Pour espérer gagner sa liberté perdue depuis 9 mois, dans une affaire de détournement présumé à la mairie de Dakar, Khalifa Sall accepte de cautionner 1,8 milliard de francs Cfa. Une telle manœuvre va-t-elle lui garantir une remise en liberté avant procès?
Dans un communiqué publié hier, le Collectif d’avocats chargés de la défense du maire de Dakar confirme la demande de liberté provisoire sur caution. Mais ils précisent qu’il s’agit d’un cautionnement et non d’un remboursement en ce sens que «Khalifa Sall continue de contester le bienfondé des poursuites. Et que «ce cautionnement ne saurait être interprété comme une reconnaissance de responsabilités, encore moins de culpabilité».
Mais cette caution va-t-elle garantir la libération de leur client, incarcéré depuis mars 2017 pour détournement présumé ? Certains juristes interrogés par WalfQuotidien répondent par l’affirmative. Ils se fondent sur l’article 155 du Code pénal qui prévoit les circonstances atténuantes, lorsque la personne poursuivie verse, avant son jugement, le 1/3 du montant détourné. «Si l’inculpé veut cautionner la somme qui a fait l’objet de son arrestation, il doit obligatoirement bénéficier d’une liberté provisoire, c’est textuel. Cependant, après jugement, si son innocence est prouvée, on lui rembourse son argent», éclaire un juriste.
Si le juge décide malgré tout d’envoyer l’affaire en jugement, un autre cas de figure se présente : «(…) Le sursis ne pourra être accordé qu’en cas de restitution ou de remboursement avant jugement des trois quarts au moins de ladite valeur». Et que «la demande ou proposition de libération conditionnelle ne sera recevable qu’après restitution ou remboursement de l’intégralité de ladite valeur». Tahibou Ndiaye, ex-Dg du Cadastre, connait bien cette astuce judiciaire très usitée en matière de détournement. Poursuivi pour plus de 7 milliards de francs Cfa, valeur estimée de sa fortune personnelle, il avait mis 3 milliards sur la table, le prix de sa liberté provisoire. Mis en demeure, puis envoyé en prison en décembre 2013 pour enrichissement illicite, il bénéficiera d’un contrôle judiciaire, après une contrepartie de 3,4 milliards cédée à l’Etat.
Un autre cas illustre cette position, avec l’ex-Dg de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser), Modibo Diop, poursuivi pour avoir détourné l’argent de la Banque mondiale devant servir à l’électrification des villages. Lors du procès en appel, l’avocat général Ibrahima Bakhoum avait demandé aux juges de la Cour d’appel de Dakar de lui accorder des circonstances atténuantes, au motif que Modibo avait restitué 165 millions sur 477 534 601 F Cfa détournés.
D’autres spécialistes du droit déclarent, cependant, que la caution peut ne pas garantir au maire de Dakar une libération avant procès. En fait, un revirement de l’agent judiciaire de l’Etat est dans l’ordre du possible car il peut contester la valeur mobilière des biens déposés au greffe par les avocats de Khalifa Sall. De plus, le doyen des juges peut ordonner l’expertise des biens proposés par le camp adverse. Ce qui ferait davantage le maintien en détention du concerné. Ces hypothèses sont d’autant plus plausibles qu’on se rappelle de la jurisprudence Ndèye Khady Guèye, l’ex-administratrice du Fonds de promotion économique (Fpe). Pour gagner sa liberté, elle avait proposé des villas, ses actions dans une société et de l’argent liquide, le tout estimé à 2,7 milliards Fcfa. Belle manœuvre réussie par ses avocats pour tirer d’affaires leur cliente, mais celle-ci s’était révélée sans succès car, malgré tout, le doyen des juges de l’époque, Mahawa Sémou Diouf, avait craché sur l’offre de remise en liberté.
Dans l’affaire Khalifa Sall, le doyen des juges va sans doute s’en référer au procureur, pour ses observations au sujet de la demande de liberté provisoire sur caution. Même si le magistrat instructeur n’est pas tenu par les réquisitions du parquet, il reste probable que le refus du procureur maintiendra Khalifa en détention, jusqu’à ce que la Chambre d’accusation tranche, dans un délai de deux mois, comme ce fut le cas dans plusieurs dossiers, notamment ceux concernant les audits de 2008 ayant impliqué Bara Sady, Baïla Wane, Thierno Ousmane Sy, Amadou Kane Diallo, Christian Salvy…
Poursuivi pour «escroquerie portant sur des deniers publics, détournement de deniers publics, association de malfaiteurs et de blanchiment de capitaux» portant sur 1,8 milliard, Khalifa Sall boucle 9 mois de détention avant jugement, à la Maison d’arrêt de Rebeuss. Son arrestation fait suite à un rapport de l’Inspection générale d’Etat (Ige) sur l’utilisation de l’argent de la Caisse d’avance «sans justification».
Pape NDIAYE
Dans un communiqué publié hier, le Collectif d’avocats chargés de la défense du maire de Dakar confirme la demande de liberté provisoire sur caution. Mais ils précisent qu’il s’agit d’un cautionnement et non d’un remboursement en ce sens que «Khalifa Sall continue de contester le bienfondé des poursuites. Et que «ce cautionnement ne saurait être interprété comme une reconnaissance de responsabilités, encore moins de culpabilité».
Mais cette caution va-t-elle garantir la libération de leur client, incarcéré depuis mars 2017 pour détournement présumé ? Certains juristes interrogés par WalfQuotidien répondent par l’affirmative. Ils se fondent sur l’article 155 du Code pénal qui prévoit les circonstances atténuantes, lorsque la personne poursuivie verse, avant son jugement, le 1/3 du montant détourné. «Si l’inculpé veut cautionner la somme qui a fait l’objet de son arrestation, il doit obligatoirement bénéficier d’une liberté provisoire, c’est textuel. Cependant, après jugement, si son innocence est prouvée, on lui rembourse son argent», éclaire un juriste.
Si le juge décide malgré tout d’envoyer l’affaire en jugement, un autre cas de figure se présente : «(…) Le sursis ne pourra être accordé qu’en cas de restitution ou de remboursement avant jugement des trois quarts au moins de ladite valeur». Et que «la demande ou proposition de libération conditionnelle ne sera recevable qu’après restitution ou remboursement de l’intégralité de ladite valeur». Tahibou Ndiaye, ex-Dg du Cadastre, connait bien cette astuce judiciaire très usitée en matière de détournement. Poursuivi pour plus de 7 milliards de francs Cfa, valeur estimée de sa fortune personnelle, il avait mis 3 milliards sur la table, le prix de sa liberté provisoire. Mis en demeure, puis envoyé en prison en décembre 2013 pour enrichissement illicite, il bénéficiera d’un contrôle judiciaire, après une contrepartie de 3,4 milliards cédée à l’Etat.
Un autre cas illustre cette position, avec l’ex-Dg de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser), Modibo Diop, poursuivi pour avoir détourné l’argent de la Banque mondiale devant servir à l’électrification des villages. Lors du procès en appel, l’avocat général Ibrahima Bakhoum avait demandé aux juges de la Cour d’appel de Dakar de lui accorder des circonstances atténuantes, au motif que Modibo avait restitué 165 millions sur 477 534 601 F Cfa détournés.
D’autres spécialistes du droit déclarent, cependant, que la caution peut ne pas garantir au maire de Dakar une libération avant procès. En fait, un revirement de l’agent judiciaire de l’Etat est dans l’ordre du possible car il peut contester la valeur mobilière des biens déposés au greffe par les avocats de Khalifa Sall. De plus, le doyen des juges peut ordonner l’expertise des biens proposés par le camp adverse. Ce qui ferait davantage le maintien en détention du concerné. Ces hypothèses sont d’autant plus plausibles qu’on se rappelle de la jurisprudence Ndèye Khady Guèye, l’ex-administratrice du Fonds de promotion économique (Fpe). Pour gagner sa liberté, elle avait proposé des villas, ses actions dans une société et de l’argent liquide, le tout estimé à 2,7 milliards Fcfa. Belle manœuvre réussie par ses avocats pour tirer d’affaires leur cliente, mais celle-ci s’était révélée sans succès car, malgré tout, le doyen des juges de l’époque, Mahawa Sémou Diouf, avait craché sur l’offre de remise en liberté.
Dans l’affaire Khalifa Sall, le doyen des juges va sans doute s’en référer au procureur, pour ses observations au sujet de la demande de liberté provisoire sur caution. Même si le magistrat instructeur n’est pas tenu par les réquisitions du parquet, il reste probable que le refus du procureur maintiendra Khalifa en détention, jusqu’à ce que la Chambre d’accusation tranche, dans un délai de deux mois, comme ce fut le cas dans plusieurs dossiers, notamment ceux concernant les audits de 2008 ayant impliqué Bara Sady, Baïla Wane, Thierno Ousmane Sy, Amadou Kane Diallo, Christian Salvy…
Poursuivi pour «escroquerie portant sur des deniers publics, détournement de deniers publics, association de malfaiteurs et de blanchiment de capitaux» portant sur 1,8 milliard, Khalifa Sall boucle 9 mois de détention avant jugement, à la Maison d’arrêt de Rebeuss. Son arrestation fait suite à un rapport de l’Inspection générale d’Etat (Ige) sur l’utilisation de l’argent de la Caisse d’avance «sans justification».
Pape NDIAYE