Difficile de vivre expérience plus pénible quand on est Premier ministre et candidat de la majorité à une élection présidentielle… Alors que la campagne devait officiellement s’ouvrir et que le scrutin était prévu pour la fin de février, Amadou Ba, dauphin du président Macky Sall, s’est retrouvé dans la tourmente.
Accusé par Karim Wade et le Parti démocratique sénégalais (PDS) d’avoir corrompu deux juges du Conseil constitutionnel pour évincer le fils de « Gorgui », remis en question par certains caciques influents du parti présidentiel, l’Alliance pour la République (APR), dès sa désignation en septembre, toujours contesté par d’autres depuis, confronté comme tout le monde, sans l’avoir souhaité, au report de l’élection au 15 décembre, Amadou Ba a fait le dos rond, s’astreignant au silence, mais conscient des enjeux de la partie de poker qui se joue en coulisses. Soucieux d’apaiser les esprits et de poursuivre sa mission, malgré un contexte volatile et un climat de tension, il a accepté de répondre à nos questions.
Jeune Afrique : Que pensez-vous de la décision validée par l’Assemblée nationale de reporter les élections au 15 décembre ?
Amadou Ba : Je suis partisan de tout ce qui concourt à la transparence du processus électoral et à la paix. En tant que candidat, je tire un intérêt évident à l’intégrité des mécanismes qui encadrent le scrutin : il en va de la crédibilité de mon élection à la tête du pays.
Comment réagissez-vous aux accusations de corruption portées par Karim Wade contre vous ?
Je suis de nature plutôt lucide… Et je suis serein. Je n’ai pas intenté de recours contre Karim Wade, que je sache. Je n’ai pas d’intérêt personnel à la validation ou non de sa candidature. Ces accusations sont tout à fait infondées et l’histoire rétablira fermement les faits.
Macky Sall appelle au dialogue national, pour un processus électoral transparent, dit-il. Comment avez-vous accueilli cette décision ?
J’ai toujours pensé que le dialogue était un élément fondamental du système démocratique. Il est préférable à la violence sous toutes ses formes. Je souhaite que le dialogue envisagé débouche sur un climat paisible et des consensus forts.
Ce report, annoncé la veille du lancement de la campagne, provoque de vives critiques. Les comprenez-vous ?
Chaque acteur est libre de ses choix. Mais en dernière analyse, je pense que le dialogue est une opportunité pour chacun de faire valoir ses opinions et de défendre ses intérêts.
Manifestement, vous avez des ennemis au sein de l’APR qui est votre propre formation…
Je dirais plutôt des adversaires. Ce qui importe pour moi, c’est la détermination à aller de l’avant. Chacun assume ses responsabilités, et j’assume forcément les miennes. L’avenir est un juge très sérieux.
Faut-il réintégrer Karim Wade et Ousmane Sonko pour l’élection du 15 décembre ?
Vous pensez vraiment que mon avis à ce propos est important ? Je ne suis pas celui qui décide d’intégrer ou d’exclure. Je suis un fervent adepte de la légalité institutionnelle, un républicain sans réserve.
Le Sénégal ne sort pas indemne de cette séquence. Son image de modèle démocratique, a fortiori dans une Afrique de l’Ouest encalminée dans les transitions post-coups d’État militaires, est sévèrement écornée. Cela ne vous gêne pas ?
Le plus important, à présent que la décision est actée, c’est de travailler à ramener un climat de paix et de sérénité propice à la discussion. Nous sommes dans un modèle démocratique qui peut rencontrer des difficultés, certes, mais en fin de compte nous finissons toujours par rebondir.
Cela change-t-il quelque chose à votre candidature et à votre stratégie ?
Vous avez toujours en face de vous le candidat. Quant à ma stratégie, elle est simple : continuer à opérer comme je le fais depuis le début, pour gagner. Nous en reparlerons au moment opportun.
Le président de la République vous a pour l’instant confirmé en tant que Premier ministre. Quelles sont vos priorités ?
D’abord, je remercie vivement le chef de l’État pour cette marque de confiance. Je dois être à la hauteur du défi, dans un contexte économique et social qui demande beaucoup d’efforts. Mes priorités restent celles d’un Premier ministre : il s’agit notamment de la coordination de l’action gouvernementale pour plus de performance et de qualité. Je dois traduire en actes les attentes du chef de l’État, qui tient à l’amélioration du pouvoir d’achat des populations, à l’emploi des jeunes et à l’accès de tous nos compatriotes à des soins de santé de qualité. Le tout dans un climat de paix et de sécurité. Ma responsabilité est de travailler chaque jour à la stabilité de mon pays.
Revenons un peu en arrière : vous avez été choisi pour porter les couleurs de l’APR et de la coalition Benno Bokk Yakaar [BBY]. Malgré tout, dès votre désignation, on a noté des voix discordantes. Certains ont même fait dissidence. Comment avez-vous réagi ?
Je comprends que chacun puisse avoir l’ambition de servir le pays à un tel niveau. Pour ma part, l’essentiel c’est que le choix du président Macky Sall, de BBY et de l’APR a été porté sur ma modeste personne, et que les contestations n’ont pas eu une ampleur susceptible d’affaiblir ma légitimité. Par ailleurs, je ne désespère pas que toute la famille se retrouvera. Je tends ainsi la main à tous les amis.
Comment expliquez-vous votre désignation ?
Je crois savoir que j’ai la capacité de mobiliser au-delà de notre majorité. Sociologiquement, nous sommes majoritaires dans ce pays. Il m’incombe de fédérer toutes les énergies pour gagner. J’estime également que je suis bien préparé pour conduire les politiques publiques inspirées par le Plan Sénégal émergent, dont j’ai été au cœur de la conception et de la mise en œuvre grâce à la confiance du président.
Beaucoup a été dit ou écrit sur vos relations avec le président. Qu’en est-il réellement ?
Le seul problème entre le président Sall et moi, c’est qu’il n’y pas de problème ! Je suis son collaborateur, particulièrement engagé dans la traduction en actes de ses instructions. Je mobilise toute mon énergie pour mériter sa confiance. Et il me soutient totalement dans cette quête de performance et d’excellence.
Face à vous et à la majorité présidentielle, l’opposition est nombreuse et déterminée à obtenir l’alternance. Avec de fortes probabilités d’une union au second tour et le scénario, si vous étiez qualifié, du seul contre tous…
Je vais à cette élection pour gagner. J’ai une claire conscience des enjeux et de notre potentiel. BBY est une redoutable machine électorale. Nous proposons à notre peuple un projet politique innovant qui s’appuie sur le bilan des deux mandats de Macky Sall. Nous sommes sur le terrain et les populations que nous rencontrons sont très réceptives à notre offre. Les Sénégalais veulent la paix, des initiatives hardies pour l’emploi et moins de pression sur le pouvoir d’achat, la consolidation des acquis dans tous les domaines et une présence toujours plus active du Sénégal dans le monde. Il faut un président serein, rassurant, expérimenté, confiant en la sagacité politique de son peuple. Je serai ce président, celui de la prospérité partagée pour renforcer l’équité sociale et l’inclusion.
Parmi les écueils que vous devez affronter, il y a la dichotomie entre la continuité que vous êtes censé incarner et le changement qu’attendent nombre de Sénégalais. Est-ce possible de concilier les deux ?
Notre approche est de faire du bilan exceptionnel de Macky Sall la rampe pour accentuer les acquis et ouvrir de nouvelles perspectives sur le chemin de notre émergence. Mon ambition est de faire plus et plus vite pour maintenir le rythme d’une embellie économique profitable à chaque Sénégalais, où qu’il se trouve. Nous allons créer, dans ce cadre, un important pôle financier et au cœur de ce pôle, une banque nationale d’investissement pour accompagner nos politiques de développement et soutenir le secteur privé dans son effort de mobilisation de ressources. Par secteur privé, il faut entendre tous les Sénégalais, y compris ceux de la diaspora, porteurs de projets de création de richesses. Je serai donc un président réformateur, pour libérer davantage notre économie et notre société des pesanteurs.
Le thème de la souveraineté du continent, sur tous les plans, est devenu un enjeu majeur. Sur le plan national, c’est également un sujet d’importance, a fortiori dans une campagne présidentielle. Comment l’envisagez-vous ?
L’Afrique ne veut plus être confinée à la périphérie du monde. Avec sa jeunesse dynamique et ses immenses ressources, notre continent revendique légitimement sa place partout où se décide le sort de l’humanité. Nous venons d’adhérer au G20 et notre combat pour être membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies avance dans le bon sens. L’intégration économique fait des progrès, au niveau des communautés sous-régionales et à l’échelle du continent, avec la Zleca notamment. En conjuguant ses forces, l’Afrique aura les moyens de sa souveraineté. Et chacun des pays qui la compose, notamment le Sénégal, en profitera.
JEUNE AFRIQUE
Accusé par Karim Wade et le Parti démocratique sénégalais (PDS) d’avoir corrompu deux juges du Conseil constitutionnel pour évincer le fils de « Gorgui », remis en question par certains caciques influents du parti présidentiel, l’Alliance pour la République (APR), dès sa désignation en septembre, toujours contesté par d’autres depuis, confronté comme tout le monde, sans l’avoir souhaité, au report de l’élection au 15 décembre, Amadou Ba a fait le dos rond, s’astreignant au silence, mais conscient des enjeux de la partie de poker qui se joue en coulisses. Soucieux d’apaiser les esprits et de poursuivre sa mission, malgré un contexte volatile et un climat de tension, il a accepté de répondre à nos questions.
Jeune Afrique : Que pensez-vous de la décision validée par l’Assemblée nationale de reporter les élections au 15 décembre ?
Amadou Ba : Je suis partisan de tout ce qui concourt à la transparence du processus électoral et à la paix. En tant que candidat, je tire un intérêt évident à l’intégrité des mécanismes qui encadrent le scrutin : il en va de la crédibilité de mon élection à la tête du pays.
Comment réagissez-vous aux accusations de corruption portées par Karim Wade contre vous ?
Je suis de nature plutôt lucide… Et je suis serein. Je n’ai pas intenté de recours contre Karim Wade, que je sache. Je n’ai pas d’intérêt personnel à la validation ou non de sa candidature. Ces accusations sont tout à fait infondées et l’histoire rétablira fermement les faits.
Macky Sall appelle au dialogue national, pour un processus électoral transparent, dit-il. Comment avez-vous accueilli cette décision ?
J’ai toujours pensé que le dialogue était un élément fondamental du système démocratique. Il est préférable à la violence sous toutes ses formes. Je souhaite que le dialogue envisagé débouche sur un climat paisible et des consensus forts.
Ce report, annoncé la veille du lancement de la campagne, provoque de vives critiques. Les comprenez-vous ?
Chaque acteur est libre de ses choix. Mais en dernière analyse, je pense que le dialogue est une opportunité pour chacun de faire valoir ses opinions et de défendre ses intérêts.
Manifestement, vous avez des ennemis au sein de l’APR qui est votre propre formation…
Je dirais plutôt des adversaires. Ce qui importe pour moi, c’est la détermination à aller de l’avant. Chacun assume ses responsabilités, et j’assume forcément les miennes. L’avenir est un juge très sérieux.
Faut-il réintégrer Karim Wade et Ousmane Sonko pour l’élection du 15 décembre ?
Vous pensez vraiment que mon avis à ce propos est important ? Je ne suis pas celui qui décide d’intégrer ou d’exclure. Je suis un fervent adepte de la légalité institutionnelle, un républicain sans réserve.
Le Sénégal ne sort pas indemne de cette séquence. Son image de modèle démocratique, a fortiori dans une Afrique de l’Ouest encalminée dans les transitions post-coups d’État militaires, est sévèrement écornée. Cela ne vous gêne pas ?
Le plus important, à présent que la décision est actée, c’est de travailler à ramener un climat de paix et de sérénité propice à la discussion. Nous sommes dans un modèle démocratique qui peut rencontrer des difficultés, certes, mais en fin de compte nous finissons toujours par rebondir.
Cela change-t-il quelque chose à votre candidature et à votre stratégie ?
Vous avez toujours en face de vous le candidat. Quant à ma stratégie, elle est simple : continuer à opérer comme je le fais depuis le début, pour gagner. Nous en reparlerons au moment opportun.
Le président de la République vous a pour l’instant confirmé en tant que Premier ministre. Quelles sont vos priorités ?
D’abord, je remercie vivement le chef de l’État pour cette marque de confiance. Je dois être à la hauteur du défi, dans un contexte économique et social qui demande beaucoup d’efforts. Mes priorités restent celles d’un Premier ministre : il s’agit notamment de la coordination de l’action gouvernementale pour plus de performance et de qualité. Je dois traduire en actes les attentes du chef de l’État, qui tient à l’amélioration du pouvoir d’achat des populations, à l’emploi des jeunes et à l’accès de tous nos compatriotes à des soins de santé de qualité. Le tout dans un climat de paix et de sécurité. Ma responsabilité est de travailler chaque jour à la stabilité de mon pays.
Revenons un peu en arrière : vous avez été choisi pour porter les couleurs de l’APR et de la coalition Benno Bokk Yakaar [BBY]. Malgré tout, dès votre désignation, on a noté des voix discordantes. Certains ont même fait dissidence. Comment avez-vous réagi ?
Je comprends que chacun puisse avoir l’ambition de servir le pays à un tel niveau. Pour ma part, l’essentiel c’est que le choix du président Macky Sall, de BBY et de l’APR a été porté sur ma modeste personne, et que les contestations n’ont pas eu une ampleur susceptible d’affaiblir ma légitimité. Par ailleurs, je ne désespère pas que toute la famille se retrouvera. Je tends ainsi la main à tous les amis.
Comment expliquez-vous votre désignation ?
Je crois savoir que j’ai la capacité de mobiliser au-delà de notre majorité. Sociologiquement, nous sommes majoritaires dans ce pays. Il m’incombe de fédérer toutes les énergies pour gagner. J’estime également que je suis bien préparé pour conduire les politiques publiques inspirées par le Plan Sénégal émergent, dont j’ai été au cœur de la conception et de la mise en œuvre grâce à la confiance du président.
Beaucoup a été dit ou écrit sur vos relations avec le président. Qu’en est-il réellement ?
Le seul problème entre le président Sall et moi, c’est qu’il n’y pas de problème ! Je suis son collaborateur, particulièrement engagé dans la traduction en actes de ses instructions. Je mobilise toute mon énergie pour mériter sa confiance. Et il me soutient totalement dans cette quête de performance et d’excellence.
Face à vous et à la majorité présidentielle, l’opposition est nombreuse et déterminée à obtenir l’alternance. Avec de fortes probabilités d’une union au second tour et le scénario, si vous étiez qualifié, du seul contre tous…
Je vais à cette élection pour gagner. J’ai une claire conscience des enjeux et de notre potentiel. BBY est une redoutable machine électorale. Nous proposons à notre peuple un projet politique innovant qui s’appuie sur le bilan des deux mandats de Macky Sall. Nous sommes sur le terrain et les populations que nous rencontrons sont très réceptives à notre offre. Les Sénégalais veulent la paix, des initiatives hardies pour l’emploi et moins de pression sur le pouvoir d’achat, la consolidation des acquis dans tous les domaines et une présence toujours plus active du Sénégal dans le monde. Il faut un président serein, rassurant, expérimenté, confiant en la sagacité politique de son peuple. Je serai ce président, celui de la prospérité partagée pour renforcer l’équité sociale et l’inclusion.
Parmi les écueils que vous devez affronter, il y a la dichotomie entre la continuité que vous êtes censé incarner et le changement qu’attendent nombre de Sénégalais. Est-ce possible de concilier les deux ?
Notre approche est de faire du bilan exceptionnel de Macky Sall la rampe pour accentuer les acquis et ouvrir de nouvelles perspectives sur le chemin de notre émergence. Mon ambition est de faire plus et plus vite pour maintenir le rythme d’une embellie économique profitable à chaque Sénégalais, où qu’il se trouve. Nous allons créer, dans ce cadre, un important pôle financier et au cœur de ce pôle, une banque nationale d’investissement pour accompagner nos politiques de développement et soutenir le secteur privé dans son effort de mobilisation de ressources. Par secteur privé, il faut entendre tous les Sénégalais, y compris ceux de la diaspora, porteurs de projets de création de richesses. Je serai donc un président réformateur, pour libérer davantage notre économie et notre société des pesanteurs.
Le thème de la souveraineté du continent, sur tous les plans, est devenu un enjeu majeur. Sur le plan national, c’est également un sujet d’importance, a fortiori dans une campagne présidentielle. Comment l’envisagez-vous ?
L’Afrique ne veut plus être confinée à la périphérie du monde. Avec sa jeunesse dynamique et ses immenses ressources, notre continent revendique légitimement sa place partout où se décide le sort de l’humanité. Nous venons d’adhérer au G20 et notre combat pour être membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies avance dans le bon sens. L’intégration économique fait des progrès, au niveau des communautés sous-régionales et à l’échelle du continent, avec la Zleca notamment. En conjuguant ses forces, l’Afrique aura les moyens de sa souveraineté. Et chacun des pays qui la compose, notamment le Sénégal, en profitera.
JEUNE AFRIQUE