Baldé, avec ou contre Macky?

Rédigé par Dakarposte le Vendredi 16 Décembre 2016 à 07:57 modifié le Vendredi 16 Décembre 2016 07:59

S'entendre avec le Président Sall équivaudrait donc à donner à l'opinion l'impression de vouloir chercher la protection de Macky Sall, contre des suites judiciaires dans le cadre de la CREI.

On croyait l'Union des Centristes du Sénégal, complément miné par les récentes dissensions internes au parti. En apparence, et à la lumière de son grand meeting local de dimanche 11 décembre au stade Iba Mar Diop, la formation dirigée par Abdoulaye Baldé donne encore des signes de vigueur. Les départs de ses proches, Docteur Mansaly, Seydou Gassama et Ndèye Sadio (en train de revenir au bercail), n'auraient pas gravement affecté les centristes.

Le Président du Parti et Maire de Ziguinchor, sorti d'une longue hospitalisation après un accident à la main gauche, retrouve ses marques à la suite de ces contestations byzantines. Néanmoins, des proches du Président des centristes estiment que la crise est loin d'être dépassée. La bouderie de Dr Mansaly numéro 3 et des autres sécessionnistes ont laissé un fort sentiment de gêne et de malaise. Les réformes des structures qui devaient mettre en selle Tahibou Diédhiou, écartant du coup Dr. Mansaly, ne seraient pas du goût de tout le monde. 

Et les absences répétées du Président du Parti retenu à Dakar ou à l'extérieur, laissent des vides et accentuent l'inconfort des militants. Même si le premier adjoint au maire, Seydou Sané (président du Casa Sport), veille au grain et semble bien tenir la baraque.

Cependant, une question lancinante traverse le parti. Faut-il répondre aux appels du pied du Président Sall, qui chercherait à s'allier à l'UCS pour conquérir l'important bastion de Ziguinchor et du Sud ? Selon des proches, le Président Baldé serait opposé à une telle perspective. Son argumentaire est triple. D'abord, l'image du Président Sall se serait considérablement dégradé et sa réélection en 2019 très hypothétique. Pourquoi alors disent ses proches, s'allier à un Président dont l'avenir est si incertain, alors que Baldé peut raisonnablement se présenter en alternative crédible ?

Ensuite, pour eux, Baldé ne pourrait rejoindre le président Sall que s'il est définitivement lavé de tous les soupçons dont il est supposé couvert par la CREI. Et des éventuelles perspectives de poursuites judiciaires, qui lui pendent au nez. S'entendre avec le Président Sall équivaudrait donc à donner à l'opinion l'impression de vouloir chercher la protection de Macky Sall, contre des suites judiciaires dans le cadre de la CREI.

A ces deux explications politiques s'ajoute une troisième à la connotation plus familiale. Il s'agit en l'occurrence de l'impact de la passable qualité des relations entre la Première Dame, et sa "ndieuké" (marraine), Mme Baldé Aminata Gassama. Cette dernière, en dépit de maintes et vaines tentatives de réconciliation entre les "cousins par alliance", garderait toujours un profond courroux contre le couple présidentiel, coupable à ses yeux d'une "déloyauté et d'un acharnement politique inadmissible). Mme Baldé est considérée dans les milieux proches de Baldé comme le principal obstacle au rapprochement deux "cousins.  Elle serait convaincue que dans le contexte actuel, son mari a une carte à jouer, au premier plan.

Se circonscrire à des rôles supplétifs auprès du Président Sall ne valoriserait pas, à ses yeux le patron des centristes. Par monts et vaux, elle parcourt le pays, pour installer des structures de soutien au profit de son parti. "Parfois même en dehors du cadre du parti" regrette un militant, qui par ailleurs se plaint de l'absence de Mme Gassama à Ziguinchor. "Elle a même ouvert son propre siège à Dakar et déroule personnellement ses activités" semble s'indigner, un autre centriste. Avérées ou non ces récriminations ne contribuent pas à ramener une sérénité totale chez les partisans centristes. 

Un autre militant met au compte de Mme Baldé, appuyée par une autre égérie du parti Nicole Gakou, la réussite de l'organisation du meeting de Dakar, dont l'ampleur a dépassé les espérances des centristes. Dimanche, le stade Iba Mar Diop avait rarement connu une telle affluence. Une ambiance festive, un meeting à l'américaine dans l'antre sportive pleine comme un œuf. Les impressionnantes images, tournées par une agence ivoirienne à, l'aide de drones laissent croire à une véritable démonstration de force politique. Elles constituent un sérieux signal et un avertissement de taille a qui voudrait minimiser la représentativité de l'UCS, exulte un autre militant.

Il se dit même dans l'entourage du Président Baldé, que le Président Macky Sall aurait même appelé au téléphone son "cousin" Baldé pour le féliciter de cette belle sortie. A coup sûr, il s'agit pour Mme Baldé, d'une belle opération de positionnement politique, pour l'UCS. Un meeting national serait même en préparation à Dakar. Et toutes les structures du parti devraient y prendre part, histoire de prouver que l'UCS n'est pas un parti régional du Sud, mais bien une formation politique d'envergure nationale, qui n'entend pas s'en laisser conter.

Alors quid de l'alliance Macky-Baldé ? Pour des proches du Président Baldé, cette entente ne serait plus à l'ordre du jour. L'urgence étant de travailler à la consolidation du parti centriste et la poursuite de son maillage national. Cette approche est loin d'être partagée pour tous les proches du Président Baldé. Certains pencheraient pour un dialogue et un rapprochement à dose homéopathique. D'autres, opteraient pour une discussion franche et un alliage de l'APR et de l'UCS. Ce qui devrait conduire les deux formations à s'entendre sur une liste commune ou une alliance modulée dans certaines zones électorales (au Sud notamment ou l'APR perd du terrain). 

Après les, législatives, Abdoulaye Baldé pourrait briguer le Perchoir (Assemblée nationale) tant convoité par d'imminentes têtes de gondoles comme Mme Aminata Touré ou même l'actuel locataire Moustapha Niasse, peu pressé de prendre sa retraite. On voit mal comment, l'APR laisserait ce poste stratégique à un allié affaibli au risque de créer des dissensions internes.

Revigoré par son meeting de Dakar et les "incessants" appels du pied du pouvoir, l'UCS semble se donner une nouvelle cure de jouvence. Il est vrai que son poids électoral à Ziguinchor se confine à la commune, car le département n'est pas tombé dans son escarcelle lors des récentes élections. A Ziguinchor commune, en dépit d'une division persistante, les apéristes Doudou Kâ, Sambou , Innocence Ntap Ndiaye, entre autres sont loin d'avoir déposé les armes.

Pour l'heure l'alliance avec l'APR reste une hypothèse plausible mais pas irréversible. Elle trouve un grand défenseur en la personne de Seydou Sané premier adjoint au maire, qu'on dit proche du Président Sall. A la tête l'IDEN de la région, il a été récemment annoncé dans la presse comme devant briguer le poste de Ministre de l'éducation nationale. Vrai ou simple intox, le puissant Président du Casa Sport reste pour l'heure le principal bras droit de Baldé. Pourvu qu'ils continuent à partager les mêmes approches sur leur alliance réelle ou supposée avec le pouvoir.

Le Président Baldé vient de lancer, entre autres ambitieux projets, un important projet d'assainissement dans dix quartiers de Ziguinchor, étoffe sa stature présidentiable, et entend bien jouer les premiers rôles.

Momar Seyni Ndiaye 
Cheikh Amidou Kane
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