Au moins 22 personnes ont été tuées vendredi lors de violents heurts dans le nord de l'Inde après que la condamnation pour viol d'un gourou controversé eut déclenché la fureur de plus de 100.000 de ses soutiens rassemblés pour le verdict.
Selon le commissaire-adjoint de police Isham Singh, 22 personnes sont mortes et une centaine ont été blessées à Panchkula, une ville de plus d'un demi-million d'habitants dans l'Etat de Haryana. Un précédent bilan de l'hôpital local faisait état de 14 morts.
Les autorités ont déployé des centaines de soldats alors que plus de 100.000 personnes, selon les estimations, s'étaient réunies à Panchkula après qu'un tribunal spécial a reconnu coupable du viol de deux femmes le chef spirituel Gurmeet Ram Rahim Singh.
La nouvelle a déclenché une flambée de violence dans la ville, où un couvre-feu a été imposé et où les connexions internet avaient été suspendues la veille par mesure de sécurité. Selon un journaliste de l'AFP sur place, les policiers ont lancé des gaz lacrymogènes et utilisé des canons à eau face à une foule de manifestants lançant des pierres et qui s'en était prise notamment à deux camions de télévision, renversant l'un d'entre eux.
Les tensions se sont propagées dans le pays. "Deux gares ont été brûlées dans le Pendjab (nord-ouest) et deux wagons ont été incendiées à la station Anand Vihar, à New Delhi", a détaillé Neeraj Sharma, un porte-parole pour la compagnie ferroviaire Indian Railways. Des centaines de trains qui circulaient entre le Pendjab et l'Etat voisin de l'Haryana ont été annulés, a t-il ajouté.
Gourou tape-à-l'oeil
"Le tribunal a reconnu coupable (Gurmeet) Ram Rahim Singh de viol", a confirmé par téléphone à l'AFP le procureur Harinder Pal Singh Verma après une audience à huit clos. Connu sous le surnom de "Gourou tape-à-l'oeil", en raison de son penchant pour les vêtements criards et les bijoux, l'homme a été placé en détention, sous escorte policière. Sa peine sera connue le 28 août, d'après les médias locaux.
Ce chef spirituel de 50 ans, à la tête de la secte Dera Sacha Sauda est suivi par de nombreux fidèles dans l'Etat de Haryana (nord). Il affirme avoir des millions d'adeptes de par le monde. La veille du verdict, les autorités indiennes avaient renforcé la sécurité dans la région, déployant 15.000 hommes, en raison de l'afflux de milliers d'adeptes. Trois stades avaient également été mis à disposition pour détenir d'éventuels fauteurs de troubles, selon les responsables locaux.
"Messager de dieu"
En 2002, un courrier anonyme avait été envoyé à l'ancien Premier ministre indien Atal Bihari Vajpayee, une femme accusant ce gourou de viol ainsi que sur d'autres adeptes de la secte. Il a fallu des années au Bureau central d'enquête (CBI Central Bureau of Investigations) pour retrouver les victimes présumées. Ce n'est qu'en 2007 que deux femmes avaient finalement déposé plainte.
Ce n'est pas la première fois que Gurmeet Ram Rahim Singh se retrouve au coeur d'une polémique. En 2015, il avait été accusé d'avoir encouragé 400 de ses disciples à subir une castration, pour se rapprocher de dieu. Il a par ailleurs été poursuivi en lien avec le meurtre d'un journaliste en 2002.
S'exprimant avant le verdict, des fidèles rassemblés à Panchkula ont manifesté leur soutien au Gourou, certains estimant que sa secte les avaient aidés à sortir de leur dépendance à l'alcool.
L'activité de Gurmeet Ram Rahim Singh avait suscité la colère de nombreux chefs religieux en Inde, notamment les Sikhs qui estimaient que ce dernier insultait et dénigrait leur foi. Dans l'Etat de Pendjab, a majorité Sikh, des manifestations avaient éclaté en 2015 alors que le gourou était apparu dans un film intitulé "MSG: le messager de dieu", le montrant en train d'accomplir des miracles et prêchant devant des milliers de fidèles.
Gurmeet Ram Rahim Singh s'est rendu de sa ville d'origine jusqu'au tribunal dans un important convoi de plus de 100 véhicules, selon les médias indiens. Des images de télévision montraient des fidèles rassemblés le long des rues, la plupart d'entre eux sanglotant sans pouvoir se contrôler.