Qui est réellement Abdou Lahad Ndiaye ?
Abdou Lahad Ndiaye a 35 ans. Il est né à Dakar, plus précisément à Fass, entre Delorme et Paillote. Mais ma famille a quitté très tôt cette localité pour migrer vers Fass Mbao, après les récurrents incendies qui survenaient à l’époque à Fass. Par la suite, il y a eu le décès de mon père. Alors, nous avons été obligés de déménager à Rufisque, ville natale de ma mère qui a été éduquée par Adjaratou Maty Guèye. J’ai par la suite grandi aux côtés de mon père spirituel, Me Mbaye Jacques Diop, car j’ai vécu chez lui aux Hlm 1. Toutefois, j’ai habité avec Mbaye Guèye, le premier Tigre de Fass. Il y a aussi Idrissa Guèye, l’ancien président de la Chambre de commerce qui habitait au Point E. Je faisais tout chez lui.
Donc vous n’êtes pas un «Come on Town», mais bien un vrai «Boy Town» ?
Absolument. Je suis né à Dakar. Mais au Sénégal, si tu as l’habitude de porter des boubous traditionnels, les gens ont tendance à toujours penser que tu viens de l’intérieur. Mais j’en suis fier car aujourd’hui, ce sont les gens qui viennent de l’intérieur qui ont réussi dans ce pays. Si vous regardez les trois présidents du Sénégal, Senghor vient de Joal, Diouf de Saint-Louis et Me Wade de Kébémer. Ils sont donc tous issus de l’intérieur du pays, sans compter les différents Premiers ministres : Abdou Diouf qui est de Saint-Louis et Louga, Habib Thiam de Dagana, Mamadou Lamine Loum de Kaolack, Moustapha Niasse de Nioro, Mame Madior Boye de Saint-Louis, Idrissa Seck de Thiès, Macky Sall de Fatick, Haguibou Soumaré de Thiès et Souleymane Ndéné Ndiaye de Guinguinéo. Tous ne sont pas nés à Dakar. Donc être né à Dakar ne veut pas dire grand-chose. Même s’il y a des gens qui sont nés à Dakar et qui sont aussi des exemples, je peux en citer beaucoup. Mais je suis un vrai «Boy Dakar».
Pourtant de nombreuses personnes pensent qu’Abdou Lahad Ndiaye est originaire du Baol.
C’est normal car depuis ma tendre enfance, j’ai toujours été avec des personnes plus âgées que moi, sans compter que j’aime m’habiller en tenue traditionnelle. Le plus important, c’est de savoir que je suis né à Dakar.
Mais n’aviez-vous tout de même pas connu une enfance très difficile avec la mort de votre père ?
J’ai traversé des périodes très difficiles. Il m’arrivait de marcher de Rufisque à Dakar, de dormir parfois dans un garage et sur une natte. J’ai galéré car je ne voulais ni voler encore moins mendier. J’ai toujours voulu sauvegarder ma dignité pour que ma mère n’ait pas de soucis. Tout ce que je récoltais par-ci et par-là, je rentrais pour l’offrir à mère. Il m’arrivait de porter un boubou pendant des jours. Les chaussures, c’était pour une éternité. J’ai vécu une enfance difficile sans voler ni mendier car je savais qu’un jour, le bon Dieu allait aussi m’ouvrir une opportunité d’aider ma mère.
On a comme l’impression que vous n’avez été ni à l’école coranique encore moins à l’école française.
Si, j’ai un peu étudié à l’école coranique, ce qui n’a jamais été le cas à l’école française. Car dès ma tendre enfance, on m’a inscrit à l’école où je me suis rendu le premier jour et j’ai fait l’école buissonnière. Lorsque j’ai mis les pieds en classe pour la première fois, j’ai senti que je n’étais pas dans mon élément et surtout pas entre quatre murs. J’avais l’impression d’être confiné dans un milieu carcéral. Ainsi, j’ai demandé la permission pour me soulager et, depuis ce jour, je n’ai plus remis les pieds en classe. Je peux vous dire que je n’ai pas fait trente minutes dans une salle de classe. C’est comme si on avait détourné mon esprit de l’école.
Donc vous aviez battu le record. Mais quelle a été la réaction de votre mère ?
Elle n’était au courant de rien. Et chaque jour, elle me réveillait tôt pour aller à l’école, mais je prenais toujours le chemin de l’école buissonnière pour aller vaquer à mes propres occupations. L’école française ne m’a jamais intéressée.
Ce qui est surprenant est que vous arrivez toujours à identifier les noms sur les nombreuses cartes de visite que vous avez, en plus des numéros de téléphone. Est-ce un don de Dieu ?
Je vais vous faire une révélation. Étant jeune, je suis allé rendre visite à mon homonyme à Touba, feu Serigne Abdou Lahad Mbacké (que Dieu ait son âme). Lorsqu’il m’a demandé ce que je voulais devenir, j’ai répondu tout de go : «Je veux avoir de bons rapports avec les hautes autorités, les personnalités et les hommes de Dieu». Subitement, il m’a longuement caressé la tête de sa main avant de me demander de me lever. Aujourd’hui, c’est grâce à lui que je suis devenu ce que je suis. Je n’ai pas fait les bancs, mais je sais lire et écrire grâce aux prières de feu Serigne Abdou Lahad Mbacké.
Mais Serigne Abdou Lahad Ndiaye s’accompagne toujours des gens plus âgés que lui. Est-ce une façon de snober ses amis d’enfance ou ses anciennes connaissances ?
Non ! Jamais je snoberai mes amis d’hier et ceux de ma génération. Le fait que je sois toujours accompagné de personnes plus âgées que moi est un don de Dieu et aussi grâce aux prières de Serigne Abdou Lahad Mbacké. Étant très jeune, je suivais partout l’actuel maire de Yeumbeul, Alioune Kébé. J’aimais aussi m’occuper de l’organisation des meetings et aussi jouer la médiation entre des personnes en bisbilles et cela depuis le bas âge. Donc c’est un fait qui est venu naturellement et grâce aux prières de ma mère et de Serigne Abou Lahad Mbacké.
Mais d’où vient le surnom de «Député» qu’on vous colle ?
(Rires, en tapotant ses deux mains). Étant très jeune, j’avais un faible pour les députés qui étaient des gens très respectés, qui défendaient bien les intérêts de leurs localités respectives. Alors je voulais moi aussi faire partie de cette élite pour défendre ma localité, car je rêvais un jour de devenir député. En plus des politiciens, comme Ousmane Tanor Dieng, Mbaye Jacques Diop, certains parlementaires m’appelaient souvent par ce nom. À un moment donné, d’autres personnes oubliaient même que je m’appelais Abdou Lahad Ndiaye.
On remarque aussi que Lahad est l’ami des hommes du pouvoir comme ceux de l’opposition…
Oui cela est vrai. Du temps où le Parti socialiste était au pouvoir, j’ai permis à de nombreux opposants d’être en contact avec les gens du Ps qui étaient aux affaires. Et tel est le cas aujourd’hui encore, dans l’autre sens. Je n’avais pas de sens interdit ni au Ps encore moins au Pds où j’avais aussi de nombreux amis comme Souleymane Ndéné Ndiaye, Oumar Sarr, Samuel Sarr et tant d’autres. Mes amis d’hier sont toujours restés mes amis d’aujourd’hui.
Lahad Ndiaye qui a connu une enfance difficile fait partie aujourd’hui du jet-set au point même d’avoir sa cour. Cela surprend-il ?
Cela ne doit surprendre personne car c’est grâce à la bénédiction de Serigne Abdou Lahad Mbacké. En plus «xalé bu Loxoom sete mu mën andak ku nek» (un enfant bien éduqué peut aller avec toutes les autres générations). Ce n’est pas une cour, mais j’aime être avec des gens, discuter avec eux, manger avec eux et échanger. Je ne veux pas commettre certaines erreurs. Raison pour laquelle je veux toujours être avec des personnes pour écouter leurs critiques et conseils.
Vous avez des relations très particulières avec Souleymane Ndéné Ndiaye, Samuel Sarr, Oumar Sarr et Cheikh Amar. Qu’est-ce qui vous lie à ces gens très nantis ? Est-ce l’argent ?
Souleymane Ndéné, nos rapports datent depuis qu’il était avocat. C’est mon grand-frère et il m’a beaucoup aidé quand il était avocat. Aujourd’hui, il ne fait pas de distinguo entre sa casquette de chef de gouvernement et celui de citoyen lambda. Il est toujours humble. Il en est de même pour Oumar Sarr et Aminata Tall, cette lionne, une battante. C’est pourquoi j’ai beaucoup de respect pour elle. Ensuite c’est une femme de convictions. Cheikh Amar aussi est un grand-frère et l’on s’est connus depuis longtemps. J’ai beaucoup de respect pour lui parce que tout simplement il a aidé sa famille, ses parents, avant d’aider ses amis. Il n’est pas un «Samba Alaar» comme certains et il est très discret. Si j’avais un enfant de sexe masculin, il allait porter son nom. En plus, c’est un self made man qui travaille pour son pays. Oumar Sarr, on s’est connus du temps où il était dans l’opposition. C’est un homme loyal et fidèle en amitié. Je ne peux pas dire toutes ses qualités. Il faut se rapprocher de lui pour mieux le connaître. Aujourd’hui, c’est quelqu’un qui a reçu la bénédiction du nouveau Khalife grâce à son engagement et à sa passion pour le mouridisme et le défrichage de Khelcom en est une parfaite illustration. Serigne Abdou Khadre Mbacké et Serigne Mourtalla Mbacké l’ont très tôt adopté depuis son jeune âge. Serigne Cheikh Maty Lèye est en train de fidéliser une certaine reconnaissance des anciens Khalifes généraux. Il travaille en étroite collaboration avec son frère Kader Ndiaye et sa femme Marie qui ne cessent de le soutenir. Il est comme Baba Diaw d’Itoc qui aussi est un grand-frère très discret. Il n’a de sens interdit dans aucune confrérie religieuse encore moins dans un parti politique.
Avec votre niveau de vie très élevé, où puisez-vous vos revenus ?
Mais j’ai une société qui s’appelle Lahad Synergie et je gagne des marchés qui me permettent d’aider ma famille et mes proches. J’ai des employés que je paye mensuellement et tout cela par la bénédiction de Serigne Abdou Lahad Mbacké et les prières de ma mère. Sans compter le soutien de mes amis.
Quand vous venez aux combats de lutte, vous agacez même les amateurs lorsque vous jetez de l’argent aux griots laudateurs ?
Vous savez, je n’ai que ma mère et quand on chante ma fille qui porte le nom de ma mère, je ne peux plus me maîtriser. Cela me donne la chair de poule. Toutefois, je demande pardon aux amateurs, car je ne le referai plus jamais. C’est de retour à la maison que j’ai su que je venais de commettre une erreur. Mais j’aime ma fille qui est ma mère et quand on fait ses éloges, je ne peux plus me retenir. Je peux même aller jusqu’à me déshabiller, «Damay xaalu». Je ne veux même pas qu’on chante mes louanges lors des combats de lutte, mais je n’y peux rien et je rends grâce à Dieu et à ma mère.
Nous savons que vous avez divorcé avec votre femme. Est-ce vrai que Lahad est un Don juan, un grand coureur de jupons ?
J’ai divorcé parce que ma femme était très jalouse. Si cela ne tenait qu’à moi, jamais je ne quitterais ma femme qui m’a donné la fille qui porte le nom de ma mère. Mais la vie est faite de rencontres et de séparations.
Mais les filles du jet-set vous appelaient-elles au téléphone à toute heure au point que cela agaçait votre femme qui a fini par claquer la porte avant de demander le divorce ?
Il est vrai que les jeunes filles m’aiment et certaines d’entre elles ne me connaissent que de nom mais souhaitent vivre avec moi. Il y a des filles qui sont provocatrices et prêtes même à perturber votre foyer. Je vais vous raconter une anecdote. Durant la période où je traversais des moments difficiles, certaines filles me snobaient et à la limite me méprisaient même. Aujourd’hui certaines d’entre elles courent derrière moi. Donc vous voyez la vie peut être une éternelle leçon. Le Lahad qu’on méprisait et devenu le plus courtisé. Dieu est grand !
Pensez-vous quand même à vous remarier pour avoir une vie stable ?
Ah oui bien sûr ! Je souhaite que ma future élue soit une fille compréhensive qui puisse accepter tous mes amis. Je ne suis pas difficile, mais je suis exigeant et j’ai aussi des devoirs. Ma future femme devra être courageuse, patiente, compréhensive mais aussi très ouverte car je suis l’ami de tous.
En tant que jet-setter, vous sortez rarement la nuit. Vous auriez peur de sortir nuitamment ?
Pourtant je sors la nuit, mais très rarement, pour rendre visite à des amis. Je suis un couche-tôt. Je suis au lit au plus tard à 22 heures et à 6 heures du matin, je suis debout. Je ne suis pas un épicurien, mais je suis plutôt casanier.
Vous aimez le sport, notamment la lutte et le football. Avez-vous jamais pratiqué une discipline sportive, le football de rue par exemple ?
Quand j’étais jeune, je voulais devenir gardien but. Il m’arrivait même de quitter Rufisque à pied pour venir voir Cheikh Seck qui habitait à l’époque à Liberté 6. Je le suivais partout et c’était mon idole. Je le coinçais même à sa banque pour l’accompagner aux entraînements. Il m’a beaucoup couvé et je l’admirais à tel point que je voulais suivre ses pas et avoir une grande carrière de gardien de but. Mais tel n’a pas été le cas.
Il semble que les soirées dansantes n’étaient pas non plus votre dada ?
Ah non ! Il m’arrivait d’organiser une grande soirée dansante sous forme de nuit blanche où je prenais en charge tous les frais. Comme je n’avais pas de copine, je faisais du chantage et choisissais la fille qui me plaisait où à défaut mettais un terme à la soirée car j’étais le bailleur. Et les gars devaient se soumettre à ma volonté. Les autres avaient leurs copines et moi j’avais les finances donc j’avais la primeur de choisir en premier dans la mesure où je détenais les tunes.
Il se dit qu’étant jeune, vous portiez des sandales «Dima» ou «Ngaye». Aujourd’hui on voit Lahad avec des «Van», mocassins, des chaussures griffées. Fini le temps des vaches maigres ?
Tout à fait ! Dans chaque chose, il y a une évolution. Aujourd’hui, j’aime les mocassins grâce aux personnes âgées avec qui j’étais le plus souvent. J’aime aussi les belles fringues, les basins riches et autres jolis boubous. Toutefois, j’ai toujours été propre, même si je portais des haillons.
Vous aviez été chez l’ancien président Moussa Dadis Camara. Avec quel statut avez-vous été reçu par l’ancien homme fort de la Guinée ?
C’est par le canal de mon ami Dabo qui est le Directeur de publication du journal «La Dépêche Diplomatique». J’ai rencontré Dadis et nous avons déjeuné ensemble et discuté de nombreux projets, mais malheureusement, il n’est plus à la tête du pays. Cependant, je sais qu’il avait de bonnes idées pour son pays.
Vous avez aussi des entrées en Côte d’Ivoire où le président Laurent Gbagbo, Guillaume Soro et Alassane Ouattara vous ont reçu.
Oui par le biais de mon ami Adama Bitogo qui est un grand homme d’affaires. Nous nous sommes rencontrés à Paris. Ensuite, il m’a emmené à Abidjan avant de me présenter à Alassane Dramane Ouattara qui est un ami, le Premier ministre Guillaume Soro et le président Gbagbo. Je peux dire que de nombreuses personnalités prennent le déjeuner ou le dîner chez lui. Il est très influent dans ce pays.
Lahad est aujourd’hui entre les avions en direction de Dubaï, Paris, Abidjan etc. Qu’est ce que vous faites dans ces pays ?
Tout ça, c’est à cause du travail. Je suis un homme d’affaires et j’ai des amis qui me soutiennent, sans compter les relations que je noue avec certains partenaires.
Certains disent que vous êtes un maquereau qui place certaines filles chez ses amis très nantis. Est-ce vrai ?
(Il se fâche) ! Mieux vaut qu’on arrête l’entretien. (Le temps de négocier avec lui pendant quelques minutes). Moi maquereau ! (Il écarquille les yeux). Les chiens aboient et la caravane passe. «Wax ju bon dëkul fëmu jëm, fëmu joge la cosaano». Au Sénégal, les gens sont jaloux et méchants. Ils ne souhaitent jamais la réussite de certains. Mais ce que Dieu m’a donné, personne n’y peut rien. Ceux qui pensent ça de moi sont jaloux de ma réussite et des bons rapports que j’ai avec les hautes autorités de ce pays et rien d’autre.
Vous n’êtes pas non plus un agent secret ?
(Très agacé). Ah non tu en fais trop quand même ! On arrête l’entretien.
Mais attendez, moi j’ai aussi le droit de demander. Libre à vous de répondre ou non.
D’abord, je n’ai même pas le temps. Mais pour être agent secret, il faut savoir écrire et aller dans certains milieux. Mois je suis au lit avant 22 heures et ma seule préoccupation est de m’occuper de mon entreprise et avoir des marchés. En plus, je n’accepterai pas qu’une personne vienne en face de moi pour me proposer cela. Comme je vous l’ai dit de suite, la réussite entraîne toujours de la jalousie.
Vous aviez été à l’origine du dénouement de la crise entre l’Etat et Tfm avec ce coup de fil donné au Premier ministre devant Youssou Ndour. Pouvez-vous revenir sur cette affaire ?
Moi, je n’aime pas l’injustice. J’avais auparavant discuté avec Youssou Ndour qui m’a donné carte blanche pour tenter une médiation dans le blocage de la fréquence de Tfm. J’en ai discuté avec le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye que j’ai appelé séance tenante au téléphone. Le Pm en a fait une affaire personnelle avant d’en parler au chef de l’Etat et les choses se sont décantées. Mais le mérite revient au Premier ministre qui a su convaincre le président de la République qui a été très sensible avant de donner son aval pour la signature du document accordant le signal à Tfm. Moi, je n’étais qu’un simple intermédiaire qui a informé le chef du gouvernement.
Source Le Populaire
Abdou Lahad Ndiaye a 35 ans. Il est né à Dakar, plus précisément à Fass, entre Delorme et Paillote. Mais ma famille a quitté très tôt cette localité pour migrer vers Fass Mbao, après les récurrents incendies qui survenaient à l’époque à Fass. Par la suite, il y a eu le décès de mon père. Alors, nous avons été obligés de déménager à Rufisque, ville natale de ma mère qui a été éduquée par Adjaratou Maty Guèye. J’ai par la suite grandi aux côtés de mon père spirituel, Me Mbaye Jacques Diop, car j’ai vécu chez lui aux Hlm 1. Toutefois, j’ai habité avec Mbaye Guèye, le premier Tigre de Fass. Il y a aussi Idrissa Guèye, l’ancien président de la Chambre de commerce qui habitait au Point E. Je faisais tout chez lui.
Donc vous n’êtes pas un «Come on Town», mais bien un vrai «Boy Town» ?
Absolument. Je suis né à Dakar. Mais au Sénégal, si tu as l’habitude de porter des boubous traditionnels, les gens ont tendance à toujours penser que tu viens de l’intérieur. Mais j’en suis fier car aujourd’hui, ce sont les gens qui viennent de l’intérieur qui ont réussi dans ce pays. Si vous regardez les trois présidents du Sénégal, Senghor vient de Joal, Diouf de Saint-Louis et Me Wade de Kébémer. Ils sont donc tous issus de l’intérieur du pays, sans compter les différents Premiers ministres : Abdou Diouf qui est de Saint-Louis et Louga, Habib Thiam de Dagana, Mamadou Lamine Loum de Kaolack, Moustapha Niasse de Nioro, Mame Madior Boye de Saint-Louis, Idrissa Seck de Thiès, Macky Sall de Fatick, Haguibou Soumaré de Thiès et Souleymane Ndéné Ndiaye de Guinguinéo. Tous ne sont pas nés à Dakar. Donc être né à Dakar ne veut pas dire grand-chose. Même s’il y a des gens qui sont nés à Dakar et qui sont aussi des exemples, je peux en citer beaucoup. Mais je suis un vrai «Boy Dakar».
Pourtant de nombreuses personnes pensent qu’Abdou Lahad Ndiaye est originaire du Baol.
C’est normal car depuis ma tendre enfance, j’ai toujours été avec des personnes plus âgées que moi, sans compter que j’aime m’habiller en tenue traditionnelle. Le plus important, c’est de savoir que je suis né à Dakar.
Mais n’aviez-vous tout de même pas connu une enfance très difficile avec la mort de votre père ?
J’ai traversé des périodes très difficiles. Il m’arrivait de marcher de Rufisque à Dakar, de dormir parfois dans un garage et sur une natte. J’ai galéré car je ne voulais ni voler encore moins mendier. J’ai toujours voulu sauvegarder ma dignité pour que ma mère n’ait pas de soucis. Tout ce que je récoltais par-ci et par-là, je rentrais pour l’offrir à mère. Il m’arrivait de porter un boubou pendant des jours. Les chaussures, c’était pour une éternité. J’ai vécu une enfance difficile sans voler ni mendier car je savais qu’un jour, le bon Dieu allait aussi m’ouvrir une opportunité d’aider ma mère.
On a comme l’impression que vous n’avez été ni à l’école coranique encore moins à l’école française.
Si, j’ai un peu étudié à l’école coranique, ce qui n’a jamais été le cas à l’école française. Car dès ma tendre enfance, on m’a inscrit à l’école où je me suis rendu le premier jour et j’ai fait l’école buissonnière. Lorsque j’ai mis les pieds en classe pour la première fois, j’ai senti que je n’étais pas dans mon élément et surtout pas entre quatre murs. J’avais l’impression d’être confiné dans un milieu carcéral. Ainsi, j’ai demandé la permission pour me soulager et, depuis ce jour, je n’ai plus remis les pieds en classe. Je peux vous dire que je n’ai pas fait trente minutes dans une salle de classe. C’est comme si on avait détourné mon esprit de l’école.
Donc vous aviez battu le record. Mais quelle a été la réaction de votre mère ?
Elle n’était au courant de rien. Et chaque jour, elle me réveillait tôt pour aller à l’école, mais je prenais toujours le chemin de l’école buissonnière pour aller vaquer à mes propres occupations. L’école française ne m’a jamais intéressée.
Ce qui est surprenant est que vous arrivez toujours à identifier les noms sur les nombreuses cartes de visite que vous avez, en plus des numéros de téléphone. Est-ce un don de Dieu ?
Je vais vous faire une révélation. Étant jeune, je suis allé rendre visite à mon homonyme à Touba, feu Serigne Abdou Lahad Mbacké (que Dieu ait son âme). Lorsqu’il m’a demandé ce que je voulais devenir, j’ai répondu tout de go : «Je veux avoir de bons rapports avec les hautes autorités, les personnalités et les hommes de Dieu». Subitement, il m’a longuement caressé la tête de sa main avant de me demander de me lever. Aujourd’hui, c’est grâce à lui que je suis devenu ce que je suis. Je n’ai pas fait les bancs, mais je sais lire et écrire grâce aux prières de feu Serigne Abdou Lahad Mbacké.
Mais Serigne Abdou Lahad Ndiaye s’accompagne toujours des gens plus âgés que lui. Est-ce une façon de snober ses amis d’enfance ou ses anciennes connaissances ?
Non ! Jamais je snoberai mes amis d’hier et ceux de ma génération. Le fait que je sois toujours accompagné de personnes plus âgées que moi est un don de Dieu et aussi grâce aux prières de Serigne Abdou Lahad Mbacké. Étant très jeune, je suivais partout l’actuel maire de Yeumbeul, Alioune Kébé. J’aimais aussi m’occuper de l’organisation des meetings et aussi jouer la médiation entre des personnes en bisbilles et cela depuis le bas âge. Donc c’est un fait qui est venu naturellement et grâce aux prières de ma mère et de Serigne Abou Lahad Mbacké.
Mais d’où vient le surnom de «Député» qu’on vous colle ?
(Rires, en tapotant ses deux mains). Étant très jeune, j’avais un faible pour les députés qui étaient des gens très respectés, qui défendaient bien les intérêts de leurs localités respectives. Alors je voulais moi aussi faire partie de cette élite pour défendre ma localité, car je rêvais un jour de devenir député. En plus des politiciens, comme Ousmane Tanor Dieng, Mbaye Jacques Diop, certains parlementaires m’appelaient souvent par ce nom. À un moment donné, d’autres personnes oubliaient même que je m’appelais Abdou Lahad Ndiaye.
On remarque aussi que Lahad est l’ami des hommes du pouvoir comme ceux de l’opposition…
Oui cela est vrai. Du temps où le Parti socialiste était au pouvoir, j’ai permis à de nombreux opposants d’être en contact avec les gens du Ps qui étaient aux affaires. Et tel est le cas aujourd’hui encore, dans l’autre sens. Je n’avais pas de sens interdit ni au Ps encore moins au Pds où j’avais aussi de nombreux amis comme Souleymane Ndéné Ndiaye, Oumar Sarr, Samuel Sarr et tant d’autres. Mes amis d’hier sont toujours restés mes amis d’aujourd’hui.
Lahad Ndiaye qui a connu une enfance difficile fait partie aujourd’hui du jet-set au point même d’avoir sa cour. Cela surprend-il ?
Cela ne doit surprendre personne car c’est grâce à la bénédiction de Serigne Abdou Lahad Mbacké. En plus «xalé bu Loxoom sete mu mën andak ku nek» (un enfant bien éduqué peut aller avec toutes les autres générations). Ce n’est pas une cour, mais j’aime être avec des gens, discuter avec eux, manger avec eux et échanger. Je ne veux pas commettre certaines erreurs. Raison pour laquelle je veux toujours être avec des personnes pour écouter leurs critiques et conseils.
Vous avez des relations très particulières avec Souleymane Ndéné Ndiaye, Samuel Sarr, Oumar Sarr et Cheikh Amar. Qu’est-ce qui vous lie à ces gens très nantis ? Est-ce l’argent ?
Souleymane Ndéné, nos rapports datent depuis qu’il était avocat. C’est mon grand-frère et il m’a beaucoup aidé quand il était avocat. Aujourd’hui, il ne fait pas de distinguo entre sa casquette de chef de gouvernement et celui de citoyen lambda. Il est toujours humble. Il en est de même pour Oumar Sarr et Aminata Tall, cette lionne, une battante. C’est pourquoi j’ai beaucoup de respect pour elle. Ensuite c’est une femme de convictions. Cheikh Amar aussi est un grand-frère et l’on s’est connus depuis longtemps. J’ai beaucoup de respect pour lui parce que tout simplement il a aidé sa famille, ses parents, avant d’aider ses amis. Il n’est pas un «Samba Alaar» comme certains et il est très discret. Si j’avais un enfant de sexe masculin, il allait porter son nom. En plus, c’est un self made man qui travaille pour son pays. Oumar Sarr, on s’est connus du temps où il était dans l’opposition. C’est un homme loyal et fidèle en amitié. Je ne peux pas dire toutes ses qualités. Il faut se rapprocher de lui pour mieux le connaître. Aujourd’hui, c’est quelqu’un qui a reçu la bénédiction du nouveau Khalife grâce à son engagement et à sa passion pour le mouridisme et le défrichage de Khelcom en est une parfaite illustration. Serigne Abdou Khadre Mbacké et Serigne Mourtalla Mbacké l’ont très tôt adopté depuis son jeune âge. Serigne Cheikh Maty Lèye est en train de fidéliser une certaine reconnaissance des anciens Khalifes généraux. Il travaille en étroite collaboration avec son frère Kader Ndiaye et sa femme Marie qui ne cessent de le soutenir. Il est comme Baba Diaw d’Itoc qui aussi est un grand-frère très discret. Il n’a de sens interdit dans aucune confrérie religieuse encore moins dans un parti politique.
Avec votre niveau de vie très élevé, où puisez-vous vos revenus ?
Mais j’ai une société qui s’appelle Lahad Synergie et je gagne des marchés qui me permettent d’aider ma famille et mes proches. J’ai des employés que je paye mensuellement et tout cela par la bénédiction de Serigne Abdou Lahad Mbacké et les prières de ma mère. Sans compter le soutien de mes amis.
Quand vous venez aux combats de lutte, vous agacez même les amateurs lorsque vous jetez de l’argent aux griots laudateurs ?
Vous savez, je n’ai que ma mère et quand on chante ma fille qui porte le nom de ma mère, je ne peux plus me maîtriser. Cela me donne la chair de poule. Toutefois, je demande pardon aux amateurs, car je ne le referai plus jamais. C’est de retour à la maison que j’ai su que je venais de commettre une erreur. Mais j’aime ma fille qui est ma mère et quand on fait ses éloges, je ne peux plus me retenir. Je peux même aller jusqu’à me déshabiller, «Damay xaalu». Je ne veux même pas qu’on chante mes louanges lors des combats de lutte, mais je n’y peux rien et je rends grâce à Dieu et à ma mère.
Nous savons que vous avez divorcé avec votre femme. Est-ce vrai que Lahad est un Don juan, un grand coureur de jupons ?
J’ai divorcé parce que ma femme était très jalouse. Si cela ne tenait qu’à moi, jamais je ne quitterais ma femme qui m’a donné la fille qui porte le nom de ma mère. Mais la vie est faite de rencontres et de séparations.
Mais les filles du jet-set vous appelaient-elles au téléphone à toute heure au point que cela agaçait votre femme qui a fini par claquer la porte avant de demander le divorce ?
Il est vrai que les jeunes filles m’aiment et certaines d’entre elles ne me connaissent que de nom mais souhaitent vivre avec moi. Il y a des filles qui sont provocatrices et prêtes même à perturber votre foyer. Je vais vous raconter une anecdote. Durant la période où je traversais des moments difficiles, certaines filles me snobaient et à la limite me méprisaient même. Aujourd’hui certaines d’entre elles courent derrière moi. Donc vous voyez la vie peut être une éternelle leçon. Le Lahad qu’on méprisait et devenu le plus courtisé. Dieu est grand !
Pensez-vous quand même à vous remarier pour avoir une vie stable ?
Ah oui bien sûr ! Je souhaite que ma future élue soit une fille compréhensive qui puisse accepter tous mes amis. Je ne suis pas difficile, mais je suis exigeant et j’ai aussi des devoirs. Ma future femme devra être courageuse, patiente, compréhensive mais aussi très ouverte car je suis l’ami de tous.
En tant que jet-setter, vous sortez rarement la nuit. Vous auriez peur de sortir nuitamment ?
Pourtant je sors la nuit, mais très rarement, pour rendre visite à des amis. Je suis un couche-tôt. Je suis au lit au plus tard à 22 heures et à 6 heures du matin, je suis debout. Je ne suis pas un épicurien, mais je suis plutôt casanier.
Vous aimez le sport, notamment la lutte et le football. Avez-vous jamais pratiqué une discipline sportive, le football de rue par exemple ?
Quand j’étais jeune, je voulais devenir gardien but. Il m’arrivait même de quitter Rufisque à pied pour venir voir Cheikh Seck qui habitait à l’époque à Liberté 6. Je le suivais partout et c’était mon idole. Je le coinçais même à sa banque pour l’accompagner aux entraînements. Il m’a beaucoup couvé et je l’admirais à tel point que je voulais suivre ses pas et avoir une grande carrière de gardien de but. Mais tel n’a pas été le cas.
Il semble que les soirées dansantes n’étaient pas non plus votre dada ?
Ah non ! Il m’arrivait d’organiser une grande soirée dansante sous forme de nuit blanche où je prenais en charge tous les frais. Comme je n’avais pas de copine, je faisais du chantage et choisissais la fille qui me plaisait où à défaut mettais un terme à la soirée car j’étais le bailleur. Et les gars devaient se soumettre à ma volonté. Les autres avaient leurs copines et moi j’avais les finances donc j’avais la primeur de choisir en premier dans la mesure où je détenais les tunes.
Il se dit qu’étant jeune, vous portiez des sandales «Dima» ou «Ngaye». Aujourd’hui on voit Lahad avec des «Van», mocassins, des chaussures griffées. Fini le temps des vaches maigres ?
Tout à fait ! Dans chaque chose, il y a une évolution. Aujourd’hui, j’aime les mocassins grâce aux personnes âgées avec qui j’étais le plus souvent. J’aime aussi les belles fringues, les basins riches et autres jolis boubous. Toutefois, j’ai toujours été propre, même si je portais des haillons.
Vous aviez été chez l’ancien président Moussa Dadis Camara. Avec quel statut avez-vous été reçu par l’ancien homme fort de la Guinée ?
C’est par le canal de mon ami Dabo qui est le Directeur de publication du journal «La Dépêche Diplomatique». J’ai rencontré Dadis et nous avons déjeuné ensemble et discuté de nombreux projets, mais malheureusement, il n’est plus à la tête du pays. Cependant, je sais qu’il avait de bonnes idées pour son pays.
Vous avez aussi des entrées en Côte d’Ivoire où le président Laurent Gbagbo, Guillaume Soro et Alassane Ouattara vous ont reçu.
Oui par le biais de mon ami Adama Bitogo qui est un grand homme d’affaires. Nous nous sommes rencontrés à Paris. Ensuite, il m’a emmené à Abidjan avant de me présenter à Alassane Dramane Ouattara qui est un ami, le Premier ministre Guillaume Soro et le président Gbagbo. Je peux dire que de nombreuses personnalités prennent le déjeuner ou le dîner chez lui. Il est très influent dans ce pays.
Lahad est aujourd’hui entre les avions en direction de Dubaï, Paris, Abidjan etc. Qu’est ce que vous faites dans ces pays ?
Tout ça, c’est à cause du travail. Je suis un homme d’affaires et j’ai des amis qui me soutiennent, sans compter les relations que je noue avec certains partenaires.
Certains disent que vous êtes un maquereau qui place certaines filles chez ses amis très nantis. Est-ce vrai ?
(Il se fâche) ! Mieux vaut qu’on arrête l’entretien. (Le temps de négocier avec lui pendant quelques minutes). Moi maquereau ! (Il écarquille les yeux). Les chiens aboient et la caravane passe. «Wax ju bon dëkul fëmu jëm, fëmu joge la cosaano». Au Sénégal, les gens sont jaloux et méchants. Ils ne souhaitent jamais la réussite de certains. Mais ce que Dieu m’a donné, personne n’y peut rien. Ceux qui pensent ça de moi sont jaloux de ma réussite et des bons rapports que j’ai avec les hautes autorités de ce pays et rien d’autre.
Vous n’êtes pas non plus un agent secret ?
(Très agacé). Ah non tu en fais trop quand même ! On arrête l’entretien.
Mais attendez, moi j’ai aussi le droit de demander. Libre à vous de répondre ou non.
D’abord, je n’ai même pas le temps. Mais pour être agent secret, il faut savoir écrire et aller dans certains milieux. Mois je suis au lit avant 22 heures et ma seule préoccupation est de m’occuper de mon entreprise et avoir des marchés. En plus, je n’accepterai pas qu’une personne vienne en face de moi pour me proposer cela. Comme je vous l’ai dit de suite, la réussite entraîne toujours de la jalousie.
Vous aviez été à l’origine du dénouement de la crise entre l’Etat et Tfm avec ce coup de fil donné au Premier ministre devant Youssou Ndour. Pouvez-vous revenir sur cette affaire ?
Moi, je n’aime pas l’injustice. J’avais auparavant discuté avec Youssou Ndour qui m’a donné carte blanche pour tenter une médiation dans le blocage de la fréquence de Tfm. J’en ai discuté avec le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye que j’ai appelé séance tenante au téléphone. Le Pm en a fait une affaire personnelle avant d’en parler au chef de l’Etat et les choses se sont décantées. Mais le mérite revient au Premier ministre qui a su convaincre le président de la République qui a été très sensible avant de donner son aval pour la signature du document accordant le signal à Tfm. Moi, je n’étais qu’un simple intermédiaire qui a informé le chef du gouvernement.
Source Le Populaire