2016 : Année de désaccords politiques, d’explosion, d’implosion des alliances et d’éclatement des partis

Rédigé par Dakarposte le Vendredi 30 Décembre 2016 à 17:41 modifié le Vendredi 30 Décembre 2016 17:43

La vie politique est une suite de faits subornés d’aléas sur fonds de conjonctures et d’aubaines à saisir. Mais ces aléas font aussi tomber de masques. Durant toute l’année 2016, au Sénégal, le jeu politique a montré son vrai visage, illustrant qu’il est un silo tarabiscoté de controverses, contradictions entre responsable d’un même parti et de démêlés entre leaders d’une même alliance. L’année qui passe n’a donc été marquée que de désaccords politiques, d’explosion d’alliances et d’éclatement de partis. Seul Macky Sall, détenteur du pouvoir d’Etat, diastole et systole de toutes les Institutionsen a bénéficié.

Dès Janvier 2016, Macky Sall a un dialogue fécond toute la classe politique. Ce fut un moment tendu car certains de l’opposition comme Karim Wade et Oumar Sarr étaient embastillés dans le cadre de la traque des biens mal acquis. Mais les réformes institutionnelles qu’il a envisagées de pointaient à l’horizon avec le Référendum qui était prévu le 20 mars.

Mais la réduction ou non réduction du mandat présidentiel a été une pomme de discorde. Le 21 Janvier, l’opposition rejette le projet considérant qu’aucun leader du Cadre de Concertation qui les réunissait n’a été consulté.

Mais cela n’empêche pas le Pr. Sall de tenir le 15 Février un discours  dans lequel, se référant aux référendums de 1963, de 1970 et de 2001, il invite à se prononcer sur le projet de révision constitutionnelle qu’il leur soumet.

Et jaillit le désaccord politique

Malgré une vaste campagne pour le Non et l’abstention de certains partis, le Oui, après avis favorable du Conseil Constitutionnel avant la consultation électorale,  s’imposa le 20 Mars avec un faible pourcentage. Le  mandat présidentiel passe alors de 5 ans à 7 ans et naquit Haut Conseil des Collectivités territoriales, le HCCT. L’Opposition se montre alors féroce contre Macky Sall qui, à son tour, se montre atroce.

D’habitude indifférent aux attaques politiques, il hausse le ton surtout entre Mars, Avril et Mai contre l’Opposition : « Je fais mieux qu’eux. Ils n’oseront jamais parler de mon bilan !(…) je dirige un Sénégal où il n’y a plus de place à la prédation des finances publiques, le Sénégal où il n’y a plus de place à l’impunité. (…). Avant que je n’accède au pouvoir c’était l’anarchie avec ses gens. Cela est révolu ».

L’Opposition demeure silencieuse. Seul le Mouvement Y ‘en à Marre réagit par la voix de Fadel Barro en invitant tous les partis de la Société civile et cette veule Opposition « à voter Non en constituant une grande force de refus. »

Pourtant, après la forte tempête politique avant et après le référendum du 20 Mars 2016, Macky Sall engage un Dialogue national le 28 Mai. Mais les divergences et les désaccords persistent. Néanmoins, Chefs religieux, membres de la Société civile, du secteur privé et même des partis l’Opposition y prennent part sauf la CD /Bokk Gis Gis de Pape Diop, Rewmi de Idrissa Seck et le Gp de Malick Gackou. Le Dialogue national dura 8 tours d’horloge mais le Comité de Suivi du Dialogue national inscrit sa mission aux calendes grecques.

2016 finit alors par être une année d’hostilités entre le Pouvoir et l’Opposition. Sur aucun point, une entente n’a été décrochée. Les attaques se multipliant, les désaccords s’amplifiant, sa famille attaquée, l’APR vilipendée, Macky Sall rugit  en Juillet 2016: « On ne réveille pas un Lion qui dort ! »

Cette menace d’un félin qui aiguise ses crocs trouvent des répliques mortelles comme celle d’Ousmane Sonko, récemment engagé dans l’arène politique et qui a bien laissé une empreinte dans l’année 2016 : «  Un Lion qui dort est le symbole d’un ventre bien rempli, du manque d’agressivité et de paresse ». Cette riposte, à la fois hilarante et blessante eut pour conséquence sa révocation de la Fonction publique, suite à une procédure disciplinaire.

Ces faits majeurs rendent bien compte de la tension politique qui a  marqué l’année 2016 entre un Pouvoir qui tient à l’exercice de son autorité, de ses droits et devoirs et au renforcement de sa force politique qui le tient et une Opposition qui ne fléchit pas et ne rompt pas malgré des coalitions constituées qui unissent des partis d’opposition que rien n’allie.

Explosion et Implosion des Alliances politiques

en 2016, le jeu politique a fait tomber des masques autant du côté du pouvoir que de celui de l’Opposition. L’écrasante majorité s’est fait embarquer dans des Coalitions de circonstance pour avoir une visibilité.

Les plus en vues ont été les Coalitions Benno Bokk Yakaar et  Macky 2012 qui soutiennent Macky Sall et la coalition Manko Wattu Sénégal qui réunit sans unir des partis de l’Opposition. Et  Djibo Ka pour remercier le Pr. Macky Sall de l’avoir « casé », a créé cette année 2016 la Coalition « Jappo Liguéyal sunu réew » qui regroupe avec l’URD et des partis qui s’appellent MCS, FND, MNML, PLC et HBV. Faut-il en rire ou s’en interroger ? C’est une question. Mais la vraie énigme est l’objectif de la Coalition créée par Souleymane Ndéné Ndiaye avec son parti l’UNP, Modou Diagne Fada avec LR et Aliou Sow avec MPD, anciens pontes et mastodontes du PDS de Wade. Efop, Entente des Forces de l’Opposition est son nom.

mais cette coalition ne s’est manifestée qu’ en Juin 2016, le mois de sa création, Aliou Sow étant casé au HCCT,  Diagne Fada attendant, dit-on,  2017 et  Ndéné, ancien Premier Ministre visant plus haut et plus loin.

Ces Coalitions ont presque toute vécu des tensions internes durant en  2016. La majorité ne tient que parce qu’elle est au Pouvoir. Manko Wattu Sénégal implose et les effluves se sont fait sentir après l’interdiction de sa marche du 14 Octobre  pour divergences d’itinéraire à suivre.

Et par la suite, pour des questions de leadership, l’Opposition se divise. Aucun leader ne s’est imposé en 2016 chef de l’Opposition pour incarner une alternative. Les chefs de parti de l’opposition ont été pratiquement tous au pouvoir. Anciens Premiers Ministres, anciens Ministres d’Etat, anciens Ministres, ancien Président de Sénat et d’Assemblée, personne n’imagine se mettre derrière quelqu’un ou à ses côtés pour combattre.

Aussi, la Coalition présidentielle a subi de nombreux remous durant 2016 et des divergences multiples surtout sur les Législatives de 2017. Mais personne ne lève haut la voix le pouvoir étant une question de vie politique.

En même temps, Manko Wattu Sénégal agonise à cause de conflits partisans. Les signes de son implosion se sont manifestés  en 2016. Telle une sauce gombo, Manko regroupe des leaders, féroces adversaires hier jusqu’à  devenus aujourd’hui des alliés de contexte. Déjà, le Coordinateur Gackou est contesté et certains leaders ne se supportent pas malgré la parodie d’union. Les problèmes internes de leadership, de orientations politiques et des réactions aux appels de Macky Sall y alimentent de querelles publiques et mésententes comme on en voit dans les partis.

Signes d’éclatement de partis politiques

Le PS a beaucoup marqué l’année 2016 avec une lutte de tendance opposant partisans de Ousmane Tanor Dieng et ceux de Khalifa Sall. Barthélémy Diaz qui refuse la fusion du parti dans le Macky a été abandonné par la tanorie et l’image du parti s’est craquelée surtout avec les terribles actes de violence du 04 Mars 2016 qui ont abouti devant les Cours et Tribunaux.

Le PDS, de sa part, éclate. Le combat politique entre Aida Mbodji et Diagne Fada pour le Groupe parlementaire des Démocrates et Libéraux alimentent davantage son éclatement avec le départ de certains responsables dont Modou Diagne Fada qui semble résolument engagé sur la voie du Macky.

L’année 2017 qui s’annonce risque de réserver de nombreuses surprises et plusieurs aléas : c’est une année électorale, celle des Législatives, une année de combines et de combinaison qui donnerait une autre physionomie au champ politique Sénégal.

Le Piroguier
Cheikh Amidou Kane
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