que cette option « ne saurait résoudre les problèmes du Mali ».
Visiblement intraitables, ils réitèrent leur demande de démission du président Ibrahim Boubacar Keita et son régime et réaffirment leur détermination « à mettre en œuvre tous les moyens légaux et légitimes pour l’atteinte de cet objectif qui seul peut aujourd’hui sauver le Mali ».
Le point de non-retour semble atteint à moins que la rencontre sollicitée ce 20 juin par les partis et regroupements de la majorité présidentielle auprès du M5-RFP ne change la donne. Ce qui semble peu probable. L’histoire est-elle en train de bégayer dans ce pays ? Tout semble le faire croire. Les prochains jours seront édifiants.
« Dans tous les cas, cette crise doit servir de leçon aux autres pays de la sous-région », se veut prévenant Alioune Tine. « Nous avons des présidentielles en Octobre, en Guinée, Novembre en Côte d'Ivoire et en Décembre au Niger. L'élection au suffrage universel est en crise profonde dans la sous-région et donne lieu à des confrontations violentes qu'il faut surtout éviter dans une période post-covid très incertaine », prévient le Fondateur d’Africa Jom Center.