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Blaise Matuidi : « Le Real est au-dessus de nous »

Rédigé par Dakarposte le Mercredi 21 Octobre 2015 à 15:06 modifié le Mercredi 21 Octobre 2015 - 15:11

Le Monde

A 28 ans, le milieu Blaise Matuidi est l’un des cadres du Paris-Saint-Germain, qui reçoit le Real Madrid, mercredi 21 octobre, en phase de poules de Ligue des champions. Avant d’affronter les Merengues dans la course à la première place du groupe A, l’international français (39 sélections depuis 2010) évoque, dans un entretien au Monde, les ambitions de son club sur la scène européenne, son parcours, mais aussi les Bleus et l’Euro 2016.


Blaise Matuidi : « Le Real est au-dessus de nous »


Mercredi 21 octobre, le PSG reçoit le Real Madrid en phase de poules de Ligue des champions. Avez-vous entouré cette date en rouge sur votre agenda ?
C’est un match particulier, contre une grande équipe. Cela n’arrive pas tous les jours. On est vraiment heureux d’avoir une telle opposition et de pouvoir se jaugerface à ce genre de formation. Après, ça vaudra 3 points, comme lors des rencontres contre Malmö et le Chakthar Donetsk. Comme nous, le Real en compte six. Il y a une petite bataille pour la première place.

Est-ce le premier moment de vérité pour le PSG cette saison ?
Un moment de vérité… Ça, c’est un peu pour vous les journalistes ! On a envie de se frotter à ce genre d’équipe. L’une des meilleurs au monde. Cela reste une rencontre de poule. Ce n’est pas une finale de Ligue des champions. Cela va être un gros match, très compliqué face à de grands joueurs. Mais on est chez nous et on va le jouer pour le gagner.
Cela évoque quoi, pour vous, le Real ?

Vous visez au moins les demi-finales ?
Je ne peux pas vous dire aujourd’hui où on veut aller. On veut faire mieux que l’année dernière et notre élimination en quarts de finale par le FC Barcelone. Chaque équipe rêve de gagner la Ligue des champions. Pour que ça devienne réalité, il faut avoir conscience qu’il y aura des étapes.
Le montant des droits télévisuels a explosé en Angleterre avec 7,3 milliards d’euros sur la période 2016-2019. Craignez-vous la nouvelle force de frappe des clubs de Premier League sur la scène européenne ?
C’est ce qu’il risque de se passer. C’est assez logique. Les clubs anglais ont déjà pillé pas mal de très bons joueurs évoluant en Ligue 1. Au niveau européen, la Premier League est le championnat le plus attrayant. Les clubs anglais auront leur mot à dire dans le dernier carré de la Ligue des champions. Ils vont redevenir de sérieux concurrents. Ce qu’ils n’étaient plus ces dernières années.
La saison passée, le PSG a tout raflé sur la scène française. Faut-il laisser de côté l’une des compétitions nationales pour se concentrer sur la Ligue des champions ?
C’est une réflexion à prendre en compte. On a un effectif qui est assez large. Pour l’instant, cela se passe très bien. En Ligue 1, on a pris de l’avance sur nos concurrents. Ce qui n’était pas forcément le cas la saison passée. C’est bon pour la suite. Quand on joue au PSG, il faut avoir envie de tout gagner. On n’a pas envie de faire d’impasse sur telle ou telle compétition.
Cela veut tout dire : c’est l’équipe la plus riche du monde sur les dix dernières saisons [549,5 millions d’euros de revenus à l’issue de la saison 2013-2014, contre 474,2 millions d’euros pour le PSG, cinquième club le plus riche du monde], c’est la meilleure équipe au monde sur la dernière décennie. C’est un très grand club, une institution qui s’est construite dans le temps, qui a gagné beaucoup de titres, dont dix Ligues des champions [dernier sacre en date en 2014]. On a beaucoup de respect pour le Real.
L’entraîneur du PSG Laurent Blanc pointe souvent le retard culturel – notamment la « culture de la gagne » – du PSG par rapport à de grandes équipes européennes comme le Real. Partagez-vous son analyse ?
Tout à fait. On a peu de titres en comparaison avec le Real. C’est un constat. Sur une saison, tout peut se passer mais on sait que le Real est au-dessus de nous.
En avez-vous marre que les médias vous demandent chaque saison si cela sera celle de la victoire du PSG en Ligue des champions ?
On dit ça tous les ans et finalement nous avons été éliminés trois fois en quarts de finale. Il ne faut pas s’enflammer. Certes, on a une très bonne équipe, elle est même meilleure que les années précédentes. On se sent vraiment bien. On se connaît mieux, on a recruté des joueurs de grande qualité [comme l’Argentin Angel Di Maria cet été]. Mais bon… La vérité, on la connaîtra en mars, lors huitièmes de finale, si on arrive à passer les poules. On est qu’au début de la compétition.
Vingt ans après la victoire du PSG en Coupe des coupes, les attentes sont-elles plus élevées cette saison en Ligue des champions ? D’autant que vous ne subissez plus actuellement les contraintes du fair-play financier…
Elles ont toujours été élevées au PSG depuis mon arrivée et le début de l’ère qatarie, en 2011. A l’époque, on nous demandait déjà de gagner le maximum de compétitions. Cela n’a pas changé. Il n’y a pas plus d’attentes que l’année dernière. Après, chacun son ressenti.

Votre entraîneur, Laurent Blanc, reste-t-il l’homme de la situation ?
Ce qu’on demande à un entraîneur, c’est de gagner des titres. À partir de là, que peut-on lui reprocher ? Je ne suis pas journaliste ni le président du club… Il a apporté sa philosophie. Elle marche. On est contents pour lui, pour son travail. On est tous exposés aux critiques. Quand on joue au PSG, il faut être parfait. Le mot parfait n’existe pas en réalité. Il faut le comprendre. Beaucoup de gens ne le comprennent pas. On ne sera jamais parfaits. Bien sûr qu’on aimerait pratiquer un meilleur football. Aujourd’hui, on a de bons résultats. Peut-être que cela ne suffira pas pour qu’on atteigne nos objectifs. Même si je pense qu’on a les moyens de faire de très très bonnes choses cette saison. L’attente est énorme quand on évolue dans un club comme le PSG. Il faut accepter les critiques. Cela a été le cas du coach. Il a su faire sa place. Il récolte les fruits de son travail aujourd’hui.
Vous avez connu une progression constante sur les plans athlétique et technique. Comment l’expliquez-vous ?
Je me répète souvent : par le travail. Ça n’a parfois pas été facile, il a fallu que je m’accroche par moments. Je peux encore aller plus haut et progresser. Aujourd’hui, l’idée est de gagner de grands titres.
Jean-Claude Lafargue, votre formateur à l’institut national du football de Clairefontaine, m’a dit : « Blaise a construit les étages de sa maison grâce à sa constance, avec de solides fondations. » Qu’en pensez-vous ?
« Coach Lafargue », que j’aime beaucoup, résume bien mon parcours. C’est important d’avoir de bonnes bases. Je ne suis pas un Messi. Mon talent me permettait de jouer au niveau professionnel. Pour atteindre le niveau international et évoluer en équipe de France, il fallait fournir un gros travail.
Que ce soit avec le PSG ou en équipe de France, vous vous êtes transformé en buteur. Votre coéquipier Zlatan Ibrahimovic vous a-t-il donné des cours particuliers ?
Il ne m’a pas donné de leçons particulières. Vous savez, quand on vous chambre tous les jours à l’entraînement, cela vous oblige à vous appliquer un peu. Ça a été le cas. Ça a fini par payer. Je regarde souvent mes coéquipiers et il faut parfois s’inspirer de ce qu’il se fait de mieux. J’ai la chance d’avoir Ibrahimovic et Cavani, qui sont deux grands buteurs.

Même si ce n’est pas mon rôle premier, et il faut que les gens le comprennent. J’essaye de suivre, de regarder les autres. Comme ça, quand l’occasion se présente, même si elles sont rares, au moins il y a plus de possibilités de marquer. J’ai d’autres tâches à accomplir. Mais c’est un plus.

Êtes-vous soulagé que les choses sérieuses commencent avec les Bleus – qui affrontent en novembre l’Allemagne et l’Angleterre – après ce long tunnel de matchs amicaux qui coïncidaient avec les éliminatoires pour l’Euro 2016, organisé en France ?
Quand on joue en équipe de France, la motivation doit venir d’elle-même. Peu importent les matchs. On représente son pays. Il n’y a rien de mieux. La perspective de l’Euro en France est fabuleuse. Ce n’est pas donné à tout le monde. La dernière grande compétition chez nous, c’était le Mondial 98, il y a presque vingt ans.
Après les succès des Bleus sur leur sol lors de l’Euro 84 et du Mondial 98, il va y avoir une obligation de résultats…
On a envie de faire un super truc, d’aller le plus loin possible. En 1998, il y avait une grande génération. Aujourd’hui, on a une jeune équipe, en pleine construction même si on se connaît un peu plus depuis la Coupe du monde 2014 au Brésil. Il y a un noyau qui est là depuis l’arrivée de Didier Deschamps en juillet 2012. On est comme une bande de potes. La génération Pogba, Varane est très intéressante pour le futur. Il ne faut pas oublier Griezmann. De jeunes joueurs nous ont rejoints comme Digne, Kurzawa, Zouma, Kondogbia, Aréola. Ils sont bien installés dans de grands clubs et sont matures. On ne peut pas leur demander ce qu’on va faire à l’Euro, ou de le gagner. On veut aller dans le dernier carré de la compétition. Je ne vais pas non plus me cacher. Chez nous, on a envie de se dire « les gars, on peut ». Mais il y aura d’autres grandes sélections qui se diront aussi « on peut ». On ne peut rien prédire.
Quelles nations européennes sont au-dessus de vous actuellement ?
L’Allemagne, même si elle est moins bien actuellement. La Belgique [qui va prendre la tête du classement FIFA lors de sa réactualisation, début novembre] qui fait actuellement du très bon travail et compte de bons joueurs. Il ne faut pas oublier l’Espagne, tenante du titre, on connaît son football. L’Italie, qui est toujours présente dans les grandes compétitions même si elle est passée à côté lors du dernier Mondial avec son élimination au premier tour. Il ne faut pas oublier l’Angleterre. On aura notre mot à dire dans cette compétition, qui s’avère difficile.
Étiez-vous inquiet en juin après votre mauvaise série du printemps (trois défaites en quatre matchs) et notamment cette défaite en Albanie (1-0) ?
Non, je n’étais pas inquiet. C’était une période de la saison un peu délicate. Je m’étais dit « on reviendra en septembre avec un autre état d’esprit ». Beaucoup de joueurs étaient fatigués mentalement. C’est ce qui a fait la différence au niveau des résultats. L’Euro sera en juin (10 juin-10 juillet 2016), en fin de saison… Mais on aura une bonne préparation et Didier Deschamps nous mettra d’emblée dans le vif du sujet.
Vous avez suivi l’actualité politique à la FIFA ces derniers mois, avec notamment la suspension pour quatre-vingt-dix jours de Michel Platini. En parlez-vous avec vos coéquipiers au sein du vestiaire du PSG ? Est-ce un sujet qui vous préoccupe ?
Non, pas du tout. Ça, c’est un autre domaine, ça ne nous concerne pas forcément. On est là pour jouer et essayer de gagner en club ou en sélection. Vous l’avez si bien dit : c’est de la politique.
Les joueurs doivent-ils prendre position sur ce sujet ? On peut penser que vous êtes les premiers concernés…
Non, ce n’est pas notre rôle. On n’est pas au courant de ce qu’il se passe. Pourquoi faut-il nous poser la question quand cela ne va pas sur ce plan-là ?

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